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jeudi 9 août 2018

Loi Asile et Immigration : le FN et En Marche main dans la main à l’Assemblée nationale


Loi Asile et Immigration : le FN et En Marche main dans la main à l’Assemblée nationale






 Par Gildas Le Dem | 20 avril 2018













Dans la nuit de jeudi à vendredi, le Front national et la République En Marche ont voté ensemble pour l’article 5 de la loi Asile et Immigrationqui prévoit de réduire à 90 jours le délai dont dispose un étranger pour déposer une demande d’asile devant l’OFPRA - contre 120 jours auparavant. Analyse en profondeur d’une convergence loin d’être anodine.


Il y a maintenant un an, à l’issue du premier tour des élections présidentielles, les électeurs français étaient amenés à choisir entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen. On s’en souvient : au soir de ce premier tour, Jean-Luc Mélenchon appela à faire barrage à Marine Le Pen mais se refusa, pour autant, à donner une consigne de vote et par conséquent à se prononcer en faveur d’Emmanuel Macron.
Sans doute le discours de Jean-Luc Mélenchon et des représentants de la France Insoumise ne fut pas, ce soir là, toujours heureux. Précisément, il avait parfois le goût de l’amertume là où il aurait pu, et sans doute du, être l’occasion de célébrer un score historique ; de faire valoir une reconquête historique de l’électorat populaire et de la jeunesse, là où le FN pouvait croire s’être durablement enraciné ; enfin, d’en appeler à d’autres victoires.
Alexis Corbière l’a d’ailleurs reconnu depuis.

 Reste que le mot d’ordre de Jean-Luc Mélenchon et de la France Insoumise (« pas une voix pour le Front National ») allait, durant les quinze jours qui ont séparé le premier tour du second, focaliser et rallier toutes les attaques. Et notamment celles, répétées, d’Emmanuel Macron, au point que l’on était amené à se demander si ce dernier faisait, dans cet entre-deux tours, campagne contre Marine Le Pen ou contre Jean-Luc Mélenchon.
On s’interrogeait alors : savait-il, cet homme qui n’était encore que candidat, qu’il y avait encore un second tour ? Et qu’il devait, par conséquent, travailler à rassembler plutôt qu’à diviser — puisqu’enfin c’est, selon la logique de l’élection, la responsabilité politique qui incombe au candidat arrivé en tête au premier tour ? Emmanuel Macron n’offrit pourtant ni gages sur sa réforme du droit du travail ni — en dépit de l’hapax d’un soutien à la politique migratoire d’Angela Merkel — de véritables garanties sur la politique migratoire. 


Présidentielles 2017 : la farce d’un entre-deux-tours anti-raciste

Restaient deux choix possibles. S’abstenir pour ne pas ratifier une politique qui, depuis des décennies, avait, notamment au sein des classes populaires, favorisé sinon produit l’ascension du Front National. Ou, pour ceux qui hésitaient encore à voter Emmanuel Macron, constater, en raison des déclarations irresponsables de ce dernier, qu’il allait falloir être responsable et rassembleur pour deux — et donc voter Macron contre lui-même, et bien malgré soi.
On sait, depuis, que seule une infime fraction de l’électorat de la France Insoumise a fait un choix contraire : seuls 7 % des électeurs de Jean-Luc Mélenchon ont apportés leurs suffrages à la candidate du Front national et, tant sur les questions de l’immigration, de l’autorité, que sur celles du travail, ces électorats divergeaient spectaculairement. 

Pourtant, durant les quinze jours qui séparèrent le 23 avril du 7 mai 2017, on vit fleurir, sur les réseaux sociaux comme dans les grands médias, des déclarations anti-racistes péremptoires.
Des anti-racistes du dimanche soir, qu’on n’avait jamais vu, sous le mandat de François Hollande ou de Nicolas Sarkozy, participer à une manifestation contre les violences ou les vexations policières dont est quotidiennement victime la jeunesse racisée de ce pays, se joindre à une action contre les expulsions des réfugiés, ou simplement protester contre la politique migratoire, injuriaient les électeurs de la France Insoumise et ses représentants, quand ils ne le soupçonnaient pas d’antisémitisme. France Insoumise/Front National, même combat !


Quelques semaines plus tard, toutefois, les incidents se multipliaient déjà, alors que Gérard Collomb était en poste au ministère de l’Intérieur, et que la gauche socialiste, ralliée à la République En Marche, retrouvait ses vieux démons. Dès le 15 juin, 300 organisations condamnaient le nouveau gouvernement, et appelaient à un changement radical de sa politique migratoire. Moins d’un mois après le deuxième tour de l’élection présidentielle qui demandait à tous de faire barrage aux fascistes de tous bords, le festival afroféministe européen Nyansapo Festrisquait d’être annulé par la maire de Paris, Anne Hidalgo. Enfin,Emmanuel Macron plaisantait allègrement, à Mayotte, sur les « kwassas kwassas », et s’inquiétait, au mépris de la mort de migrants, de ce qu’on puisse y « amener du Comorien ».

En Marche et le Front National main dans la main à l’Assemblée nationale

Que n’aurait-ton dit, pourtant, si Nicolas Sarkozy s’était abandonné à ce genre de détestable petite blague, digne de Le Pen-père ? On eût dit, bien sûr, qu’il chassait sur les terres du Front National. Mais non, la gauche morale qui, quelques semaines plus tôt, faisait profession d’anti-racisme, faisait silence sur la politique et les discours d’un président qui ne devait néanmoins son élection, au second tour, qu’à toutes celles et ceux qui avaient décidé, en responsabilité politique, de ne pas voter, en dépit de leur dégoût pour tout ce qu’incarnait Emmanuel Macron, en faveur de Marine Le Pen.


La République En Marche vient pourtant, cette nuit, avec l’ensemble des députés du Front National, de voter, à l’Assemblée Nationale, le cinquième article du « projet de loi pour une immigration maîtrisée et un droit d’asile effectif », proposé, au nom du gouvernement, par Gérard Collomb. Ce dernier « rassemble les dispositions relatives à la procédure d’examen des demandes d’asile », qui « participent de l’objectif de maîtrise des délais d’instruction et de dissuasion des demandes pouvant apparaître comme étrangères à un besoin de protection ». Il réduit notamment « de cent-vingt à quatre-vingt-dix jours le délai courant à compter de l’entrée sur le territoire » au-delà duquel le dépôt d’une demande d’asile peut entraîner, à la demande de l’autorité administrative, l’examen de celle-ci « selon une procédure accélérée ».
Autrement dit, il s’agit rien moins que de réduire, une fois de plus, les droits, pourtant sacrés depuis la Révolution Française, des réfugiés. Et de contourner le devoir d’hospitalité — quand celui-ci n’est pas tout simplement, si l’on ose dire, constitué en délit d’hospitalité et solidarité, comme Emmanuel Macron l’a « assumé », c’est son mot, dimanche soir devant les caméras de BFMTV et de Médiapart.


Le philosophe Jacques Derrida, en 1996, déclarait, alors que le vote de dispositions analogues venait d’avoir lieu sous une autre majorité : « en ce monument sacré de la représentation nationale que devrait être un Parlement, une majorité de représentants, des députés en l’occurrence, viennent de donner (hier, avant-hier) le spectacle à la fois consternant et inquiétant d’une démagogie xénophobe, répressive, électoraliste, s’inventant des boucs émissaires pour s’exonérer d’une politique catastrophique et d’une impuissance flagrante, pressée de voler des voix imaginaires à Le Pen ». Il parlait de « tournant », de retour, en vérité, à des dispositions qui préparaient, comme en 1938, « une aggravation du dispositif législatif dans une atmosphère de veille de guerre ».

Cacher une politique d’extrême droite derrière des déclarations humanistes



Si l’on doit, aujourd’hui, constater une aggravation, c’est que le gouvernement, sous la présidence d’Emmanuel Macron, ne multiplie pas seulement les exactions et les dispositions répressives à l’égard des réfugiés. Il ne cherche pas même à récupérer les voix du Front National. Celles-ci lui sont désormais acquises et volent au secours de sa politique. Et désormais, les députés d’extrême-droite votent de concert avec la majorité à l’Assemblée Nationale.
Dans ces conditions, comment croire encore aux déclarations d’humanisme, de bienveillance d’Emmanuel Macron et de ses soutiens ? Comment ne pas voir que cette posture, toute morale, est parfaitement homogène, dans les faits, à la politique du Front National ? On s’en doutait déjà. Mais désormais, nous n’avons donc que faire des intimidations et des leçons en anti-racisme moral qui, durant l’entre-deux-tours, ont déferlé sur les militants politiques de l’anti-racisme. On se demande, d’ailleurs, où sont passées toutes ces voix de "gauche", "progressistes", "humanistes", qui parlaient si haut et si fort.

 D’autant, on le sait depuis, que les politiques répressives favorisent, en France et en Europe, un business des expulsions. Comme elles tendent à encourager, de fait, la corruption des Etats européens par les pires des organisations mafieuses (en l’espèce la Ndrangheta, la mafia calabraise, qui, en Italie, organise avec la complicité des autorités le passage des migrants : contrairement à ce qu’affirmait Emmanuel Macron dans le discours de Ouagoudougou, des européens tirent donc bien profit de ce commerce sordide).
La politique migratoire d’Emmanuel Macron n’est donc pas seulement indigne ; elle n’attente pas seulement à la dignité politique d’hommes et de femmes ; elle est, du point de vue de l’état de droit, de son intégrité et de son indépendance vis-à-vis des forces de l’argent, que celles-ci soient licites ou illicites, irresponsable et inefficace. Et l’on est donc tenté de pasticher la lapidaire formule de Marx Horkheimer : au sujet de l’antiracisme, que ceux qui ne veulent pas parler de capitalisme se taisent.

Le 1er août, la loi Asile et immigration a été définitivement adoptée par 125 voix pour et 25 contre.

http://www.regards.fr/politique/article/loi-asile-et-immigration-le-fn-et-en-marche-main-dans-la-main-a-l-assemblee


Rappelez -vous, entre les 2 tours de la Présidentielle, les appels à faire barrage au FN qu'ils disaient...
Des anti-racistes du dimanche soir, qu’on n’avait jamais vu, sous le mandat de François Hollande ou de Nicolas Sarkozy, participer à une manifestation contre les violences ou les vexations policières dont est quotidiennement victime la jeunesse racisée de ce pays, se joindre à une action contre les expulsions des réfugiés, ou simplement protester contre la politique migratoire, injuriaient les électeurs de la France Insoumise et ses représentants, quand ils ne le soupçonnaient pas d’antisémitisme. France Insoumise/Front National, même combat !
Et en Aout 2018, c'est LREM qui vote une loi FN !!!

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