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mercredi 30 mai 2018

Bruxelles veut bannir les objets plastique jetables......La pollution industrielle imprègne les habitants de Fos-sur-Mer......


30 mai 2018

Bruxelles veut bannir les objets plastique jetables

Avec le matériel de pêche, les produits à usage unique sont responsables de 70 % des déchets marins en Europe

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Pour la Commission européenne, plastique ne rime plus avec fantastique, et ce changement de paradigme devrait modifier sensiblement les habitudes de consommation des citoyens de l'Union européenne. Lundi 28  mai, dans le cadre de sa politique de réduction des émissions de carbone et de lutte contre l'invasion des mers et des océans par les déchets plastique, l'exécutif européen a rendu publique une proposition de directive visant à réduire " drastiquement " l'utilisation des produits en plastique à usage unique.
Coton-Tige, couverts et assiettes, pailles et mélangeurs de cocktails, tiges de ballons de baudruche… Ces produits du quotidien, qui, additionnés aux équipements de pêche abandonnés, représentent plus de 70  % des déchets marins en Europe, seraient ainsi interdits sous leur forme actuelle, et leurs fabricants contraints de les produire à l'aide de matériaux plus durables. Les récipients pour boisson à usage unique, eux, ne seraient plus autorisés que si leur couvercle ou leur bouchon y est attaché.
" Le plastique peut être fantastique, mais nous devons l'utiliser de manière plus responsable, a déclaré lundi Jyrki Katainen, un des vice-présidents de la Commission, dans un communiqué. Les propositions faites aujourd'hui aideront le commerce et les consommateurs à opter pour des alternatives durables. "
" Raccourcis "Dans cette série de mesures législatives figure également l'obligation pour les 28  Etats membres de réduire de façon " significative " la consommation de récipients alimentaires ou de boisson en plastique, dans un délai de six ans après la transposition de la directive, grâce à des objectifs nationaux de diminution de consommation, atteignables en utilisant des produits alternatifs ou en faisant payer les contenants actuels. D'ici à 2025, les pays membres devraient, par ailleurs, obligatoirement assurer la collecte de 90  % de leurs bouteilles en plastique à usage unique, grâce à un système de consigne par exemple.
Selon le principe du pollueur-payeur, les fabricants d'emballages de chips ou de bonbons, de gobelets, de filtres de cigarettes, de sacs plastique légers, devraient de leur côté contribuer à financer les coûts du traitement des déchets qu'ils génèrent. Et les fabricants de lingettes, de protections hygiéniques et de ballons de baudruche seraient tenus de détailler, sur les étiquettes de leurs produits, " le mode d'élimination des déchets, les effets néfastes du produit sur l'environnement et la présence de matières plastique ".
Enfin, les Etats membres auraient l'obligation de sensibiliser le public à l'impact négatif des plastiques à usage unique et du matériel de pêche, ainsi qu'aux dispositifs de réemploi et de gestion des déchets de ces produits.
La Commission, dont l'objectif est de rendre l'industrie du plastique circulaire et tous les emballages plastique recyclables à l'horizon 2030,estime que l'adoption et la mise en œuvre de la directive permettraient de réaliser, d'ici à cette date, une économie de 223  milliards d'euros sur les dommages environnementaux et d'éviter l'émission de 3,4  millions de tonnes d'équivalent CO2.
Selon Laura Châtel, chargée de campagne pour l'ONG Zero Waste France, la proposition de directive représente une " avancée à saluer "." C'est la première fois qu'on présente une réglementation avec pour objectif la réduction des déchets à la source, et qu'on n'aborde pas la question du plastique sous le seul angle du recyclage qui ne sera pas suffisant ", souligne la militante, qui appelle Paris à afficher une position " ambitieuse " dans les négociations à venir.
" L'interdiction des boîtes de polystyrène pour la vente à emporter est inscrite dans la feuille de route sur l'économie circulaire présentée le mois dernier par le ministère de la transition éco-logique et solidaire,rappelle-t-elle. C'est le moment de la mettre en œuvre. "
Se félicitant de l'initiative de la Commission, Rethink Plastic, une coalition d'ONG en faveur d'un avenir sans plastique, dont Zero Waste est membre, regrette néanmoins que la proposition de directive ne fixe aucun objectif spécifique chiffré pour la réduction des emballages alimentaires et gobelets dans les Etats membres, risquant ainsi de les inciter à se contenter de faibles améliorations.
Pour sa part, l'industrie européenne du plastique estime que la Commission a raisonné par " raccourcis ". Dans un communiqué, PlasticsEurope a affirmé, lundi, que les déchets marins résultent plus particulièrement du " manque d'application de la législation liée à la gestion des déchets au niveau national et régional " et préconisé la mise en place d'infrastructures appropriées et l'interdiction des décharges.
La proposition de directive doit maintenant être discutée et amendée par les deux législateurs de l'UE – le Parlement européen et le conseil des ministres des Etats membres – dans les mois qui viennent. La Commission, qui souhaite la faire adopter avant le terme de son mandat en mai  2019, a enjoint ces instances de la traiter en " dossier prioritaire ". Une fois adoptées, ces règles entreraient en vigueur au plus tôt en  2022.
" Les déchets plastique constituent indéniablement un dossier de premier ordre, a déclaré le premier vice-président de la Commission, Frans Timmermans, lundi 28 mai.Les Européens doivent s'y attaquer de concert, car les déchets plastique finissent dans l'air que nous respirons, dans notre sol, dans nos océans et dans nos aliments. "
Longueur d'avanceChaque année, huit millions de tonnes de plastique finissent dans l'océan, décimant les espèces marines et les oiseaux, et affectant la chaîne alimentaire de l'homme, selon le Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE).
Après l'entrée en vigueur d'une législation restrictive sur les sacs en plastique en mai  2015, près de trois Européens sur quatre indiquent une chute de 50  % dans leur consommation, selon l'Eurobaromètre. " Je crois que le changement de comportement chez nos citoyens est l'un des principaux facteurs pour nous emmener vers l'économie circulaire ", a déclaré M.  Timmermans.
L'île grecque de Sikinos a pris une longueur d'avance sur l'UE. Le 1er  juin, cette destination touristique connaîtra son premier été sans pailles en plastique. La Fondation Laskaridis, qui promeut la recherche maritime, fournira gratuitement et jusqu'à fin 2019 des pailles biodégradables de substitution à la vingtaine d'entreprises qu'abrite ce morceau de Cyclades de 300  âmes en mer Egée.
Au Royaume-Uni, les pailles, mélangeurs de cocktail et Coton-Tige en plastique seront également interdits à la fin de l'année, tandis que gobelets et assiettes en plastique seront bannis en France au 1er  janvier 2020.
Patricia Jolly
© Le Monde


30 mai 2018

La pollution industrielle imprègne les habitants de Fos-sur-Mer

Une étude relève une surimprégnation, notamment en plomb, une surexposition aux particules ultrafines, et souligne un " effet cocktail "

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Le doute n'est plus permis. Les habitants de Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône) sont bien contaminés par les gaz toxiques qui s'échappent des cheminées de la zone industrialo-portuaire (ZIP) voisine. Rendue publique lundi 28  mai, l'étude Index permet pour la première fois de connaître le niveau d'imprégnation des populations locales aux polluants issus de l'une des plus importantes ZIP d'Europe, qui concentre des activités de sidérurgie (ArcelorMittal), de raffinerie et de pétrochimie.
Elle était très attendue depuis une autre étude alarmante (Fos Epseal) publiée en janvier  2017. Une équipe universitaire franco-américaine révélait en effet que les cas de cancers et de diabète de type 1 étaient deux fois plus nombreux à Fos que dans le reste de la France. Portée par l'Institut écocitoyen pour la connaissance des pollutions (IECP) et validée par l'Agence régionale de santé PACA, Index conclut à une " surimprégnation de la population de Fos-sur-Mer en certains polluants ". Il s'agit de " trois polluants spécifiques, typiques des émissions industrielles " : le plomb, deux furanes heptachlorés (famille des dioxines) et le benzène (chez les individus les plus âgés).
" Robustesse scientifique "Si le plomb et le benzène sont reconnus comme cancérogènes, les deux furanes identifiés présentent des niveaux de toxicité bien moindres que la funeste " dioxine de Seveso ". Au total, cinquante substances ont été recherchées dans le sang et les -urines de 138 personnes âgées de 30 à 65 ans, réparties en deux groupes afin de pouvoir comparer les résultats : 80 habitants de Fos et 58 résidents d'une zone témoin (Saint-Martin-de-Crau), à 20 kilomètres.
En dehors du plomb, des furanes et du benzène, les riverains de la ZIP ne sont " pas globalement plus imprégnés " que ceux de la zone témoin. Les concentrations de ces biomarqueursne sont pas non plus supérieures aux niveaux nationaux, mais la dernière étude nationale date de 2006-2007 alors que les prélèvements d'Index ont été réalisés entre septembre et novembre  2016. La prochaine étude de biosurveillance nationale (Esteban), attendue en  2019, devrait permettre une meilleure comparaison.
Pris polluant par polluant, les résultats d'Index ne montrent pas non plus de dépassements des seuils réglementaires. Mais, note le rapport, la diversité des polluants présents pose la question de " l'effet cocktail ", à savoir les conséquences sanitaires d'un cumul de substances toxiques à petites doses. Un effet favorisé par certaines activités liées à l'usage d'un environnement lui-même " surimpacté " par la présence de la zone industrielle.
Ainsi la pratique du jardinage est-elle associée à une augmentation de l'imprégnation en PCB-DL (pour " dioxin-like ", c'est-à-dire ayant le même comportement que les dioxines) et la consommation de légumes du jardin à celle du cadmium (classé cancérogène). La consommation fréquente de produits de la mer locaux (poissons ou fruits de mer) est associée à une augmentation de l'imprégnation en PCB, dioxines et furanes, mercure et chrome.
Sur ce dernier point, Index confirme les résultats d'une autre étude de l'IECP mettant en évidence la présence de ces substances cancérogènes dans des produits alimentaires certifiés AOC comme la viande de taureau, les œufs ou les moules. Présentée en février, elle avait suscité la colère des conchyliculteurs et la préfecture des Bouches-du-Rhône l'avait balayée d'un revers de la main, jugeant son " fondement méthodologique insuffisant ".
" Cette fois, personne ne pourra remettre en question la robustesse scientifique de l'étude, estime Véronique Granier, de l'IECP. Elle a été reconnue par Santé publique France. " L'organisme a participé au comité de pilotage, mais s'est retiré quelques jours avant la publication des résultats, jugeant ne pas avoir assez de temps pour les valider.
" Registre des cancers "Autre point inquiétant relevé par Index : la " surexposition " aux particules ultrafines (de diamètre inférieur à 0,1  micromètre), les plus dangereuses car elles pénètrent dans le sang et peuvent atteindre le cerveau. Le comptage en continu de ces particules a été effectué entre août et novembre  2017 : 227 pics (au-delà de 30 000 particules par cm3) ont été enregistrés à Fos-sur-Mer, contre seulement 63 en zone témoin. Problème, ces nanoparticules ne peuvent se doser dans l'organisme.
" Nous espérons désormais que les industriels se saisiront de ces résultats pour cibler leurs actions afin de réduire la pollution et notamment les émissions de parti-cules ultrafines ", commente Sylvaine Goix, l'investigatrice prin-cipale de l'étude.
Pour l'IECP, Index doit surtout désormais déboucher sur des études épidémiologiques. L'institut prévoit d'en lancer une prochainement sur le diabète de type 1. Et s'attend, comme le précise Sylvaine Goix, à ce que les autorités sanitaires " ouvrent enfin un registre des cancers que nous réclamons depuis de nombreuses années et que nous ne voyons toujours pas venir ".
Stéphane Mandard
© Le Monde

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