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mercredi 13 juin 2018

La flambée des prix de l'énergie grignote le pouvoir d'achat


13 juin 2018

La flambée des prix de l'énergie grignote le pouvoir d'achat

La hausse des carburants et du gaz naturel va en partie effacer les hausses de salaires liées à la baisse des cotisations maladie et chômage

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D'abord les carburants automobiles, et aujourd'hui le gaz naturel : les prix de l'énergie commencent à peser lourdement sur le budget des ménages, après trois années où le recul des cours pétroliers avait fait baisser la pression inflationniste dans ce secteur et -contribué au regain du pouvoir d'achat. Une tendance fâcheuse – mais difficilement contrôlable – pour le gouvernement, puisqu'elle va en partie effacer les hausses de salaires, notamment celles qui sont liées à la baisse des cotisations maladie et chômage de janvier et octobre  2018.
Le gazSur 11,5  millions de -consommateurs de gaz (particuliers, commerçants et artisans), 5  millions sont encore aux tarifs réglementés proposés par Engie, héritier de ces tarifs du monopole Gaz de France. Pour ceux qui se chauffent au gaz, la facture (TTC) pourrait augmenter de 6,5  % au 1er  juillet, a indiqué, lundi 11  juin, la Commission de régulation de l'énergie (CRE). Elle justifie ce chiffre par la hausse des coûts d'approvisionnement (qui correspond au prix d'achat du méthane sur le marché), du coût des infrastructures (transport, distribution et stockage) et des frais de commercialisation auprès des clients.
La CRE indique néanmoins que, depuis janvier  2015, les prix du gaz ont reculé de 5,1  %. Et que le gouvernement dispose d'une " marge de manœuvre " pour limiter la hausse en réduisant l'impact de la commercialisation (2,6  %), puisque le nombre de clients aux tarifs régulés recule. Ils sont même appelés à disparaître. Le Conseil d'Etat a annulé, le 19  juillet 2017, un décret de 2013 encadrant les tarifs réglementés du gaz qu'il jugeait en contradiction avec le droit européen de la concurrence.
Ces tarifs vont peu à peu s'effacer d'ici à 2022, mais le marché fait déjà son œuvre : 56  % des usagers ont souscrit à des offres de marché plus attractives d'Engie, d'EDF, de Total ou d'Eni, voire de plus petits fournisseurs, note la CRE. Et cette tendance se poursuit (comme pour l'électricité), selon les chiffres de l'observatoire de la CRE publiés lundi : au premier trimestre, ces offres se sont développées à un rythme soutenu (269 800 clients supplémentaires fin mars, contre 202 000 à fin décembre  2017).
La décision de valider la hausse de 6,5  % revient à Nicolas Hulot, le ministre de la transition écologique. Mais le sujet est politiquement sensible et l'arbitrage final reviendra au président de la République, qui semble plutôt enclin à laisser jouer le marché. Sous le quinquennat de François Hollande, le gouvernement veillait à contenir les hausses – quitte à se faire retoquer un ou deux ans plus tard par le Conseil d'Etat et à ce que les clients subissent des rattrapages d'Engie (et d'EDF pour l'électricité). Le tarif proposé aux consommateurs étant ajusté chaque mois en fonction du coût d'approvisionnement, la hausse de 6,5  % peut évoluer à la baisse si le prix du gaz acheté en Russie, en Norvège ou en Algérie recule.
Les carburants automobiles Les Français sont aussi exposés, depuis le début de l'année, à une forte hausse du prix des carburants à la pompe. Les prix ont certes reflué pour la deuxième semaine consécutive, selon les données hebdomadaires publiées lundi par le ministère de la transition écologique et solidaire, mais ils ont retrouvé leur niveau de 2014, avant l'effondrement des cours du brut. Le litre de gazole, carburant le plus vendu en France avec 80  % du volume, s'affiche en moyenne à 1,47 euro, le SP95 à 1,55 euro et le SP98 à 1,62 euro.
La flambée du brut de la mer du Nord (Brent) – qui représente environ 30  % du prix final et qui a -atteint 80  dollars le baril à la mi-mai – n'est pas seule en cause, note l'association de défense des consommateurs CLCV. Elle constatait, mi-mai, une hausse de près de 10 centimes par litre d'essence et de 15 centimes par litre de gazole sur un an. Le niveau des stocks de produits raffinés, la parité entre l'euro et le dollar (monnaie dans laquelle se font les transactions pétrolières) jouent leur rôle. Tout comme les marges de distribution dans les stations-service. Après avoir constaté " une hausse tendancielle depuis le -début de la décennie ", la CLCV demande aux compagnies pétrolières et aux grandes surfaces de se montrer " plus  modérées ".
Mais son message s'adresse aussi aux pouvoirs publics, qu'elle appelle à " interrompre leur politique d'augmentation des taxes sur le carburant ". Celles-ci représentent plus de 60  % d'un litre à la pompe. En début d'année, la hausse de la contribution " climat énergie " et la poursuite de l'alignement de la fiscalité du gazole sur celle de l'essence – un des objectifs du gouvernement pour sortir du diesel – ont mécaniquement entraîné une hausse de 3,9 centimes d'euro par litre d'essence et de 7,6 centimes par litre de gazole.
Après le creux des années 2015-2017, le monde est entré dans une période d'énergie plus chère, notamment en raison de l'augmentation de la consommation, qui tire les prix de l'or noir vers le haut. Un sujet socialement sensible : l'énergie est, après le logement, le second poste de dépenses contraintes des ménages français.
Jean-Michel Bezat
© Le Monde

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