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samedi 4 août 2018

Ce que prépare le gouvernement pour la rentrée

4 août 2018.

Ce que prépare le gouvernement pour la rentrée

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 Le gouvernement entend relancer, à la rentrée, plusieurs projets de réforme. " Nous ne ralentirons rien ", a prévenu Edouard Philippe
 Le chef de l'Etat devrait préciser la feuille de route pour les mois à venir, à l'occasion du séminaire gouvernemental qu'il présidera fin août
Pour l'exécutif, il s'agit de reprendre la main après un début d'été marqué par l'affaire Benalla et les fragilités mises au jour dans le dispositif macronien
 L'Elysée va devoir trancher au plus vite sur l'avenir de la révision constitutionnelle. La préparation du budget s'annonce aussi plus ardue que prévu
 Les plans pauvreté et hôpital sont par ailleurs très attendus. Et la réforme des retraites sera le grand chantier du début 2019
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4 août 2018.

Pour oublier l'été, l'exécutif mise sur la rentrée

Révision constitutionnelle, retraites, lois bioéthiques… Des dossiers chauds attendent le gouvernement

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Après les avoir reçus pour un dîner à l'Elysée, mercredi 1er  août, Emmanuel Macron devait revoir les membres du gouvernement, vendredi, pour le dernier conseil des ministres avant les vacances. L'occasion pour le chef de l'Etat de clore une année dense, au cours de laquelle 41loi ont été votées et des réformes lourdes engagées (SNCF, code du travail, sélection à l'université avec Parcoursup…). Mais aussi d'esquisser le programme de la rentrée, qui s'annonce chargé. " Le président devrait dresser les grandes étapes de l'an II, dans le prolongement de son discours au Congrès ", précise l'un de ses conseillers. Il leur donnerarendez-vous pour un séminaire qu'il présidera " dans la foulée du premier ou du deuxième -conseil des ministres de rentrée, le 22 ou le 29  août ", ajoute-t-il.
Après un début d'été marqué par l'affaire Benalla, un épisode qui a montré les fragilités du dispositif macronien et contraint l'exécutif à subir l'actualité, l'Elysée veut reprendre la main dès la fin de la trêve. Le séminaire gouvernemental sera l'occasion de remobiliser les troupes et de leur donner un cap pour les mois à venir. " A la rentrée, nous ne ralentirons pas, nous ne lâcherons rien. Nous irons jusqu'au bout de notre projet ", avait déjà réaffirmé le premier ministre, Edouard Philippe, mardi 31  juillet, alors qu'il répondait aux deux motions de censure déposées par la droite et la gauche à l'Assemblée.
A la rentrée, l'exécutif devra d'abord mettre de l'ordre dans un agenda perturbé par la crise. L'Elysée doit décider au plus vite de l'avenir de la révision consti-tutionnelle, à laquelle l'affaire Benalla a mis un coup d'arrêt brutal. S'il la fait revenir devant les députés au plus tôt, il prend le risque de voir les oppositions remonter au créneau. Dans ce cas, il lui faudra repousser la loi Pacte pour faire de la place dans le calendrier parlementaire. Un dilemme, car cette loi " est attendue par les entreprises et les Français, sur le volet -actionnariat salarié, intéressement et participation ", commente Marc Fesneau, président du groupe -MoDem à l'Assemblée.
Si, à l'inverse, l'exécutif privilégie le texte de Bruno Le Maire, déjà plusieurs fois repoussé, il s'expose à des critiques sur son incapacité à mener à bien la révision constitutionnelle, un acte politique important puisqu'il touche au texte fondateur de la Ve  République. Pour le moment, les macronistes minimisent cet éventuel report. Les projets de loi organique et ordinaire permettent de tenir les promesses principales de M. Macron (baisse du nombre de parlementaires, non-cumul des mandats dans le temps, introduction d'une dose de proportionnelle). " C'est une question d'agencement, relativise Matignon. A la fin, on fera les deux. "
Mais l'essentiel pour l'exécutif sera surtout de réenclencher la machine à réformer pour redorer l'image du président de la République. " Il nous faut garder le cap. Ce qui a perdu Nicolas Sarkozy ou François Hollande, c'est l'impression qu'ils ont donnée de naviguer à vue ", renchérit Aurore Bergé, -députée La République en marche (LRM) des Yvelines. " Notre marque de fabrique, c'est l'action. Il faut maintenir la tension pour repartir de l'avant ", poursuit un conseiller.
Attendu sur le socialLa semaine qui a suivi les révélations sur l'ex-chargé de mission d'Emmanuel Macron a montré un exécutif affaibli, flottant, un président très seul pour se défendre. Mais cette crise est en fait intervenue après quelques couacs moins visibles notamment, début juillet, lorsque la ministre de la santé, Agnès Buzyn, avait annoncé le report du plan pauvreté pour cause de Coupe du monde de football…
L'affaire Benalla pourrait ainsi atténuer ou même effacer les effets bénéfiques qu'Emmanuel Macron espérait tirer de son discours au Congrès, le 9  juillet, ou de la victoire des Bleus, le 15  juillet. Pour l'heure, les sondages soufflent le chaud et le froid. Dans l'enquête YouGov, publiée jeudi 2  août par Le HuffPost et CNews, sa popularité plonge de cinq points. Avec 27  % de jugements positifs sur son action, le chef de l'Etat est à son plus bas niveau. Comme le faisaient déjà apparaître d'autres enquêtes d'opinion, c'est auprès des sym-pathi-sants du parti Les Républicains que la chute est la plus marquée. " Après l'affaire Benalla, de plus en plus de Français doutent de l'honnêteté du président, de sa sincérité. Son “je fais ce que je dis et je dis ce que je fais” ne convainc plus autant ", explique Jérôme Fourquet, directeur du département Opinion de l'IFOP. Dans le baromètre Elabe de juillet pour Les Echos et Radio Classique, la cote de confiance d'Emmanuel Macron gagne en revanche deux points, à 36  %.
A la rentrée, il faudra occuper le terrain. Et vite. Le volet social, sur lequel l'exécutif est très attendu, ouvrira la saison. Le plan pauvreté, au cœur du projet macronien de lutte contre le " déterminisme social ", et le plan hôpital, avec la fin de la tarification à l'acte, trouveront leur traduction législative dans les projets de loi de finances et de financement de la Sécurité sociale pour 2019, qui, eux, seront présentés fin septembre.
Avec, pour le budget, une question cruciale sur les dépenses publiques. L'an dernier, le gouvernement s'en était plutôt remis à la conjoncture pour assurer la baisse des déficits. Aujourd'hui, " le ralentissement conjoncturel nous oblige à accélérer sur le plan structurel ", juge Marc Fesneau. Alors que -l'activité donne des signes de faiblesse, que le chômage a du mal à reculer et que l'inflation repart à la hausse, l'équation budgétaire s'annonce compliquée.
" Chaque euro dépensé doit désormais être le fruit d'une décision politique ", explique Amélie de Montchalin, députée LRM de l'Essonne. " Ce que décidera Macron sera déterminant pour une partie de la droite que LRM espère rallier au moment des élections européennes, juge Jérôme Fourquet. Cette droite juppéiste, centriste dont l'ADN est l'équilibre des comptes publics mais aussi – et, là, l'affaire Benalla a pu la refroidir – l'équilibre des pouvoirs et le respect des corps intermédiaires. "
Autre réforme sensible, sur lequel le gouvernement devra avancer d'ici à la fin de l'année : les retraites, sur lesquelles il compte présenter un projet de loi au premier trimestre 2019. Contrairement à la réforme de la SNCF, le gouvernement privilégie le dialogue avec les partenaires sociaux, par l'intermédiaire de Jean-Paul Delevoye, le haut-commissaire chargé de ce dossier.
Au-delà des thématiques économiques et sociales, le gouvernement est attendu sur le sociétal. Et si la réforme des retraites est un sujet à hauts risques, car il peut remobiliser l'opposition de gauche, le projet de loi bioéthique est lui aussi politiquement inflammable. En campagne, M. Macron avait promis l'ouverture à toutes les femmes de la procréation médi-calement assistée, aujourd'hui réservée aux couples hétérosexuels. Un engagement que lui rappelle régulièrement une partie de sa majorité. Soucieux de ne pas " humilier une partie du pays ", comme il avait jugé l'action de son prédécesseur lors de sa campagne au sujet du mariage pour tous, le président a beaucoup consulté et a multiplié les gestes envers les catholiques. Par ailleurs, la réforme de l'islam de France, promise depuis des mois, est désormais prévue pour la fin 2018.
La rentrée sera aussi le moment, comme l'a dit le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, de tirer " toutes les leçons " des " dysfonctionnements " qu'a révélés l'affaire Benalla. De quoi occuper l'été d'Alexis Kohler, le secrétaire général de l'Elysée, chargé de réorganiser les services du palais, dont la sécurité et la communication. Mais aussi, plus largement, de repenser le rôle de la haute administration, pour qu'elle assiste mieux le gouvernement. Un autre vaste chantier…
Virginie Malingre
© Le Monde

4 août 2018

Unédic : un automne studieux pour les partenaires sociaux

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L'automneprochain ne sera pas la saison du répit, pour la ministre du travail, Muriel Pénicaud, et les membres de son cabinet. Après avoir été absorbée, durant une année, par deux réformes majeures (la réécriture du code du travail, en  2017, puis la loi " avenir professionnel ", adoptée définitivement mercredi 1er  août), l'ex-DRH de Danone va s'atteler, à partir de la rentrée, à un autre dossier sensible : la négociation d'une -nouvelle convention Unédic sur les règles de l'assurance-chômage.
Ce chantier résulte d'un souhait exprimé, le 9  juillet, par Emmanuel Macron devant le Congrès à Versailles. Un souhait totalement inattendu pour deux raisons. D'abord, les partenaires sociaux s'étaient entendus, en  2017, sur les conditions d'indemnisation des demandeurs d'emploi dans une convention qui devait s'appliquer jusqu'en octobre  2020. En outre, le projet de loi " avenir professionnel " prévoyait, initialement, que les branches devaient discuter de mécanismes pour combattre la précarité – l'exécutif se réservant la possibilité, en cas d'échec des tractations, de créer un bonus-malus ayant pour effet d'augmenter les cotisations des entreprises où les CDD prolifèrent.
Ce plan de marche a donc été entièrement revu, durant l'examen au Sénat du projet de loi " avenir professionnel ". Le gouvernement a, en effet, déposé un amendement au texte, le 10  juillet, le lendemain du discours de M. Macron. Il indique que, " après concertation " avec les partenaires sociaux, un " document de cadrage " est transmis à ces derniers afin qu'ils négocient une nouvelle convention Unédic. Le but est de faire évoluer les règles de manière à " lutter contre la précarité et - à - inciter les demandeurs d'emploi au retour à l'emploi ". Le bonus-malus n'est pas cité explicitement, mais l'exécutif attend du patronat et des syndicats qu'ils trouvent des solutions à la hauteur du problème. Sinon, prévient-on dans l'entourage de Mme  Pénicaud, " on fera le bonus-malus ". Doivent aussi être revisitées les dispositions permettant de cumuler un salaire et une indemnisation : elles sont critiquées au motif qu'elles dissuaderaient des demandeurs d'emploi d'accepter une offre de CDI.
Autre thème de discussion pour les organisations d'employeurs et de salariés : l'éventuelle " création d'une allocation-chômage de longue durée, attribuée sous condition de ressources "" Nous avons décidé de changer notre fusil d'épaule pendant l'élaboration de la loi ", reconnaît-on dans l'entourage de la ministre du travail. L'objectif étant de parvenir à une transformation " plus profonde " du système.
Avant d'engager les discussions, les partenaires sociaux devront poser un diagnostic commun, début septembre, qui devrait servir de base au " document de cadrage "préparé par l'exécutif. Celui-ci a vocation à orienter fortement les échanges entre le patronat et les syndicats. Ils auront quatre mois pour conclure. Le gouvernement table, semble-t-il, sur janvier, voire février 2019. Le processus devrait aussi conduire à aborder un autre sujet : le régime d'indemnisation des intermittents du spectacle.
Sarah Belouezzane et Bertrand Bissuel
© Le Monde


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Le gouvernement étudie les effets de l'allocation unique

Un rapport révèle les perdants et les gagnants d'une fusion des aides sociales

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Si le gouvernement décide de fusionner les aides financières attribuées aux familles modestes, il va être confronté à des choix cornéliens, qui pourraient lui coûter, politiquement parlant. C'est l'impression que procure la lecture d'un rapport, resté confidentiel jusqu'à présent, auquel Le  Monde a eu accès.
Réalisé à la demande du premier ministre par France Stratégie, un organisme de réflexion indépendant rattaché à Matignon, cette étude très fouillée montre que le regroupement des " prestations de solidarité " dans une allocation sociale unique (ASU) pourrait faire plus de " perdants " que de " gagnants ". Ces constats, anxiogènes pour la frange de la population située en bas de l'échelle des revenus, sont dressés alors même que l'exécutif doit présenter, à la rentrée, sa stratégie de lutte contre la pauvreté.
L'idée de réformer les dispositifs de soutien financier aux ménages modestes tient au fait que le système est devenu indéchiffrable. Du coup, certaines personnes n'en bénéficient pas alors qu'elles y ont droit. Parallèlement, la complexité autorise tous les fantasmes sur la générosité de notre Etat-providence.
Trois scénarios élaborésC'est pourquoi Edouard Philippe a confié, en juillet  2017, à France Stratégie, une " mission de réflexion " qui a débouché sur un premier " rapport de préfiguration ", remis en février. Le chef du gouvernement a souhaité que l'analyse soit affinée, d'où un deuxième rapport, livré en juin. Son auteur se livre à des simulations en partant des hypothèses suivantes. L'ASU remplace, en les fusionnant, plusieurs prestations : le revenu de solidarité active (RSA), l'allocation de solidarité spécifique (ASS), la prime d'activité, les aides au logement (AL), l'allocation adulte handicapé (AHH), l'allocation de solidarité pour les personnes âgées (ASPA, ex-minimum vieillesse) et l'allocation supplémentaire d'invalidité (ASI).
Ces changements, effectués à enveloppe constante, ne doivent pénaliser ni les handicapés (et leurs proches) ni les personnes âgées. Sur cette base, un " barème "avait été proposé dans le rapport terminé en février. Quatre mois après, deux scénarios ont été mis au point – l'un qualifié d'" optimisé ", l'autre élaboré " sous la contrainte " de ne pas différencier les aides accordées aux locataires du parc privé et du monde HLM. Les résultats sont éloquents.
Dans le " barème optimisé ", le  passage à l'ASU entraîne une -diminution de revenus pour 3,55 millions de ménages, soit parce qu'ils touchent moins de prestations qu'avant, soit parce qu'ils n'en ont plus (1,5 million d'entre eux se retrouvant dans cette situation). A l'inverse, 3,3  millions de foyers enregistrent une hausse de leurs ressources. La réforme " fait presque deux fois plus de perdants que de gagnants parmi les titulaires de l'ASS " – c'est-à-dire des chômeurs en fin de droit.
S'agissant des personnes percevant les AL, les perdants sont un peu plus nombreux que les gagnants, mais le surcroît de ressources pour les seconds est, en moyenne, plus élevé que les pertes subies par les premiers. A l'inverse, le barème engendre " 3,3  fois plus de gagnants que de perdants " chez les bénéficiaires de l'ASPA.
Si l'on élargit la focale, le " barème optimisé " n'a quasiment pas d'impact sur la proportion de personnes situées sous le seuil de pauvreté (–  0,1 point, seulement). En revanche, celles qui sont très pauvres voient leur part reculer plus nettement. Les incidences sont également variables, suivant la " configuration familiale " : le taux de pauvreté régresse pour les familles monoparentales, " ainsi que pour les couples avec un ou deux enfants " ; mais il s'accroît nettement pour les personnes seules (+ 1,6  point).
Avec le barème " sous la contrainte ", l'amélioration est plus franche puisque l'instauration de l'ASU se traduit par un reflux du taux de pauvreté de 0,4  point (– 1,3 point si l'on ne considère que les enfants). Enfin, avec la version " optimisée " de l'ASU, le fait d'occuper un emploi s'avère plus avantageux que dans le système actuel – où il peut arriver que le travail paie moins que les allocations, selon France  Stratégie. Cette donnée est importante, car elle se trouve au cœur d'une des préoccupations du gouvernement : transformer les aides sociales pour qu'elles incitent, plus encore, à la reprise d'une activité.
Toute la question est de savoir comment l'exécutif compte se réapproprier le rapport de France Stratégie. Si l'idée de créer l'ASU est à l'étude, elle ne devrait toutefois pas voir le jour, à court terme. " Le sujet n'est pas tranché, indique-t-on à Matignon. Et il ne fera pas l'objet de dispositions dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2019. "
En revanche, il est possible qu'une autre mesure, mitoyenne et défendue par M.  Macron durant la campagne présidentielle, soit annoncée à la rentrée, dans le cadre de la stratégie de lutte contre la pauvreté : le versement social unique (VSU). Ce mécanisme, souvent décrit comme une première étape vers l'ASU, vise à attribuer, le même jour, les prestations auxquelles les personnes sont éligibles. Le but est de simplifier les démarches, afin de réduire le phénomène du " non-recours ", tout en prenant en compte les ressources les plus récentes. " On travaille sur le VSU, ça demeure un objectif, confirme-t-on à Matignon. Mais il ne se fera pas du jour au lendemain. " Le 12  juin, le délégué interministériel à la lutte -contre la pauvreté, Olivier Noblecourt, avait confié à l'AFP que le VSU serait mis en place " en  2019 ou en  2020 ".
S. B. et B. Bi.
© Le Monde

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