Isère Grève du 2 octobre : à Bourgoin-Jallieu, Vienne et Roussillon, la colère reste forte, mais ne suffit plus à mobiliser

Raymond Nadal, 97 ans, figure du Parti communiste local, est assis dans la voiture de la CGT. Sur le siège avant, il attend, sourire aux lèvres, le départ du cortège, indifférent aux haut-parleurs qui crachent du Manu Chao juste au-dessus de sa tête, sur le toit de la voiture. Ce jeudi 2 octobre, c’est jour de manifestation à Bourgoin-Jallieu. « Ma première manif, je l’ai faite à 6 ans, en 1934, avec mes parents, dans notre ville de Pézenas, dans l’Hérault, sourit Raymond Nadal. C’était pour le Front populaire, contre la montée du fascisme. C’était rude. Et je n’ai jamais cessé de me mobiliser depuis. Aujourd’hui, je suis toujours là. Cette fois, c’est pour ma retraite et pour les salaires des travailleurs. »
« L’avenir nous inquiète »
Monique Couturier, elle, n’a pas autant de manifestations au compteur. Mais elle s’est mobilisée aujourd’hui. « Je suis assistante sociale à l’ESMPI [Établissement de santé mentale Porte de l’Isère, NDLR], explique-t-elle. Nous n’arrivons pas à recruter de soignants car nos métiers sont trop mal payés et nos conditions de travail de plus en plus difficiles. Les besoins sont très importants dans la santé mentale et les propositions de budgets qu’on a eues ces derniers mois sont inacceptables. »
Léanne Battault, Klara Exiga et Laure Abdelkrim, elles, sont en terminale au lycée Vinci de Villefontaine. « L’avenir nous inquiète, assurent-elles. La crise écologique et sociale, la montée de l’extrême droite, on ne veut pas de ça. On étudie justement en histoire la montée du fascisme au XXe siècle. Et quand on compare nos cours sur les années 1930 avec la progression actuelle de l’extrême droite, ça fait vraiment peur. »
Raymond Nadal, Monique Couturier, Léanne Battault ne sont pas les seuls en colère. Beaucoup d’autres fureurs remontent de cette manifestation : une conseillère du Planning familial de Bourgoin-Jallieu alerte sur le manque de moyens pour accompagner en Nord-Isère les victimes de violences conjugales ou intrafamiliales, d’autres brandissent des drapeaux aux couleurs de la Palestine, appelant « à la fin d’un génocide insupportable ».
Ce bouillonnement de colères, pour autant, peine à marquer fort les esprits. On ne compte que 500 manifestants en ce jeudi matin, quand ils étaient près de 1 000 le 18 septembre dernier. Le mouvement Bloquons tout, né au cœur de l’été, semble totalement esseulé sur le secteur de Bourgoin-Jallieu. Et en fin de cortège, rien n’a été dit d’une éventuelle prochaine manifestation. La colère est bien là, c’est une évidence. Mais elle ne mobilise pas.

Salariés de la plate-forme chimique, retraités, agents de la fonction publique… Les profils des manifestants roussillonnais étaient variés. Photo Le DL /Edith Rivoire
Vincent a manifesté à Roussillon : « Vous travaillez ou vous crevez »
La mobilisation est certes plus faible que le 18 septembre dans l’agglo roussillonnaise (250 personnes à Roussillon selon la CGT, 120 selon la gendarmerie) mais la colère et la déception sont toujours fortes. Comme chez Angèle et Lucien, jeunes travailleurs sociaux, « pas d’accord avec ce que propose le gouvernement ».
Tout comme Carole, qui travaille en crèche, « déçue » que « le gouvernement n’entende pas qu’il faut changer de politique ».
Vincent et Maria, agent dans un Ehpad pour le premier et retraitée pour sa femme, en ont marre « de ce gouvernement qui est pour les riches et qui enfonce les pauvres ». Maria touche 720 € de pension de retraite, son mari résume : « Vous travaillez ou vous crevez. »
À Vienne, 200 manifestants ont défilé
À Vienne, environ 200 personnes ont manifesté ce jeudi 2 octobre. Ils étaient un peu plus de 500 le 18 septembre dernier, dans un cortège qui s’est élancé de la gare routière.
Sylvie et Thierry, gilets blancs de la CGT action sociale sur le dos, étaient à nouveau présents dans la rue pour défendre les services publics et l’abrogation de la réforme des retraites. « On voit l’offre de soins diminuer avec des fermetures de lits depuis des années », déplorent-ils. La situation politique les inquiète. « Avec ce Premier ministre rien ne va changer. Il faut redonner la voie au peuple. »
« Il y a trop d’inégalités dans la société, on veut plus de justice sociale et fiscale »
Un peu plus loin, Thierry et Françoise, retraités, sont venus pour la première fois. « Il y a trop d’inégalités dans la société, on veut plus de justice sociale et fiscale, insistent-ils. L’écart entre les plus riches et le reste des gens est énorme ». Ils s’inquiètent aussi pour les générations futures. « Je suis bénévole aux Restos du cœur, ajoute Thierry, ancien instituteur. On a trop de monde, on n’arrive pas à faire face. »
Le cortège a remonté les quais jusqu’au carrefour de la place Saint-Louis où les organisations syndicales ont pris la parole bloquant une partie de la circulation pendant quelques minutes. Les annonces du Premier ministre Sébastien Lecornu, le matin même , n’ont pas convaincu les syndicats. « Il a fait de petites annonces mais ce n’est pas suffisant. On nous prend pour des cons », tempête Gilbert Conte, un des représentants de la CFDT.
D’autres manifestants se sont exprimés à propos de la Palestine et de la fin des conflits à Gaza avant de remonter la rue Marchande et le cours Romestang pour se disperser à la gare routière.




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