A Amiens, les Dunlop subissent la flexibilité pour éviter le sort des Goodyear
(PHILIPPE HUGUEN / AFP)
Dans l'espace industriel nord d'Amiens (Somme), les usines Goodyear et Dunlop se font face. Les deux usines de pneumatiques appartiennent au même groupe. Seule une route les sépare, mais tout les oppose. Côté nord, l'usine Goodyear, dont la direction a annoncé la fermeture, jeudi 31 janvier, laissant sur le carreau 1 173 salariés. Côté sud, l'usine Dunlop, où un millier de salariés semblent plus protégés, après avoir accepté de faire de nombreuses concessions.
Stratégie industrielle différente, relations sociales opposées… "Un peu comme deux sœurs jumelles qui auraient toujours eu du mal à faire partie de la même famille, les usines Goodyear et Dunlop ont connu des destins très différents", résume PhilippeFluckiger, journaliste au Courrier Picard.
Flexibilité et concessions contre maintien de l'emploi
Pour comprendre cette rupture entre Dunlop (Amiens-sud) et Goodyear (Amiens-nord), il faut remonter à 2007. Cette année-là, le groupe connaît des difficultés financières, et demande aux salariés de ses deux sites picards de faire des efforts, sans quoi plusieurs centaines de postes seront supprimés.
Du chantage à l'emploi, en bonne et due forme. Sans augmentation de salaire, les ouvriers de Dunlop acceptent, en 2008, de passer aux "4x8" – c'est-à-dire enchaîner deux jours où ils travaillent le matin, deux jours l'après-midi, deux jours la nuit, avec une journée de pause au milieu, et deux jours de repos. Les salariés peuvent ainsi travailler jusqu'à 48 heures par semaine. En contrepartie, la direction s'engage à investir 50 millions d'euros en trois ans, et à maintenir la production et les emplois sur le site.
De l'autre côté de la route de Poulainville, les représentants des salariés de Goodyear rejettent l'accord. "Chez Goodyear, l'affrontement entre direction et syndicats, et singulièrement la CGT, a toujours été frontal", explique le journaliste Philippe Fluckiger. "Cet accord était pour nous inapplicable dans le temps. Il n'était pas viable, car trop contraignant pour les salariés", justifie aujourd'hui Virglio Mota da Silva, délégué syndical Sud-chimie. Résultat : le groupe n'investit plus dans l'entreprise, et les plans sociaux se succèdent, pour aboutir à l'inévitable : la fermeture du site, annoncée jeudi matin.
"Les 4x8, c'est invivable. Mais on n'a pas le choix..."
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