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vendredi 3 août 2018

Après la fusillade à Beaune, le temps des questions


3 août 2018

Après la fusillade à Beaune, le temps des questions

Le parquet, qui a ouvert une enquête préliminaire, n'exclut aucune piste

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Acte raciste ou règlements de comptes entre bandes rivales ? Dans la nuit de dimanche  29 à lundi 30  juillet, à trois heures d'intervalle – à 1 h 15 puis à 4 h 30 –, deux voitures, avec à leur bord un conducteur et un passager, ont foncé sur un groupe d'une quinzaine de jeunes gens regroupés près du city-park d'un quartier des faubourgs sud de Beaune (Côte-d'Or). Quatre jours après, la petite ville, célèbre pour ses vins et ses hospices, s'interroge. Les occupants du second véhicule ont tiré avec un fusil de chasse, blessant directement ou indirectement sept personnes. Un jeune homme de 24 ans grièvement atteint au thorax est toujours hospitalisé au CHU de Dijon. Opéré le soir même, " son pronostic vital n'est pas engagé ", a précisé Thierry Bas, procureur adjoint au parquet de Dijon, qui a ouvert une enquête préliminaire.
Quels sont les liens entre ces deux agressions ? Pourquoi les véhicules – une Clio rouge immatriculée dans le département voisin de Saône-et-Loire et une Mercedes noire dont l'immatriculation n'a pas été identifiée – sont-ils intervenus coup sur coup ? C'est ce que cherche à établir -l'enquête confiée à la police de Beaune et à la police judiciaire de Dijon. Jeudi 2  août, les enquêteurs devaient entendre à nouveau tous les témoins afin de clarifier des faits " très nébuleux ", selon le parquet. Ils poursuivent le repérage du trajet des véhicules avant et après les événements sur les images des caméras de vidéosurveillance de la ville.
La probabilité d'une attaque -raciste, étudiée après le témoignage des victimes de la première agression qui ont rapporté des insultes envers la communauté maghrébine, n'est pas écartée. Mais, comme l'a indiqué M. Bas au Monde, à ce stade, les enquêteurs ne privilégient ni ne négligent aucune autre piste.
L'événement secoue d'autant plus la population locale qu'une agression par balles, déjà depuis un véhicule, avait eu lieu le 25  juin, dans le quartier des Blanches-Fleurs, de l'autre côté de la ville. Un jeune homme de 22 ans avait été sérieusement blessé à la jambe. Dans cette affaire, l'enquête privilégie la piste d'un règlement de comptes à -l'initiative d'une bande de Chalon-sur-Saône, à une trentaine de kilomètres.
Difficultés socialesToutefois, " Beaune est une ville très calme ", a voulu rassurer mardi, Alain Suguenot, le maire (Les Républicains) dans les colonnes du Bien public. Les images de carte postale de la capitale du vin de bourgogne, qui vient de clore la dernière édition du Festival international d'opéra baroque, relèguent toutefois au second plan les difficultés sociales dans cette commune de 21 000  habitants. Le budget municipal bénéficie de la dotation de solidarité urbaine et de- -cohésion sociale (DSU), une dotation de l'Etat calculée sur le revenu moyen de ses habitants. Les quartiers périphériques concentrent un important taux de chômage : dans le quartier Saint-Jacques, théâtre des incidents de la nuit de dimanche à lundi, 27  % des habitants sont sans emploi, selon les chiffres 2013 de l'Insee. En  2014, sous le gouvernement Hollande, la ville a été intégrée dans la liste des communes bénéficiant pour la première fois de la politique de la ville.
" Ce fut un classement purement arithmétique, selon des critères de revenus, et nous n'avons pas attendu des crédits d'Etat, assez -légers, pour créer des centres -sociaux de proximité, dont le premier fut d'ailleurs implanté dans le quartier Saint-Jacques ", se défend Pierre Bolze, adjoint à la politique de la ville. Conseillère municipale d'opposition, Danièle Jondot-Paymal dénonce toutefois, dans Le Bien public," des effectifs de police municipale divisés de moitié en deux mandatures ".
Construit dans les années 1970, au milieu d'un vaste parc arboré, le quartier Saint-Jacques ne porte pourtant pas les stigmates de certaines zones périphériques. Ses deux tours ne dépassent pas six étages, et le patrimoine montre un apparent bon état. " Nous n'avons aucune difficulté à louer les logements. D'ailleurs, il n'y a pas de vacance, signe que le quartier n'est pas rejeté ", souligne -Catherine Dersel-Alazard, directrice adjointe du bailleur social Orvitis, principal propriétaire avec 609 logements. La police locale enregistre d'ailleurs peu d'actes de délinquance.
Christiane Perruchot
© Le Monde

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