A quoi ressemble le Medef version Pierre Gattaz ?
Si Pierre Gattaz multiplie les prises de position musclées, le nouveau patron du Medef sait qu'il ne peut entrer en opposition frontale avec le gouvernement.
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Cette fois, les choses sérieuses commencent. Elu au début de l'été à la tête du Medef, Pierre Gattaz entre dans le vif du sujet. Négociations avec le gouvernement sur la réforme des retraites, université d'été de l'organisation patronale du mercredi 28 au vendredi 30 août… La rentrée est chargée pour le nouveau patron des patrons. Francetv info décrypte la ligne de ce Medef renouvelé.
Une base remontée
C'est l'un des enseignements de ces trois jours d'université d'été à Jouy-en-Josas (Yvelines) : le "ras-le-bol fiscal" est un sentiment particulièrement présent chez les chefs d'entreprise. Devant les hausses d'impôts intervenues depuis l'arrivée de la gauche au pouvoir, qui touchent tant les ménages que les entreprises, les patrons haussent le ton.
"Les patrons ne se font pas assez entendre ! Il faut qu’ils revendiquent davantage. Les syndicats de salariés, eux, sont beaucoup plus agressifs", a lancé l'un d'eux, cité parLes Echos. Certains ont même avancé l'idée d'une grève de la TVA, ou d'une grève des embauches.
Les critiques contre la politique du gouvernement sont sévères. La majorité en place, qui compte peu d'entrepreneurs dans ses rangs, est accusée de pratiquer la "spoliation fiscale", et certains des sept ministres à avoir fait le déplacement passent quelques mauvais quarts d'heure. La ministre de l'Artisanat, Sylvia Pinel, qui mène la très décriée réforme du statut d'autoentrepreneur, a dû faire face à une salle plutôt hostile, comme le relate La Tribune. Pierre Moscovici, lui, a reçu un accueil plus chaleureux jeudi après-midi. Il faut dire que le ministre de l'Economie est venu avec quelques bonnes nouvellesdans sa besace.
Des dirigeants offensifs mais prudents
Relais de l'exaspération de la base, Pierre Gattaz a fait une rentrée pugnace, allant jusqu'à exiger la suppression de la taxe à 75% et l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF)."Face à un gouvernement qui envoie des signaux contradictoires, le Medef a fait le choix d'un président qui correspond bien à la période", observe Bernard Giroux, ancien directeur du service de presse du Medef et auteur de Medef, confidences d'un apparatchik (L'Archipel, 2013), interrogé par francetv info. Pierre Gattaz, PDG de Radiall, une entreprise de composants électroniques, prend en effet la tête de l'organisation à l'heure où la France cherche des solutions pour se réindustrialiser.
"Il a une tête de patron, il sait parler aux patrons, résume Bernard Giroux. Laurence Parisot avait un bilan respectable mais avait quelque fois l'habitude de parler de problèmes de société. On lui a fait le reproche d'oublier les fondamentaux de l'entreprise. Cela n'arrivera pas avec Pierre Gattaz."
S'il montre ses muscles sur les estrades, le patron des patrons sait qu'il n'a pas intérêt à entrer en conflit frontal avec le gouvernement. Après la réforme des retraites, d'autres dossiers chauds vont concerner le patronat : financement de l'assurance-maladie, formation professionnelle, etc. Le Medef espère bien, comme le lui a fait miroiter Jean-Marc Ayrault lundi, obtenir des baisses de charges qui amélioreraient la compétitivité des entreprises. Pierre Gattaz a beau avoir prôné, durant sa campagne, "un Medef de combat", il le dit lui-même : "La révolution n'est pas ma tasse de thé."
Un problème de représentativité
Le CNPF [ancêtre du Medef] avait tendance à représenter les grands patrons, plutôt que les petits. Mais ce n'est plus le cas. "Les entreprises du CAC 40, très internationalisées, sont bien moins tributaires des décisions économiques prises sur le plan national. Elles offrent souvent à leurs salariés des conditions supérieures à ce qu'exige le Code du travail. Désormais, les grands patrons se détournent du Medef", explique à francetv info François-Xavier Dudouet, sociologue spécialiste des élites économiques.
Cette désaffection pose un problème d'identité et de représentativité à l'organisation patronale, qui revendique sur son compte Twitter "750 000 adhérents, dont 90% sont des PME de moins de 50 salariés". Selon l'Insee, plus de 95% des entreprises françaises sont des microentreprises, qui comptent moins de 10 salariés. Les PME ne seraient que 130 000 et les établissements de taille intermédiaire moins de 5 000. "Or, aujourd'hui, ce n'est plus l'artisan ou le petit entrepreneur qui fait l'économie d'un pays, ce sont les grandes entreprises", estime François-Xavier Dudouet, pour qui le Medef est plus que jamais à la recherche de son identité.
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