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vendredi 26 avril 2013

La CGT sermonne le chef de l’Etat et l’appelle à changer de cap


La CGT sermonne le chef de l’Etat et l’appelle à changer de cap
«Le Monde» dévoile la lettre ouverte adressée à M.Hollande par Thierry Lepaon

                 Il n’est pas trop tard pour changer de cap. Tel est le sens de la démarche solennelle et inédite qu’entreprend Thierry Lepaon en adressant, vendredi 26 avril, une lettre ouverte à François Hollande. «Ce n’est pas une démarche hostile,pas du tout, a précisé au Monde le secrétaire général de la CGT qui, depuis son élection le 22 mars, a rendu une visite de courtoisie au chef de l’Etat. C’est une démarche de responsabilité.»
«Il y a maintenant un an, écrit M. Lepaon, les Françaises et les Français vous élisaient président de la République. Ils affirmaient ainsi le besoin d’une rupture avec la politique économique et sociale menée précédemment. De ce besoin, vous en avez fait votre slogan: “Le changement ,c’est maintenant” . La CGT s’était clairement exprimée pour un changement de majorité dans l’intérêt des salariés. Or, nous sommes contraints de constater l’écart grandissant entre vos engagements et les actes. Le décalage est immense entre les attentes des salariés et les réponses
politiques apportées. Pour les salariés, rien n’a changé positivement dans leur vie au travail et dans leurs conditions sociales.»

«Ma crainte, c’est que le FN mobilise plus que les syndicats de salariés le 1er-Mai»
Thierry Lepaon secrétaire général de la CGT


 M. Lepaon rappelle que lors de la conférence sociale de juillet 2012, M.Hollande avait présenté une feuille de route.«Une feuille de route ,en particulier en matière sociale,ne peut pas être continuellement remise en cause ou déchirée pendant le parcours», souligne le dirigeant de la CGT. Il demande que la prochaine conférence sociale, les 20 et 21 juin, porte sur «l’augmentation des salaires et du pouvoir d’achat,l’emploi,la politique industrielle,les services publics, une protection sociale de haut niveau, les droits à la retraite ». Dans son texte, M. Lepaon revient sur la transcription dans la loi de ’accord sur l’emploi qui «divise les Français, les salariés, les organisations syndicales et les parlementaires, y compris ceux de la majorité .Comment dans ces conditions le texte de l’accord du 11 janvier pourrait-il devenir loi de la République?» Critiquant le refus de l’amnistie syndicale, M .Lepaon s’insurge: «Derrière la loi d’amnistie se joue aussi la condamnation de la politique de votre prédécesseur dont la brutalité a contraint nombre de salariés à se mobiliser et à agir. Beaucoup ont voté pour vous et vous les rejetez. La poursuite de cette attitude serait incompréhensible.»
A la fin de cette lettre qui relève plus de l’avertissement que de la déclaration de guerre, M. Lepaon martèle:«La rupture avec les politiques d’austérité et de rigueur budgétaire doit être à l’ordre du jour en France et en Europe.» «On pense que la situation est grave et qu’il faut que le président se ressaisisse, explique au Monde M .Lepaon. Je pense que s’il a bien conscience de cette situation, il doit prendre les décisions qui visent à faire en sorte que le cap soit changé. Il n’est pas trop tard pour bien faire. Le président est au pied du mur:ou c’est un changement de cap ou il renonce à la feuille de route, celle du changement».Avec la loi sur l’emploi, dit ’ il, «une partie de la France va s’opposer à une autre partie de la France.
Le rôle du président de la République, c’est de rassembler. C’est sa mission première. On ne sort pas d’une crise avec un pays divisé». Fustigeant «l’absence de stratégie industrielle» et réclamant un débat national pour savoir si «le travail est un coût ou une richesse», M. Lepaon souligne que «le problème n’est pas de dire au président “vous êtes comme le précédent”. Mais il est trop sensible aux arguments du Medef».
Sur le refus de l’amnistie, il évoque «une faute politique»«on ne crache pas sur ceux qui vous ont fait élire » – et affirme : «On est plus doux avec les opposants au
mariage pour tous qu’avec les syndicalistes ouvriers, la seule catégorie qui est toujours ciblée.»
M.Lepaon espère retisser des liens avec la CFDT.«Notre syndicalisme n’a pas d’avenir si on n’avance pas de manière unitaire.» L’image du syndicalisme français,qui va défiler de façon divisée le 1er-Mai,«est triste à mourir».«Ma crainte,ajoute-t-il, c’est que le Front national mobilise plus que les syndicats de salariés le 1er-Mai et ça, c’est terrible».
La CGT et la CFDT manifesteront, dans la semaine du 7 au 14 juin, avec les yndicats européens sur le slogan «changer de cap contre les politiques d’austérité», et M.Lepaon se montre optimiste sur la présentation à la conférence sociale d’un «tronc commun de propositions» avec la CFDT.
M.Lepaon confirme son refus de manifester avec le Front de gauche le 5mai:
«C’est un homme politique respectable qui a appelé à une manifestation politique. Dans ses repères revendicatifs, la CGT ne propose pas une Vie République. Et ce n’est pas une confédération qu’on siffle et qui vient.» M.Hollande n’est pas le seul visé par le sermon du dirigeant cégétiste.

Michel Noblecourt

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