Translate

mercredi 30 mai 2018

Les ministres au banc d'essai de l'Assemblée nationale


30 mai 2018

Les ministres au banc d'essai de l'Assemblée nationale

Les élus veulent transformer la traditionnelle loi de règlement du budget 2017 en examen de l'action gouvernementale

agrandir la taille du texte
diminuer la taille du texte
imprimer cet article
La première à se lancer sera la ministre de la culture, Françoise Nyssen, suivie par son collègue des comptes publics, Gérald Darmanin. L'ensemble du gouvernement doit suivre. Mercredi 30  mai devait démarrer un grand oral inédit de l'exécutif devant les députés. L'occasion : l'examen de la " loi de règlement ", censée valider le budget de l'année écoulée. D'habitude, l'exercice est bref : en  2017, deux réunions de la commission des finances y avaient été consacrées. Cette année, les députés enchaîneront quelque 18 séances, jusqu'au 7  juin, avant trois jours de débat dans l'Hémicycle, du 18 au 20  juin.
" Cela inquiète un peu les ministres, qui n'ont pas l'habitude de rendre des comptes ",glisse Valérie Rabault, présidente du groupe Nouvelle Gauche et ancienne rapporteuse générale du budget. " Ce n'est pas pour fliquermais pour mieux voter ", précise Laurent Saint-Martin, député LRM du Val-de-Marne. Arrivés dans l'Hémicycle dans la foulée de l'élection d'Emmanuel Macron, les députés LRM, souvent qualifiés de " godillots " en début de mandat, ont bien l'intention de demander des comptes au gouvernement sur l'utilisation des deniers publics.
" Droit de suite "Montée par une dizaine de membres de la commission des finances (les LRM Amélie de Montchalin et Laurent Saint-Martin, et le MoDem Jean-Noël Barrot en tête) qui ont fait de l'évaluation des politiques leur cheval de bataille, cette version rénovée a même un nom, très marketing : " le printemps de l'évaluation ". Objectif : passer en revue la seconde partie du projet de loi de finances (dépenses), qui fixe les moyens de l'ensemble des ministères. Et vérifier si les crédits alloués ont bien été utilisés aux fins prévues. Les ministres auditionnés auront à répondre de la manière dont ils ont utilisé leurs enveloppes. Mais " la loi de règlement n'est qu'un prétexte. L'objectif, c'est d'évaluer l'efficacité des politiques publiques qu'auront choisies les rapporteurs, sur plusieurs années s'il le faut. Il pourra s'agir des contrats aidés, de la politique d'aide au développement… ", détaille Eric Wœrth, le président LR de la Commission des finances, qui a défendu la démarche.
Le député LRM de Paris Pierre Person, rapporteur spécial pour une partie des crédits du ministère de la culture, raconte ainsi avoir complété son travail sur l'utilisation du budget par deux déplacements sur le terrain. Ces derniers lui permettront de plaider pour un " rééquilibrage " de l'attribution des fonds de la -culture sur le territoire alors que ces budgets sont, aujourd'hui, " essentiellement parisiens ". Des conclusions qui pourront faire l'objet de propositions de résolution par des députés – sans force de loi." C'est une expérimentation. Il faudra tirer le bilan ", prévient M. Wœrth. Car ce " printemps " sera d'abord ce que les députés en feront. " Je compte sur la présence et l'engagement de chacun " pour faire de l'opération " un succès ", a pris soin de souligner M. Wœrth, dans un mail à ses collègues la semaine dernière.
Alors que les députés s'irritent de la main-mise grandissante de l'exécutif sur le Parlement, ce nouveau format semble faire consensus, y compris au sein de la plupart des groupes d'opposition. " Ça va être un changement en profondeur de la façon dont on aborde l'évaluation budgétaire ", se félicite le député socialiste Régis Juanico, qui travaille sur ces questions depuis de longues années. " Sur le principe, c'est très bien. Le Parlement doit pouvoir exercer sa mission de contrôle ", abonde Mme Rabault.
Les députés de la majorité parviendront-ils à installer un véritable rapport de force avec les ministres ? " L'évaluation est aujourd'hui très dépréciée, car on manque de temps et de moyens humains et financiers. L'idée est d'introduire un mécanisme de droit de suite vis-à-vis du gouvernement ", explique Jean-Noël Barrot. En passant plus de temps sur la seconde partie du budget de l'année précédente, les parlementaires espèrent aussi raccourcir le débat sur celui de l'année suivante, à l'automne. Et rendre plus réaliste l'objectif de cinquante jours d'examen (contre soixante-dix aujourd'hui). Dans l'attente du vote de la révision constitutionnelle, censée acter cette évolution, " le printemps de l'évaluation est une étape ", explique-t-on à l'Assemblée.
Manon Rescan, et Audrey Tonnelier
© Le Monde

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire