Vendredi 31 octobre – #83 : Etoiles
BONJOUR ! Pour le magazine de l’Opinion, O2, j’ai eu la chance de déjeuner avec Anne-Sophie Pic et David Sinapian, son mari et associé. Vous découvrirez cet entretien le 5 décembre. Mais après deux heures de discussion autour d’un déjeuner mémorable (L’huître Tarbouriech, Berlingots, Lotte de petits bateaux et Millefeuille blanc original), la tentation était forte de lever un coin de la nappe pour les lecteurs de GenXO. Voilà, j’ai succombé : puisque j'écris souvent ici sur la performance, abordons donc ce thème par le biais... des étoiles !
Interlude I : entrée ! L’huître Tarbouriech, du nom d’ostréiculteurs passionnés installés depuis plus de soixante ans au bord de l'étang de Thau, en Méditerranée. Reconnue pour son équilibre parfait entre iodé et sucré ainsi que ses notes de noisette et de champignon, l’huître est servie avec une crème glacée au shiso et combawa, pesto à l’oseille et pistache.
Compétition. Car la haute gastronomie est une compétition de haut niveau. Anne-Sophie Pic est la cheffe la plus étoilée au monde. Elle me rappelle qu'à la suite du décès de son père, Maison Pic a perdu sa troisième étoile. C'était en 1990. Mais le trauma demeure. « Il a fallu douze ans pour la récupérer ! », précise David Sinapian. Douze ans pour transformer le restaurant, et pour que la petite-fille d’André, inventeur du gratin de queue d'écrevisses et de la poularde en vessie, trouve et impose son style. Pari gagné !
Interlude II : berlingots ! Anne-Sophie Pic n’aime pas l’idée de plat signature, parce qu’elle change sa carte tout le temps. Il n’empêche. Symbolisant la finesse et l’équilibre des saveurs, ses berlingots sont réclamés par ses fans. Ils se composent d’une pâte fine parfumée au thé matcha, enveloppant une farce onctueuse au Brie de Meaux (ce jour-là), accompagnés d’oignons doux des Cévennes et d’un consommé lié camomille et carvi.
Récompense. Une étoile disparaît, et le chiffre d’affaires s’affaisse comme un soufflet. Une étoile arrive et les réservations affluent. Anne-Sophie Pic se souvient que son père, André, « tremblait chaque année au moment de la sortie du guide Michelin alors qu’il était au firmament... » Et elle ? Elle dit : « La compétition, il faut que se soit épanouissant ». Elle dit aussi : « Une étoile, c’est une récompense pour un travail. Il faut être cohérent, sincère. » Elle dit encore : « Une étoile, ça emmène toute une équipe. Les équipes doivent être motivées pour aller chercher une étoile. Il faut savoir les diriger. »
Interlude III : Plat ! La lotte de petits bâteaux est un médaillon de lotte, poêlé et laqué, mariné à la feuille de bergamote, servi avec un millefeuille de courge et de poutargue et un beurre blanc à la mimolette et au safran.
Pression. Tripadvisor vient d'élire Le Restaurant Pic* à Valence meilleur restaurant au monde dans le classement « Best of the Best restaurants », catégorie cuisine raffinée. Une consécration inattendue. « C’est d’abord une grande joie, puis beaucoup de pression pour toutes les équipes », souffle Anne-Sophie Pic. En gestionnaire aguerri, David Sinapian raconte : « On l’a découvert le matin, comme tout le monde. Le classement est fait par un algorithme. C’est une première pour un établissement français. Mon job a été de le faire savoir. Nous sommes complets pour 2025 ! »
Interlude IV : Dessert ! Le millefeuille blanc original contient de la vanille de Madagascar, du jasmin, et du poivre de Voatsiperifery, un poivre sauvage venu aussi de la grande île.
Perfection. Paul Bocuse parlait du « poids de la perfection ». Jérôme Banctel assure que « la technique est la clé de voûte ». Alain Ducasse reconnaît un « stress permanent ». Sébastien Bras, avant de rendre ses étoiles pour se libérer de la pression, évoquait « un rouleau compresseur ». David Sinapian ne cache pas que son épouse éprouve aussi une sorte de « stress de la page blanche ». Anne-Sophie Pic précise : « Ce qui compte, ce n’est pas vraiment le classement. La question, c’est : comment durer, c’est-à-dire comment se renouveler ». En entreprise, à plus de 55 ans, cette réflexion existentielle peut se partager comme une poire conférence à la sauce au chocolat Alpaco...
AH, UNE DERNIERE CHOSE ! L’accord national interprofessionnel sur l’emploi des seniors vient d'être transposé dans le Code du travail. Pour les entreprises de plus de 300 salariés, c’est une nouvelle négociation entre direction et délégués syndicaux, avec obligation de proposer un plan pour les salariés expérimentés. Les RH vont devoir être plus vigilantes sur les plus de 45 ans. A suivre.
GénXO. GénXO, c’est un X comme eXpérience et un O comme Opportunité, pour les actifs suractifs de plus de 55 ans, sauveurs ignorés du système social français. Partagez X’O, suivez-nous sur LinkedIn !
Rémi Godeau, rédacteur en chef de l’Opinion
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire