Ce sera le sujet phare de la rentrée. Après la pause estivale, les discussions sur le budget de l'an prochain vont reprendre à bon rythme. Dès mercredi 22 août, à l'issue du conseil des ministres, Emmanuel Macron présidera une réunion d'arbitrages budgétaires, à l'Elysée. Et à la fin du mois, l'architecture du projet de loi de finances pour 2019 aura, pour l'essentiel, été dessinée. Selon plusieurs sources, elle devrait être marquée par la suppression de postes de fonctionnaires et une nouvelle baisse drastique du nombre de contrats aidés. D'autres surprises ne sont pas à exclure, notamment dans le champ social. Le Parlement examinera le projet de loi de finances en octobre.
C'est un budget difficile pour le gouvernement. Les réformes économiques et sociales lancées depuis le début du quinquennat n'ont pas encore produit leurs effets. Celle de l'Etat a tout juste débuté. Or, dans le même temps, la croissance économique donne des signes de faiblesse. Pour 2019, le gouvernement tablait sur une progression du PIB de 1,9 %. Il devient de plus en plus évident que cet objectif se révèle trop optimiste.
Effort délicat
" Les indicateurs économiques sont très bons, tempère Amélie de Montchalin, -députée La République en marche de l'Essonne
. Le taux d'emploi est, par exemple, au plus haut depuis les années 1980. Je ne suis donc pas inquiète. Nous sommes loin d'être à la veille d'une récession. " Reste que moins de croissance, c'est moins de recettes fiscales. L'effort à fournir pour redresser les comptes publics, comme la France l'a promis à l'Union européenne, n'en sera que plus difficile à tenir.
Et comme si cela ne suffisait pas, le budget 2019 devra digérer aussi un gros morceau : la transformation du crédit d'impôt pour la compétivité et l'emploi (CICE) en baisse permanente des charges pour les entreprises. Le CICE, créé en 2012 par François Hollande, vise à réduire le coût du travail dans les entreprises françaises. Cela représente une dépense de 20 milliards d'euros en 2019. Sa transformation, promise par Emmanuel Macron pendant la campagne présidentielle, coûtera cher à l'Etat : il devra en effet payer le CICE au titre de 2018 et, dans le même temps, assumer la baisse des charges au titre de 2019.
" C'est une dépense qui ne se reproduira pas, rappelle le président du Conseil d'analyse économique
, l'économiste Philippe Martin,
mais elle représente tout de même 0,8 point de PIB. "
Cette dépense supplémentaire conduira le gouvernement à dégager de nouvelles économies pour tenir son objectif de limiter son déficit à 2,9 % du PIB en 2019. Un effort d'autant plus délicat que l'exécutif souhaite poursuivre la revalo-risation d'un certain nombre d'aides, comme l'allocation aux adultes handicapés ou la prime d'activité.
Mais sauf à prendre des libertés avec ses engagements européens, le gouvernement n'a plus d'autre choix que de contenir fermement la dépense publique. Il s'est engagé à ce qu'elle n'augmente que de 0,4 % en 2019. Les montants prévus par les lettres-plafonds envoyées en juillet aux différents ministères
" sont, à 500 millions d'euros près sur un total de 300 milliards d'euros, en phase avec nos objectifs européens, se réjouit Amélie de Montchalin
. C'est très positif. "
Selon plusieurs sources, le gouver-nement envisagerait de supprimer autour de 10 000 postes de fonctionnaires en 2019 et davantage encore en 2020,
" au fur et à mesure que les réformes se mettront en place ".
" Je ne vois pas -comment on récupère la moins-value liée à de moins bonnes recettes fiscales sans toucher aux emplois ", relève un sénateur socialiste. Le ministère de l'action et des comptes publics dément ce chiffre de 10 000 suppressions.
Reste que le président de la République s'est engagé à couper dans les effectifs de la fonction publique d'Etat à hauteur de 50 000 postes sur la durée du quinquennat. L'an dernier, le gouvernement avait indiqué que l'objectif n'était pas de
" faire du rabot " mais de revoir les missions de l'Etat avant d'en tirer les conséquences. En 2018, seuls 1 600 postes ont été supprimés. Cette année, le premier ministre Edouard Philippe pourrait donc tailler dans le vif.
Sous-utilisation des contrats aidésLe nombre de contrats aidés devrait également continuer à baisser. Après les 320 000 contrats signés en 2017, seuls 200 000 avaient été budgétés pour 2018. Ils pourraient n'être qu'à peine plus de 100 000 l'an prochain.
" On change totalement la politique de l'emploi en France, plaide encore Amélie de Montchalin
. -Notre objectif est de faire monter les Français en compétences en les formant afin qu'ils occupent des emplois pérennes, -plutôt que des emplois tampons. " Par ailleurs, ajoute le député LRM Laurent Saint-Martin (Val-de-Marne),
" beaucoup de contrats aidés ne sont pas utilisés par les collectivités locales ".
De fait, seuls 70 000 parcours emploi compétences – le nouveau nom des emplois aidés – avaient été signés au 31 juillet, selon le ministère du travail.
" Cela m'étonnerait qu'on arrive à 150 000 cette année ", admet André Laigniel, premier vice-président de l'Association des maires de France. Ces contrats coûtent en effet plus cher qu'avant à leurs utili-sateurs (les collectivités locales ou les associations, par exemple). L'Etat n'assume plus que 50 à 60 % du coût de ces contrats contre 80 à 90 % auparavant. Par ailleurs, les préfets incitent les collectivités à ne pas y recourir.
D'autres décisions sont attendues. La réforme des APL se poursuivra, et permettra d'économiser
" presque un milliard d'euros en 2019 ", confie une source proche du dossier. La mise en place du versement social unique est également attendue l'an prochain. Le gouvernement, enfin, doit arbitrer la question des indemnités journalières en cas d'arrêt-maladie, dont il voudrait qu'une partie soit dorénavant payée par les entreprises.
Benoît Floc'h
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