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vendredi 26 avril 2013

Étapes, l'éditorial de Michel Guilloux

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SOCIAL-ECO -  le 26 Avril 2013

Étapes, l'éditorial de Michel Guilloux

Et l’on parle de « record », comme s’il ne s’agissait 
que de chiffres 
et non d’hommes, de femmes, de chair et de sang. 
Le mur de l’argent soutient le plafond du chômage. Plus le premier se renforce, plus le second s’élève. Chaque mois, des milliers d’emplois sont sacrifiés dans le pays. Plus de cinq millions de personnes sont condamnées à cette peine de mort sociale qu’est l’absence de travail et, parmi elles, plus de deux millions sont en chômage de longue durée.
Et l’on parle de « record », comme s’il ne s’agissait que de chiffres, de nombres, de statistiques, et non d’hommes, de femmes, de chair et de sang, dont la vie brusquement se dérobe sous les pieds avec l’avenir bouché. Plus ils sont nombreux, plus grandit la peur de le perdre, parmi celles et ceux qui ont un emploi, terreau propice et nécessaire à tous les chantages et reculs sociaux. Jamais on n’a tant entendu parler de « lien social » que ces dernières années, tandis que la régression s’installe à tous les étages de la société. Premier des droits constitutionnels, aux côtés du droit de se syndiquer et du droit à la Sécurité sociale, héritage de la Libération, il est attaqué, miné, remis en cause de toutes parts, comme les deux autres, depuis des années – singulièrement durant les dix ans de règne de la droite. C’est là où la gauche 
est attendue par ceux qui ont passé le coup de balai 
sur la bande du Fouquet’s soutenue par le Medef, voilà presque un an.
Le parti de l’argent, lui, n’a jamais eu autant de couleurs qu’en
cette période de croissance nulle entretenue depuis des années. Ses choix de rentabilité financière immédiate la tuent, contribuent à fermer les entreprises une fois la sève du profit bue jusqu’à plus soif, et sacrifient investissements productifs et recherche. Ils maintiennent aussi le salariat, actif, au chômage ou à la retraite, dans l’écrasement de ses revenus, qui, à son tour, tue la consommation et fait repartir la machine pour un tour et s’enfoncer un peu plus le pays dans le déclin. On peut se convertir à l’idéologie du « coût du travail ». On peut se gargariser de mots tels « sérieux budgétaire », voire « relance », ou chanter Ça ira mieux demain. Aucune offensive n’a été lancée pour s’attaquer aux privilèges de la rente. Pis, les mesures prises accompagnent les diktats du Medef : plus de flexibilité, baisses de salaires par le chantage à l’emploi du fait de la crise avec la loi entérinant l’ANI, capitulations en rase campagne sur le front industriel devant les Mittal, Total et autres cracks du CAC 40 qui avaient un autre candidat en avril dernier que l’actuel locataire de l’Élysée. Sans oublier les Peugeot, capables d’anticiper sur la future loi en expulsant de leurs effectifs plusieurs centaines de salariés sans même un plan dit « social ».
Certains évoquent un  «deuxième temps» du quinquennat ; d’autres, une  «accélération».Est-ce en appelant à « se réconcilier avec les entrepreneurs », comme l’envisage le président de l’Assemblée ? L’expérience en cours, si l’on ne veut recourir à l’histoire, démontre que plus on cède aux exigences du patronat, plus il en redemande. La lamentable reculade du gouvernement, insultant au passage la majorité de gauche au Sénat, sur le projet d’amnistie sociale, est un pas inquiétant de plus, après le refus de sanctionner les licenciements boursiers, d’accorder des droits nouveaux aux salariés et à leurs représentants, et d’ajouter de l’austérité à l’austérité en matière de budget public. Fort heureusement, dans les rangs écologistes et jusqu’au sein des élus socialistes, ce dernier épisode ne passe pas, signe du mécontentement qui sourd parmi le peuple artisan de la défaite de la droite ultralibérale et « décomplexée ». Le 1er Mai comme le 5 mai seront deux étapes différentes permettant de l’exprimer. Deux étapes, pas la fin de l’histoire.
Michel Guilloux

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