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jeudi 9 août 2018

La CDU rouvre le débat sur le service militaire obligatoire en Allemagne


8 août 2018

La CDU rouvre le débat sur le service militaire obligatoire en Allemagne

Membre de la coalition, le SPD est opposé au retour de la conscription, supprimée en 2011

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Après l'avoir suspendu en  2011, l'Allemagne pourrait-elle réintroduire le service militaire ? La -nouvelle secrétaire générale de l'Union chrétienne-démocrate (CDU), Annegret Kramp-Karrenbauer, souhaite en tout cas que le débat ait lieu. " La question du service militaire  ou du service civique  doit revenir au cœur de nos discussions ", a-t-elle déclaré, le 23  juillet, dans une vidéo postée sur le site de la CDU. Selon la Frankfurter Allgemeine Zeitung du vendredi 3  août, elle souhaite que le sujet figure à l'ordre du jour du prochain congrès de la CDU, cet automne, avant que la position officielle ne soit précisée dans le nouveau programme du parti, en  2020, en amont des élections législatives de 2021.
Après son élection au secré-tariat général de la CDU, le 26  février, l'ex-ministre-présidente de la Sarre est allée à la rencontre des militants à travers l'Alle-magne afin de prendre le pouls du parti, en plein doute existentiel après son résultat décevant aux législatives du mois de -septembre  2017 (33  % des voix, le plus mauvais score des conservateurs depuis 1949).
Au cours de cette tournée marquée par une quarantaine d'étapes, elle a constaté que de nombreux adhérents de la CDU s'étaient sentis frustrés de ne pas avoir eu leur mot à dire sur plusieurs décisions majeures prises par le gouvernement depuis l'accession d'Angela Merkel à la- -chancellerie, en  2005. Parmi les plus souvent citées, la loi sur le mariage pour tous, en  2017, l'accueil des réfugiés, en  2015, ou la suspension du service militaire obligatoire, en  2011, conduite par le ministre de la défense de l'époque, le conservateur bavarois Karl-Theodor zu Guttenberg (CSU).
En promettant de rouvrir le -débat sur le service militaire, Mme Kramp-Karrenbauer entend montrer qu'elle n'est pas que la fidèle " dauphine " de Mme Merkel, comme cela a souvent été dit, mais qu'elle souhaite bel et bien imprimer sa marque propre sur un parti dont elle est aujourd'hui numéro deux, mais dont elle pourrait briguer la tête le jour où la chancelière annoncera son départ de la présidence de la CDU, qu'elle occupe depuis 2000.
55  % des Allemands favorablesElle entend également donner des gages à l'aile droite du parti, qui reproche à Mme Merkel d'avoir trahi les valeurs conservatrices en menant une politique trop proche de celle des sociaux-démocrates ou des écologistes. Enfin, elle envoie un signal aux électeurs du parti d'extrême droite, Alternative pour l'Allemagne (AfD), dont beaucoup sont des déçus de la CDU et dont le programme prévoit, entre autres, la réintroduction du service militaire.
Quelle position la CDU finira-t-elle par adopter ? Depuis la publication de la vidéo de Mme Kramp-Karrenbauer, plusieurs responsables du parti se sont exprimés dans des sens opposés. Certains prônent le retour du service militaire obligatoire, comme le député Oswin Veith, également président de l'Association des réservistes de la Bundeswehr, pour qui " un engagement de douze mois pour les garçons et les filles de plus de 18 ans " peut aider l'armée allemande à recruter de nouveaux soldats, dans un contexte de crise des vocations.
D'autres sont défavorables à une telle mesure, jugée trop coûteuse, à l'instar du porte-parole du groupe sur les questions de défense au sein de la CDU-CSU au Bundestag, Henning Otte, pour qui la Bundeswehr a avant tout besoin de " jeunes gens motivés qui passent du temps auprès des troupes et qui se forgent à des techniques complexes ".D'autres, enfin, comme Paul Ziemiak, président de la Junge Union (jeunes conservateurs), sont favorables à un " service civique  d'un an ", qu'il soit de nature militaire ou civile, afin de " renforcer la cohésion nationale ".
A l'exception de l'AfD, tous les partis représentés au Bundestag – Die Linke (gauche radicale), le Parti social-démocrate (SPD), les Verts et les libéraux-démocrates (FDP) –, sont opposés à la réintroduction du service militaire obligatoire. Lundi 6  août, le gouvernement, par la voix d'une de ses porte-parole, a fait savoir que le sujet n'était " absolument pas à l'ordre du jour ". Dans la mesure où il ne figure pas dans le " contrat de coalition " scellé, en février, entre la CDU-CSU et le SPD, il paraît en effet peu envisageable que le gouvernement s'empare de la question d'ici à la fin de la législature.
A en croire les sondages, pourtant, de plus en plus d'Allemands regrettent la décision prise en  2011. Selon une enquête de l'institut Civey pour le groupe de presse Funke, publiée dimanche, 55  % des personnes interrogées seraient aujourd'hui pour le retour du service militaire. Elles n'étaient que 36  % il y a deux ans, selon une étude réalisée en juin  2016 par l'institut YouGov pour l'agence de presse DPA. Au vu d'une telle évolution, il est difficile d'imaginer que le sujet, qui fut absent des débats lors des élections de 2017, ne figure pas à l'agenda des prochaines législatives, prévues à l'automne 2021.
Thomas Wieder
© Le Monde

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