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samedi 30 mars 2013

Grève de la faim sans précédent à Guantanamo

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MONDE -  le 30 Mars 2013

Grève de la faim sans précédent à Guantanamo

                
               A Guantanamo (archive)
Depuis cinquante jours, une centaine de détenus par les Etats-Unis à Guantanamo (une trentaine selon les autorités militaires américaines) observe une grève de la faim après une fouille de "routine".
Le 6 février dernier, lors d'une fouille de "routine", selon les autorités de la prison, des effets personnels ont été confisqués et des Corans ont été examinés d'une manière que les prisonniers ont perçue comme "une profanation religieuse". Depuis cette date, la vaste majorité du camp 6, qui abrite environ 130 détenus connus pour être les plus conciliants, observent une grève de la faim "sans précédent par son ampleur, sa durée et sa détermination", selon David Remes, qui défend 15 détenus, dont 13 grévistes. Parmi eux, 86 hommes déclarés "libérables" par l'administration de Barack Obama faute de preuves, dont une trentaine de Yéménites.
Alimentés de force
Les autorités militaires américaines minimisent. Elles faisaient vendredi état de 37 grévistes de la faim sur les 166 détenus de la prison, un chiffre multiplié par quatre depuis leur premier bilan le 11 mars. Selon le porte-parole de la prison, le capitaine Robert Durand, 11 d'entre eux sont alimentés de force avec des tubes, dont deux ont été hospitalisés pour réhydratation et observation.
Abdalmalik Wahab, 33 ans, dont 11 dans les geôles de Guantanamo, est en grève de la faim depuis maintenant 50 jours. Comme son compatriote yéménite Uthman Uthman, il a perdu 20 kilos pour dénoncer la profanation de leurs Corans. Les deux détenus, affaiblis par leur jeûne et alimentés de force par les militaires de la prison, ont parlé par téléphone vendredi après-midi avec leur avocat David Remes. Celui-ci a rapporté à l'AFP la teneur de leur entretien d'une heure et demie chacun, et certaines de leurs déclarations.
Le froid pour casser la grève
Uthman, 45 ans, a raconté à son avocat comment il était alimenté de force, attaché avec des sangles sur des chaises roulantes, comment il avait vomi du sang et perdu conscience. Transféré il y a quatre semaines au camp 5, où sont incarcérés les prisonniers en quartier disciplinaire, Uthman y dispose de bouteilles d'eau. Mais les avocats ont dénoncé la privation d'eau potable et les températures "extrêmement froides" imposées au camp 6 pour casser la grève de la faim. Les autorités militaires ont catégoriquement démenti ces allégations dans un litige en cours devant un tribunal de Washington.
Uthman dit que ses co-détenus ne font confiance ni au nouveau commandement de la prison, ni au Comité international de la Croix Rouge, venu plus tôt que prévu à Guantanamo en raison de la grève. C'est la seule organisation habilitée à rencontrer les détenus de cette prison américaine érigée à Cuba. "Personne ne leur parle", a révélé Uthman à Me Remes.
"Ils sentent venir la mort"
Les détenus "sentent la mort en eux, ils sentent venir la mort", a confié Abdalmalik à son avocat, dans une conversation séparée. Pour lui, seul un accord sur la manipulation du livre saint les convaincrait de reprendre une alimentation normale. "On veut une règle claire", a-t-il dit, "personne n'irait cacher quoi que ce soit dans son Coran, même si nous le voulions".
Mais il n'exclut pas que ce soit insuffisant pour d'autres prisonniers, enfermés pour la plupart depuis 11 ans sans inculpation ni procès, tandis que Barack Obama n'a pas honoré sa promesse de fermer la prison controversée.
Désespoir
"C'est l'expression ultime de leur désespoir" alors que s'éloigne pour eux toute perspective de sortir un jour, a déclaré David Remes. Pour lui, le Pentagone doit respecter leur volonté et ne pas les alimenter de force, comparant leur cas à celui de l'Irlandais Bobby Sands, mort au terme de 66 jours de jeûne. "Les détenus sont déterminés à aller jusqu'au bout", selon l'avocat.
"Dites à ma famille de me pardonner si je meurs", a demandé Abdalmalik.
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S.G.

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