30.septembre.2018
Barry Seal : American traffic, un bel exemple des dérives des interventions secrètes
Je vous recommande aujourd’hui ce film de 2017, qui est vraiment très intéressant.Il revient sur les opérations clandestines de la CIA dans les années 1980 en Amérique centrale, et aux trafics qu’ils ont permis.C’est une intéressante illustration de ce qui se passe souvent, quand on décide d’aider des groupuscules à des milliers de kilomètres – et aux retours de flammes souvent générés.Toute ressemblance avec la Syrie etc.
Source : Ciné Séries, Antoine Delassus, 15-09-2017
Entre portrait à charge de l’establishment reaganien, rise & fall à la Scorsese et mix entre Lord of War et Pain and Gain, Doug Liman signe avec Barry Seal une virée sous speed et furieusement jouissive dans l’une des histoires les plus délirantes et débridées de l’Oncle Sam.
Un pilote de ligne au sourire Colgate ravageur ayant convolé pour la DEA, la CIA, Pablo Escobar & qui a vécu le rêve américain ? Un peu plus et on serait tenté de croire que ce Barry Seal n’a jamais existé ; qu’il est de cette trempe de personnage déluré servant à rappeler à quel point l’imagerie du rêve américain infuse jusque dans son propre cinéma. Mais là ou le bât blesse, c’est que ce Barry Seal a vraiment existé. Un anti-héros d’un autre temps, qui chance et culot aidant, s’est vu devenir un des rouages les plus importants dans l’ascension de Pablo Escobar et la traque malheureuse que tenta la DEA et la CIA pour arrêter le trafiquant colombien. Et si sur le papier, tout indiquait que Barry Seal : American Traffic allait emprunter un chemin au moins égal si ce n’est similaire à Argo : celui d’un fait divers « bigger than life » impliquant le gouvernement traité avec suffisamment de recul pour en percevoir toute la gravité, il n’en est heureusement rien. La chance à Doug Liman & Tom Cruise, tous deux responsables de ce rail cinématographique délirant et débridé qui rappelle curieusement un Lord of War coupé à l’absurdité de Pain and Gain.
Un portrait à charge nappé de cool de l’administration reaganienne
Quiconque connait ainsi Doug Liman sait que le bougre, entre deux morceaux de peloches guindées grand public, se plait à dessouder subtilement ou non les instances gouvernementales américaines. Que ça soit son récent The Wall ou l’acclamé Fair Game, l’américain a ainsi toujours cru bon de mêler divertissement et réquisitoire dans un même film. Le voir donc s’approprier l’histoire de ce pilote de ligne n’avait à priori rien d’anormal, tant celle-ci au travers des exploits de son pilote révèle en filigrane les failles béantes d’un système reaganien la plupart du temps corrompu ; le reste du temps impuissant face à la menace de la drogue.Fatalement, voir donc au milieu de ce marasme bureaucratique, la success-story de ce monsieur tout le monde un brin entreprenant qui va duper le système et s’en mettre plein les poches, a quelque chose de grisant. De comique même. Et c’est sans doute parce qu’il doit prendre un malin plaisir à dessouder le gouvernement de manière détournée, que Liman y va franco quitte à transformer le tout en un sommet de cynisme et d’opportunisme.
Dès l’entame ça se sent d’ailleurs. Patine rétro assumée, logo des studios qui crame et se remet à la page des années 80 ; bref tout sent l’anti-conformisme à plein nez. Un peu comme si Liman réitérait ce qui avait fait le succès de son Edge of Tomorrow, un délire SF qui brillait non seulement par son concept mais surtout par son montage qui lui conférait toute sa force comique. Là, même rengaine, l’auteur se plaisant à user à fond du média montage pour appuyer encore plus loin les délires de son pilote devenu bien malgré lui millionnaire. Et ça marche. Du moins suffisamment pour souligner l’absurdité de la situation et poser sur le film, un sentiment d’irréalité, de fantasme, de cool. Si bien que la véhémence du message initial, à savoir pointer du doigt des instances US dépassées et qu’on se le dise franchement incompétentes s’en retrouve éclipsé au profit d’une leçon de cool vivifiante.
Dès l’entame ça se sent d’ailleurs. Patine rétro assumée, logo des studios qui crame et se remet à la page des années 80 ; bref tout sent l’anti-conformisme à plein nez. Un peu comme si Liman réitérait ce qui avait fait le succès de son Edge of Tomorrow, un délire SF qui brillait non seulement par son concept mais surtout par son montage qui lui conférait toute sa force comique. Là, même rengaine, l’auteur se plaisant à user à fond du média montage pour appuyer encore plus loin les délires de son pilote devenu bien malgré lui millionnaire. Et ça marche. Du moins suffisamment pour souligner l’absurdité de la situation et poser sur le film, un sentiment d’irréalité, de fantasme, de cool. Si bien que la véhémence du message initial, à savoir pointer du doigt des instances US dépassées et qu’on se le dise franchement incompétentes s’en retrouve éclipsé au profit d’une leçon de cool vivifiante.
Un opéra à la gloire du talent comique de Cruise
Et question cool, Liman peut compter certes sur son montage mais surtout sur Tom Cruise. L’acteur qui laisse le temps d’un film son costume d’action-man du cinéma US apparait ici transfiguré. Fini les abdos saillants de son Ethan Hunt (Mission Impossible) et bonjour la bedaine et l’insouciance qui va de pair avec l’américain moyen. Une surprise d’autant plus forte qu’elle marque son retour dans la composition dira-t-on normale.
Celle qui requiert plus que la simple belle gueule ou le charisme ravageur. Et c’est marrant car ça nous rappelle à quel point Cruise est bon quand il est en confiance. Puisque si il joue à merveille la carte du pilote déboussolé en proie au doute quand on lui propose de convoyer pour la CIA, on ne peut feindre le rire hilare quand le doute du personnage s’envole pour laisser place à l’assurance tue la mort, du genre qu’il a quand il doit faire décoller un avion d’une piste minuscule ou mieux encore, se poser en catastrophe dans une banlieue résidentielle, la DEA aux fesses. Mais au-delà de ça, c’est bien pour sa prédisposition à embrasser les embardées du film que Cruise se révèle dément. Quand le film se veut grave, il joue la poker face. Et quand il fonce à 200 à l’heure et souligne l’heureux destin de cet escroc, pas besoin de longtemps avant de voir Cruise décocher un sourire qui ferait pâlir une Miss France. Tout ça a pour résultante de voir un acteur qu’on croyait connaitre par cœur et jouer la carte de l’arnaqueur professionnel avec tellement d’aisance et de naturel que l’on en viendrait à vraiment réévaluer son potentiel comique.
A mi-chemin entre l’absurdité de Pain and Gain et le cynisme de Lord of War, Barry Seal : American Traffic permet à Tom Cruise de jouer la carte du self-made man déluré dans ce brulot délibérément comique envers l’establishment reaganien. Rafraichissant et furieusement fun !
Synopsis : L’histoire vraie de Barry Seal, un pilote arnaqueur recruté de manière inattendue par la CIA afin de mener à bien l’une des plus grosses opérations secrètes de l’histoire des Etats-Unis.
Source : Ciné Séries, Antoine Delassus, 15-09-2017
Nous vous proposons cet article afin d'élargir votre champ de réflexion. Cela ne signifie pas forcément que nous approuvions la vision développée ici. Dans tous les cas, notre responsabilité s'arrête aux propos que nous reportons ici. [Lire plus]
Hein ? // 30.09.2018 à 10h06
Ce film est abject justement à cause de sa coolitude et du message que le personnage de Tom Cruise fait passer à la fin :”quel pays formidable (les États-Unis) grâce auquel il est possible de vivre mon aventure !”. Il fait passer à la trappe le désastre de la guerre des Contras financée par le trafic de la cocaïne revendue dans les ghetto de L.A. dans les années 80.
Le seul intérêt du film est justement de voir comment Hollywood réécris en permanence l’histoire pour perpétuer le mythe de l’american way of life.
Le seul intérêt du film est justement de voir comment Hollywood réécris en permanence l’histoire pour perpétuer le mythe de l’american way of life.