SOCIAL-ECO - le 30 Mai 2013
Diktats, l'éditorial de Michel Guilloux
Une déclaration de guerre, voilà ce à quoi fait penser la lecture des propositions économiques de la Commission européenne à la France. Le texte que soumet le cénacle de dirigeants européens non élus au prochain Conseil européen ressemble plus à une suite de diktats qu’aux « recommandations » de son intitulé. Les retraites sont en première ligne.
Les pensions ne devraient plus pouvoir être revalorisées en tenant compte a minima de l’inflation. L’âge légal de départ devrait être augmenté, tout comme la durée de cotisation. La Sécurité sociale et les budgets des collectivités territoriales devraient être soumis aux mêmes critères d’austérité que le budget
de l’État. La concurrence dans le secteur des services doit être renforcée. Dans le secteur ferroviaire, les transports intérieurs doivent être ouverts à la concurrence ; dans celui de l’énergie, et avec le même objectif, il faudrait
en finir avec les tarifs réglementés du gaz et de l’électricité pour les entreprises. En matière de fiscalité, il faudrait encore réduire les taux de l’impôt sur les sociétés
comme sur le revenu mais augmenter les impôts indirects tels les taux réduits de TVA...
Rarement, en si peu de mots, la logique du néolibéralisme le plus débridé, le plus antisocial,
le plus inefficace économiquement n’aura cherché
à s’imposer. La brutalité des mesures s’accompagne de l’ordre aboyé aux dirigeants français de venir rendre compte de leurs « progrès » dans leur mise en œuvre
« au moins tous les six mois ». Nous n’oublierons pas
une formule qui revient tel un leitmotiv tout au long : aucune décision ne doit permettre d’augmenter salaires
et pouvoir d’achat,
ni imposer aux entreprises de nouvelles règles ou taux de contribution sociaux.
Que répondent les dirigeants de la France à pareille morgue qui n’avait d’égal que le ton,
la politique et le programme de Nicolas Sarkozy et de ses alliés de Bruxelles et de Berlin ?
« Nous ferons les réformes » demandées déclare le premier ministre mais « à notre manière ». Mardi, répondant
à l’interpellation à l’Assemblée nationale du communiste André Chassaigne, sur l’héritage du programme du Conseil national de la Résistance, l’hôte de Matignon assurait que la ligne suivie aujourd’hui allait dans le sens de la garantie de ses acquis. Dès le lendemain, un démenti est apporté. Comment concilier progrès social et efficacité économique quand on prend le risque de s’engager durablement dans la voie de l’austérité pour tous
les budgets publics, la diminution des recettes, la remise en cause de services publics hérités du Front populaire
et du CNR, le transfert via la TVA sur les plus pauvres
de la charge de l’impôt ?
La croissance ne peut être au rendez-vous,
le chômage de masse durable, si. Le président de
la République aime se référer au modèle Schroeder, pour prouver son engagement socialiste. Au vu du cortège de misère de masse et de contrôle social des chômeurs qu’il
a entraînés en cogestion avec la droite, cela ressemble plus à un blairisme « présentable » qui trouve sa traduction véritable dans les « recommandations » bruxelloises. Elles ont au moins un mérite : poser noir sur blanc ce qui attend le pays. Les faire connaître, alerter, mettre en débat des solutions alternatives constitue autant de conditions
à des ripostes populaires éclairées. Déjà les syndicats
de cheminots appellent à la grève face aux risques pesant sur la SNCF. À l’initiative du PCF et du Front
de gauche, plus de 28 organisations de toute la gauche se retrouveront le 16 juin pour des Assises du changement. Elles sont nécessaires et il est urgent.
La Commission européenne se livre à une série d’attaques sans précédent contre
le modèle hérité
du CNR.
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