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mercredi 2 janvier 2013

2013, année charnière pour le syndicalisme Français



Un article publié dans le journal le MONDE du 3/01/2013
2013, année charnière pour le syndicalisme Français 
Analyse 
Michel Noblecourt
Editorialiste

Sur fond de climat social déprimé, où l’inquiétude prend le pas sur la combativité,
l’année 2013 va changer, peut-être profondément , le paysage syndical français, avec relèves et déclassements en perspective.

Aux changements de dirigeants dans les principales centrales syndicales va s’ajouter, à l’été 2013, une nouvelle liste des confédérations représentatives au niveau national interprofessionnel.

Sauf coup de théâtre, Thierry Lepaon devrait succéder à Bernard Thibault comme secrétaire général de la CGT, le 22mars, à l’issue du congrès de Toulouse.

A la tête de la CFDT, François Chérèque a laissé la place, le 28novembre 2012, à Laurent Berger.

A la CFE-CGC ,Carole Couvert va disputer la présidence à Bernard Van Craeynest au congrès de Saint-Malo en avril.

 La CFTC s’est dotée, en novembre2011, avec Philippe Louis, d’un nouveau président.

A FO, Jean-Claude Mailly a renvoyé la question de sa succession en 2015 ,en reportant d’un an son congrès.

 Enfin, Laurence Parisot  achève son mandat à la présidence du Medef le 1er juillet.

A la CFDT ,la transition s’est faite en douceur. M.Berger,qui a choisi comme numéro deux Véronique Descacq, est sur la même ligne réformiste que M.Chérèque.
Mais il a commencé à imprimer sa marque en envoyant des signaux. Il a averti le Medef que,dans la négociation sur la sécurisation de l’emploi, qui devrait s’achever les 10 et 11 janvier, la signature de la CFDT n’aurait rien d’automatique, en faisant de l’adoption de mesures contre la précarité  un préalable .Dans CFDT-Magazine de janvier, M.Berger souligne que sa centrale «doit s’interroger sur la société et le monde du travail qu’elle souhaite construire demain» et «instaurer un nouveau pacte social».  A l’égard du gouvernement socialiste dont il est le partenaire syndical privilégié, il prévient qu’il refusera toute « instrumentalisation »: « Notre rôle est d’être au coeur de la mêlée sociale et non dans la mêlée politique.»
A  la CGT, c’est au terme d’une guerre de succession de neuf mois que M.Lepaon a été choisi, le 6 novembre 2012 , par le comité confédéral national, pour être le seul prétendant à la succession de M.Thibault en mars . Depuis1999, le secrétaire général sortant a poursuivi la mutation réformiste de la CGT, avec l’objectif, tenu  partiellement, de renforcer son implantation dans le secteur privé. Il a coupé les derniers liens avec le Parti communiste, réhabilité la pratique de la négociation et même du compromis, résisté au jusqu’au-boutisme dans le conflit sur les retraites en 2010. Mais ce bilan positif a été entaché par l’échec du processus de sa succession,qu’il voulait transparent et démocratique. Aux changements de dirigeants va s’ajouter, à l’été,une nouvelle liste des confédérations représentatives M.Thibault n’a pas réussi à imposer une femme–Nadine Prigent –, et il s’est opposé au favori de l’appareil, Eric Aubin, qui, venu du privé, offrait l’avantage d’incarner de manière très ouverte–notamment dans ses rapports avec la CFDT – la ligne moderniste.  Résultat: M.Thibault est perdant-perdant. Mis en minorité par deux fois dans ses instances, il a dû se résigner au choix par défaut de M.Lepaon, lequel prévenait, le 31mai,à propos de cette «crise de direction » : « Je pense que nous enclenchons une politique du pire.»
Obligé de cohabiter jusqu’en mars avec un successeur qu’il n’a pas choisi, .Thibault est en train de l’enfermer dans une ligne dure, comme si la radicalité était le seul moyen de refaire l’unité de la CGT. Le 28 décembre 2012, il a redit que son syndicat serait  «très mobilisé pour empêcher tout accord générant plus de flexibilité dans le marché du travail», comme si les autres étaient déjà résignés à ratifier un accroissement de la précarité… Il impose à M. Lepaon, ancien salarié de Moulinex, chef de file de la CGT au Conseil économique, social et environnemental, réputé pragmatique et ouvert au dialogue, un rôle à contre-emploi. La CGT risque surtout d’être en porte-à-faux vis-à-vis des salariés qui, selon un sondage Harris Interactive pour Le Peuple, l’organe officiel de la CGT, attendent d’elle à 48%plus de réalisme
dans les négociations, à 43%, plus d’«écoute des travailleurs», à 39%, «de nouvelles solutions à la crise économique» et seulement à 27% qu’elle soit «plus combative»

Depuis la réforme de la représentativité introduite par la loi du 20 août 2008, la CFE-CGC est en proie à de sérieux déchirements. La centrale des cadres a pourtant conservé son privilège de «confédération  catégorielle interprofessionnelle», ce qui lui garantit en 2013 sa représentativité nationale,en obtenant 8% des voix auprès du seul personnel d’encadrement. Dans un premier temps,M.Van Craeynest avait envisagé de faire de la CFE-CGC une centrale généraliste ouverte à tous les salariés, quitte à la marier avec l’UNSA. Ces velléités ont fait long feu. La CFE-CGC restera catégorielle mais la guerre est ouverte  entre son président et sa secrétaire générale, Carole Couvert, 39ans, qui, soutenue par plusieurs fédérations, et sur fond d’imbroglio financier, brigue sa place.

Dans la bataille de la représentativité qui se jouera en 2013, la CGT fait grand cas de sa «victoire» aux élections dans les très petites entreprises, où elle a emporté 29,54% des voix, ce qui est surtout dû au fait que les 4,6millions de salariés de ces  TPE n’évoquent que la CGT quand ils citent un syndicat. Même si la CFTC (6,53%) s’en sort mal et l’UNSA (7,35 %) bien, un scrutin où seuls 10,38%des électeurs
votent ne peut en aucun cas augurer  du verdict qui sera rendu , pour quatre ans, à l’été 2013..


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