Etats-Unis : sept questions sur le "shutdown" et la paralysie de l'Etat fédéral
Faute d'accord entre la Chambre des représentants et le Sénat, le budget 2014 n'a pas pu être entériné. Plus de 800 000 fonctionnaires fédéraux sont mis en congés forcés, sans solde. Le point sur les conséquences de ce blocage politique.
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Les Etats-Unis s'éveillent la tête dans le coton. Le pays n'est pas totalement paralysé, mais risque de tourner au ralenti. Mardi 1er octobre, l'administration fédérale américaine a été contrainte de cesser les activités des agences gouvernementales, à cause d'un blocage au Congrès, incapable de voter le budget fédéral pour 2014.
La Maison Blanche a elle-même confirmé l'entrée en vigueur du shutdown, c'est-à-dire l'arrêt du fonctionnement de nombreuses administrations et services fédéraux."Malheureusement, nous n'avons pas d'indication claire que le Congrès agira à temps pour que le président signe une résolution budgétaire" avant mardi soir, a annoncé la directrice du bureau du budget de la Maison Blanche. "Les agences doivent donc exécuter leurs plans pour une cessation ordonnée de leurs activités en l'absence de budget."
1Pourquoi le Congrès a-t-il rejeté le budget ?
Malgré la mise en garde de Barack Obama, la Chambre des représentants et le Sénat ne sont pas parvenus à s'accorder sur un texte commun entérinant un budget provisoire.
Les députés, à majorité républicains, demandaient le report à 2015, au lieu de 2014, du principal volet de la loi de réforme du système de santé, "l'Obamacare". Ils souhaitaient également la suppression d'une taxe sur les appareils médicaux, créée pour financer cette loi. Une provocation, selon les sénateurs démocrates, qui ont donc refusé de toucher à l'une des réformes majeures du premier mandat de Barack Obama. Ils ont donc rejeté en bloc le plan de sortie de crise proposé par les républicains.
2Quelles conséquences pour les fonctionnaires ?
Plus de 800 000 fonctionnaires fédéraux, sur les quelque 2 millions qu'emploie Washington, ont reçu un e-mail de leur administration dans la nuit. Ils sont mis en congés forcés, sans solde, à partir de mardi matin et pour une durée indéterminée. Les effectifs des administrations se trouvent réduits au minimum vital. Certaines agences tournent au ralenti, avec à peine 5% de leurs effectifs, comme le montre une infographie du New York Times (en anglais).
Les militaires et les services essentiels à la sécurité nationale sont épargnés, car les deux chambres du Congrès ont chacune approuvé un texte qui garantit que les militaires seront payés à temps, quoiqu'il arrive.
Quant aux 800 000 fonctionnaires concernés, ils vont devoir patienter. Si certains sont autorisés à se présenter mardi matin à leur bureau, c'est éventuellement pour éteindre leur ordinateur resté en veille et récupérer des affaires personnelles. Une agence qui braverait l'interdiction pourrait être accusée de crime (felony), en raison de l'Anti-deficiency Act : il s'agirait d'une dépense illégale de l'argent des contribuables, détailleUSA Today (en anglais).
3Quelles conséquences pour les Américains ?
Si environ 90 000 agents du fisc cessent le travail pour une durée indéterminée, les"citoyens américains continuent à payer leurs impôts", a déploré Barack Obama. Au ministère de la Justice, 18 000 des 115 000 fonctionnaires doivent rester chez eux, ce qui va retarder des milliers de procès civils. Certains hôpitaux vont très probablement devoir refuser de prendre de nouveaux patients. Toutefois, Barack Obama assure que les services de santé destinés aux personnes âgées seront maintenus pendant toute la durée du shutdown.
C'est le tourisme qui va le plus souffrir du blocage, en raison de la fermeture des musées fédéraux et des nombreux parcs nationaux. Les campeurs qui voulaient profiter de l'été indien dans l'un de ces gigantesques espaces protégés ont deux jours pour déguerpir.
Les Américains reçoivent toujours leur courrier, dont la distribution est assurée par l'US Postal Service, qui fonctionne de manière indépendante. En revanche, à Washington DC, la capitale fédérale des Etats-Unis, le ramassage des ordures et le nettoyage des rues sont suspendus. Et comme le souligne le quotidien Metronews, le shutdown a d'autres conséquences encore plus inattendues. Parmi elles, la fermeture des cimetières américains sur le sol français, l'extinction des webcams du zoo national de Washington, ou encore l'interruption du compte Twitter de la surveillance des astéroïdes…
4Barack Obama est-il personnellement touché ?
Oui, car il est lui aussi entouré de fonctionnaires. Les trois quarts des 1701 fonctionnaires affectés à la Maison Blanche sont privés de travail, explique Le Figaro. "Barack Obama disposera de moins de personnel pour lui faire la cuisine, passer l'aspirateur dans le Bureau ovale", ajoute le quotidien. Les agents du Secret Service, en revanche, qui assurent la sécurité du président des Etats-Unis, continuent à travailler.
5Les Etats-Unis ont-ils déjà connu une telle situation ?
Oui, c'est la 17e fois depuis 1977 qu'un désaccord au Congrès paralyse l'Etat fédéral. Le dernier shutdown remonte à 1995-96, sous le mandat de Bill Clinton. Ce fut aussi le plus long. Du 14 au 19 novembre 1995 et du 16 décembre au 6 janvier 1996, 280 000 fonctionnaires ont été mis au chômage et 475 000 n'ont pas été payés. Le Congrès avait ensuite remboursé les jours de chômage technique. Le coût de ce dernier shutdown a été estimé à 1,4 milliard de dollars (environ 2 milliards aujourd'hui), explique Le Monde (article payant), qui précise que l'incident a permis à Bill Clinton d'être facilement réélu, quelques mois plus tard, à la présidence des Etats-Unis.
6Combien de temps cela peut-il durer ?
La plupart des shutdown durent moins de trois jours. Dans le cas présent, la question est plus délicate, car c'est un désaccord idéologique qui paralyse l'Etat et non un problème technique.
7Combien cela va-t-il coûter à Washington ?
Tout dépend de la durée de cet arrêt de l'administration. Des économistes de la banque Goldman Sachs estiment qu'une semaine coûterait huit milliards de dollars, rapporte leFinancial Times (article payant, en anglais). Une perte qui pénaliserait la croissance au quatrième trimestre 2013 de 0,9 point, la ramenant à 1,6%, ajoute le quotidien économique.
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