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mardi 7 août 2018

Maduro accuse la Colombie d'attentat aux drones

7 août 2018

Maduro accuse la Colombie d'attentat aux drones

Pour le président vénézuélien, l'attaque, qui a fait sept blessés, a été fomentée par l'opposition et par Bogota

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Le chef de l'Etat vénézuélien, Nicolas Maduro, dit avoir été la cible, samedi 4  août en fin d'après-midi, d'un attentat aux drones explosifs, alors qu'il présidait à Caracas une cérémonie militaire. Il a immédiatement accusé son homologue colombien d'avoir voulu l'assassiner. " Tout indique que l'ultradroite vénézuélienne, alliée de l'ultradroite colombienne, est responsable de cet attentat et que Juan Manuel Santos est derrière ", a-t-il affirmé quelques heures à peine après l'incident. M.  Maduro n'a pas apporté de preuve pour étayer sa thèse mais, à le croire, l'enquête est déjà " très avancée ".
Un groupe pratiquement inconnu, Los Soldados de Franela (" les soldats en tee-shirt "), a revendiqué l'attentat, sans plus d'élément. L'opposition vénézuélienne, qui voudrait en découdre au plus vite avec le président, s'est encore une fois publiquement démarquée de toute option violente. " Notre peuple mérite une solution démocratique et constitutionnelle ", affirme ainsi le communiqué du Frente Amplio Venezuela Libre (FAVL), qui réunit plusieurs formations d'opposition.
De son côté, Bogota a réagi avec fermeté aux propos de Nicolas Maduro, qualifiés " d'absurdes et de sans fondements ". Ce n'est pas la première fois que le président vénézuélien soupçonne ou accuse les autorités colombiennes de comploter contre lui, avec l'appui de Washington. " C'est même devenu une habitude ", note le communiqué du ministère des relations extérieures. Un proche de Juan Manuel Santos précisait samedi soir : " Le président est accaparé par le baptême de sa petite-fille Céleste et ne s'occupe pas de renverser des gouvernements étrangers. "
Le chef de l'Etat colombien n'a pas condamné l'attentat. Il est sur le départ. Il appartiendra à son successeur de gérer les retombées de cette nouvelle crise. Ivan Duque, qui sera investi mardi 7  août, vient de la droite très antimaduriste. Durant sa campagne, il s'est engagé à traîner M.  Maduro devant la Cour pénale internationale. Le ton entre les deux gouvernements pourrait bien s'envenimer encore.
" Tragédie humanitaire "Les Colombiens ne sont pas les seuls à mettre en doute la version officielle. Sur les réseaux sociaux, les opposants vénézuéliens évoquent un accident ou un " auto-attentat ". Le FAVL s'étonne que " la première réaction du gouvernement soit d'attaquer l'opposition ", au lieu d'essayer d'éclaircir les faits. Le chef de l'Etat est soupçonné de vouloir faire diversion pour faire oublier la " tragédie humanitaire " et la crise économique et sociale sans précédent que traverse le pays. Dans le climat extrêmement tendu qui prévaut depuis plusieurs années, il est peu probable que l'opposition juge crédibles les résultats de l'enquête s'ils sont un jour publiés.
Les images du moment de l'attentat font l'objet d'une étude minutieuse. La première explosion a eu lieu alors que le président, entouré de son état-major, parlait à la tribune. La détonation a contraint Nicolas Maduro à s'interrompre. Une vidéo de l'agence chinoise Xinhua publiée ultérieurement montre que le président est alors évacué. La caméra officielle, elle, change de plan. On entend la confusion qui règne sur l'estrade. Les dernières images retransmises en direct montrent des centaines de militaires au garde-à-vous sur l'avenue qui, au son de la deuxième explosion, rompent le rang et s'enfuient en courant.
La scène est moquée sur les réseaux sociaux. " Elle en dit long sur l'armée dont dispose Nicolas Maduro ", résume sur Twitter l'analyste Nicmer Evans, un chaviste devenu très critique du gouvernement bolivarien. A Caracas, le ministre de la défense, le général Vladimir Padrino, a condamné l'attentat et réitéré dimanche son soutien inconditionnel au gouvernement de Nicolas Maduro.
Dans une première intervention, samedi soir, le ministre de la communication, Jorge Rodrigue, a évoqué " plusieurs appareils volants ". Il semble que deux drones soient entrés en action. Sept membres de la garde nationale ont été blessés, a rapporté le ministre, qui a vu dans l'attentat " un acte de désespoir de la droite vénézuélienne ". Six personnes ont été arrêtées, leur identité devrait être révélée lundi.
Le communiqué du groupe qui revendique l'attentat est parvenu à une journaliste d'opposition vénézuélienne établie à Miami, -Patricia Poleo. Repris sur le compte Twitter des Soldados de Franela, il est signé par " un groupe d'officiers, de sous-officiers et de soldats, en activité et de la réserve ", qui veulent " le retour de la Constitution et de la démocratie au Venezuela ". Le texte précise que les deux drones envoyés étaient chargés d'explosifs C4. Les auteurs du document se réjouissent de l'opération menée : " Nous avons démontré qu'ils sont vulnérables. Nous n'avons pas réussi aujourd'hui mais c'est une question de temps. "
Le président Nicolas Maduro a annoncé qu'il y aurait des représailles contre les auteurs de l'attentat. Mais le Venezuela en ruine ne peut évidemment envisager des sanctions contre son voisin colombien – fuyant la crise de leur pays, un million de Vénézuéliens y ont trouvé refuge. La frontière entre les deux est fermée au trafic automobile depuis des mois. Le commerce bilatéral s'est effondré. Les relations diplomatiques sont pratiquement inexistantes.
" C'est une situation potentiellement explosive à laquelle Ivan -Duque devra faire face,observe Ronal Rodriguez, chercheur à -Bogota. Rien ne permet d'espérer que la crise vénézuélienne se règle à court terme. " A Bogota, la crainte d'un dérapage militaire est désormais évoquée.
Marie Delcas
© Le Monde

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