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Pour Hervé Gattegno, la politique du chef du gouvernement est impopulaire. Il a un problème d'austérité et un problème d'autorité.
Par HERVÉ GATTEGNO
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RMC : Contrairement à François Hollande, qui a semblé prendre ses distances avec le PS et la gauche dans son interview télévisée, Jean-Marc Ayrault se revendique (dans leJDD d'hier) comme "Premier ministre socialiste". Votre parti pris : Jean-Marc Ayrault est peut-être socialiste, mais est-il encore Premier ministre ? On croit deviner votre réponse...
Hervé Gattegno : Tout le monde a relevé que François Hollande n'avait pas cité Jean-Marc Ayrault en une heure quinze d'émission, jeudi dernier. On ne sait pas s'il a fait exprès (à l'Élysée et au PS, les avis divergent), mais ça ne sert pas le prestige du Premier ministre.L'interview du JDD servait à rétablir l'idée d'une répartition des rôles entre l'Élysée et Matignon. Mais que Jean-Marc Ayrault en fasse des tonnes sur sa proximité avec François Hollande et sur son "identité" de gauche ne change rien à son affaiblissement : sa politique est impopulaire, sa majorité inquiète, son gouvernement indiscipliné. En résumé : il a un problème d'austérité et un problème d'autorité.
Est-ce que c'est pour y remédier que le Premier ministre vient de réorganiser son équipe de communication ? Ça peut avoir un effet ?
L'annoncer juste après l'émission de François Hollande montre surtout qu'il y avait urgence - c'est de la communication... de crise ! Puisque même François Hollande ne le cite plus, Jean-Marc Ayrault veut faire parler de lui (au sens propre). En réalité, c'est le retour aux fondements de la Ve République : un Premier ministre utile, mais réduit... aux utilités. Il précise le calendrier, annonce des concertations - il fait le service après-vente. L'existence politique d'Ayrault ne peut guère aller très au-delà, car, à la différence de ses prédécesseurs, c'est un Premier ministre moins populaire (ou encore plus impopulaire) que le président... Il devrait être un poids lourd et il est déjà presque un poids mort.
Un livre sur l'affaire des hauts-fourneaux de Florange raconte que Jean-Marc Ayrault s'est presque fait insulter par Arnaud Montebourg durant cette crise. Est-ce que c'est un épisode qui a nui à son autorité ?
Ça ne fait aucun doute. D'autant que Jean-Marc Ayrault est allé très loin, dans cette affaire, pour humilier son ministre - en le désavouant, en l'écartant des négociations avec Mittal. François Hollande a refusé la démission de Montebourg, ce que Montebourg a considéré comme un demi-désaveu de Matignon... On en est là. Au-delà du conflit personnel, il y a un affrontement politique qui n'est pas résolu. Et un problème fonctionnel à Matignon que d'autres ministres pointent aussi. Montebourg n'est pas le seul à reprocher à Ayrault de "gérer la France comme le conseil municipal de Nantes" - certains rappellent même que Nantes est une ville très endettée...
Jean-Marc Ayrault a aussi confirmé qu'Arnaud Montebourg lui aurait dit : "Tu fais chier la France entière avec ton aéroport de Notre-Dame-des-Landes." On ne parle plus de ce projet. Vous savez où il en est ?
Comme toujours dans ces cas-là, une commission a été créée pour entendre partisans et opposants. Elle doit rendre son rapport d'ici peu, mais son président a déjà relativisé dans la presse l'intérêt du projet. Comme c'est un casus belli avec les Verts et que l'heure n'est pas aux grandes dépenses, il semble bien que le projet ait du plomb dans l'aile - ce qui n'est pas l'idéal pour un aéroport. D'ailleurs, François Hollande a demandé à Jean-Marc Ayrault de s'éloigner un peu de ce dossier. Sans doute moins pour l'empêcher de décoller que pour lui éviter un crash...
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