Transition énergétique: Ségolène Royal profite de l'été pour imposer son style, malgré les critiques
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Ségolène Royal s'exprimant devant la presse lors du passage du Costa Concordia devant la Corse | AFP
POLITIQUE - Difficile de passer à côté de Ségolène Royal en ce mois de juillet. Qu'il s'agisse de surveiller le remorquage du Costa Concordia, de refuser l'importation de déchets toxiques, d'arrêter le tracé d'une autoroute ou des prix de l'électricité, la ministre de l'Ecologie se démultiplie. Alors que ses collègues s'apprêtent à partir en vacances à la fin de la semaine, l'ancienne candidate socialiste à l'élection présidentielle profite de la trêve estivale pour imposer son style et son agenda politique.
Nommée au gouvernement il y a à peine quatre mois, c'est encore elle qui occupe le devant de la scène lors du dernier conseil des ministres de la saison. Elle y présente ce mercredi matin le très attendu projet de loi sur la transition énergétique, un texte censé donné le la de la politique environnementale du gouvernement jusqu'à la fin du quinquennat.
Là encore, Ségolène Royal devrait pleinement assumer le service après-vente médiatique. Après avoir livré les grandes lignes du texte en conférence de presse le 18 juin dernier, la ministre a détaillé mardi son projet au 20h de TF1 avant de remettre le couvert ce mercredi 30 juillet lors du compte-rendu du conseil des ministres animé par Stéphane Le Foll.
Le projet de loi doit encore convaincre
Cette omniprésence médiatique savamment orchestrée a un mérite: celui de propulser les enjeux environnementaux sur le devant de la scène. "Grâce à elle, on n'a jamais autant parlé d'écologie", reconnait le patron des sénateurs Verts Jean-Vincent Placé.
Alors que EELV a claqué la porte de l'exécutif, Ségolène Royal s'est engagée à trouver10 milliards d'euros pour financer la transition énergétique dans les trois prochaines années et promouvoir une "écologie positive".
A l'image de la ministre, les objectifs défendus sont ambitieux: allègement de la facture énergétique, relance des énergies renouvelables, réduction des émissions de gaz à effet de serre, optimisation de la consommation. De quoi ravir les écologistes qui piaffaient d'impatience après plusieurs reports du projet de loi.
Pour autant, le texte ne fait pas l'unanimité. "Il manque des éléments sur les transports, l'agriculture, l'urbanisme, on attend beaucoup des amendements", a souligné le juriste Arnaud Gossement, au nom de la Fabrique écologique, une fondation transpartisane réunissant élus, ONG et entreprises.
Les oublis sur l'économie circulaire, qui se concentre sur le retraitement des déchets, ont laissé un goût amer aux associations environnementales. Et le flou autour de l'avenir du parc vieillissant des centrales nucléaires entretient la suspicion des écolos à l'égard de la détermination du gouvernement.
Le texte n'aborde pas ainsi la question de la centrale de Fessenheim, qui doit fermer d'ici 2017. En guise de compromis, la loi prévoit de plafonner la puissance du parc nucléaire à son niveau actuel (63,2 mégawatts), ce qui impliquera de fait des fermetures de réacteurs pour compenser l'entrée en service de l'EPR de Flamanville en 2016.
Coups d'éclat et coups de gueule
Cela suffira-t-il à rallier des écologistes en rupture de ban avec la majorité socialiste? Difficile à dire. La ministre entretient des relations complexes avec EELV, désarçonnés par ses coups d'éclat médiatiques qui frôlent souvent l'incident diplomatique.
Dès son arrivée au ministère de l'Ecologie, l'ex-patronne du Poitou-Charentes a mis les pieds dans le plat en décrétant la remise à plat de l'écotaxe, honnie des bonnets rouges mais défendue par les Verts. "Faux départ pour Ségolène Royal", s'était alors indigné le Réseau Action Climat.
Nouveau psychodrame dès le mois de mai quand Ségolène Royal a refusé d'enterrer l'exploitation des gaz de schiste si "de nouvelles technologies non dangereuses" étaient mises au point.
Tout récemment, la ministre s'est mise à dos toutes les associations de défense de l'ours en refusant sa réintroduction dans les Pyrénées. En visite le 19 juillet dans les Hautes-Pyrénées, Ségolène Royal avait estimé que cela représentait "un problème pour le pastoralisme". Résultat des courses: une pétition réunissant 25.000 signatures l'adjurant de changer d'avis.
Crispation italienne et vendéenne
Les associations écologistes ne sont pas les seules à émettre des réserves sur les méthodes de l'ancienne compagne de François Hollande. Le ministre italien de l'Environnement n'a pas du tout apprécié l'opération de communication improvisée par son homologue française sur le dossier du Costa Concordia. Alertée par des élus corses sur les risques environnementaux que laissaient planer le remorquage du paquebot de croisière, Ségolène Royal a rué dans les brancards et s'est invitée à bord d'un navire de dépollution censé surveiller les opérations italiennes. Une stratégie de communication payante mais au mépris des convenances diplomatiques.
Autre dossier, autre fronde. Plusieurs élus (de gauche comme de droite) venus de Vendée, Charente-Maritime et des Pays-de-la-Loire se sont indignés de la décision "inacceptable" de la ministre de renoncer à un projet d'autoroute dans l'ouest en raison d'impératifs environnementaux. "Elle se prend pour la réincarnation d'Aliénor D'Aquitaine", a tonné la droite vendéenne en dénonçant un "caprice". Réponse cinglante de l'intéressée: "les attaques misogynes et brutales ne font pas avancer les dossiers".
Ségolène Royal n'a d'ailleurs pas tout perdu dans ce bras de fer qui lui a permis de marquer des points auprès des écologistes, vent debout contre le projet d'autoroute. C'est toujours ça de pris en vue des débats parlementaires sur la transition énergétique qui débuteront le 1er octobre prochain.
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