C'est l'une des prin-cipales dispositions des ordonnances Macron réformant le code du travail : la fusion des différentes instances du personnel en une seule. Le 31 décembre 2019, au plus tard, dans les entreprises d'au moins onze salariés, les -actuels comités d'entreprise (CE), délégués du personnel et comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) auront laissé place au seul comité social et économique (CSE). Ce processus était dans l'air. Une précédente loi de 2015 avait prévu ce -regroupement à titre facultatif. Désormais, il est obligatoire. Les premiers accords instituant le CSE montrent une grande disparité de moyens et de mise en œuvre selon les entreprises.
" Globalement, dans les PME, il n'y a pas réellement de négociation sur les moyens du CSE, elles appliquent à la lettre les ordonnances avec une vision très comptable, -regrette Marylise Léon, secrétaire nationale de la CFDT.
Dans les grandes entreprises, c'est un peu différent. Là où il y a une culture du dialogue social, cela se passe mieux, mais c'est loin d'être le principe. " Ainsi, selon la CFDT, les -négociations ont difficilement -démarré chez Securitas ou Axa. Dans d'autres sociétés, telles que Parashop ou Vente-privee, ce n'est
" rien que les ordonnances ".
D'autres entreprises ont davantage joué le jeu. Chez le chimiste Solvay (5 500 salariés en France), où
" un accord de 2016 avait déjà fusionné les délégués du personnel et le CHSCT, cela a créé une -dynamique quia permis de -conclure rapidement un nouvel -accord CSE ", explique le DRH, Jean-Christophe Sciberras. L'accord autorise chaque délégué syndical central à siéger au sein du CSE, en plus des élus stricto sensu, afin de permettre de meilleurs débats. Et le nombre des commissions internes aux 17 CSE varie en fonction des accords locaux -conclus, au nom de l'efficacité.
Le même principe prévaut chez PSA, où 55 000 salariés sont -concernés par un accord, finalisé en avril, pour une mise en œuvre progressive sur douze mois, avec l'élection d'un CSE dans vingt -sites, et, in fine, d'un CSE central.
" C'est un bon compromis, estime le délégué syndical central CFE-CGC, Anh-Quan Nguyen.
Si l'on avait appliqué stricto sensu les ordonnances, on aurait perdu 48 % de mandats et 30 % des heures de délégation. Avec l'accord, on n'en perd respectivement que 20 % et 10 %. " L'accord prévoit aussi une commission hygiène et sécurité, y compris dans les établissements de moins de 300 salariés, alors que les ordonnances ne la rendaient obligatoire qu'au-delà de ce seuil. Quant à la fréquence des réunions des CSE, elle est maintenue à onze par an, alors qu'elle aurait pu être réduite à six.
Révélateur du climat socialChez l'opérateur Bouygues Telecom (5 000 salariés concernés), le -directeur des relations sociales, Jean-Pierre Poisson, indique
" avoir eu la volonté de respecter l'esprit des ordonnances Macron, mais en les adaptant afin de -préserver nos bonnes pratiques en matière de dialogue social ". La baisse du nombre d'élus est certes de 42 % sur l'ensemble des sept -sites couverts par un CSE, mais le rythme des réunions est maintenu à douze par an et une commission santé, sécurité et conditions de travail se tiendra dans les établissements de moins de 300 salariés où siégeront, aux -côtés des représentants légaux, des membres non élus pouvant être des anciens des CHSCT.
" Les syndicats ont besoin d'avoir ces -experts métier qui étaient très -investis dans leur mandat sans avoir forcément une étiquette syndicale ", justifie M. Poisson.
Enfin, l'accord a créé une commission diversités et compétences, non prévue par les ordonnances. En revanche, Bouygues Telecom n'aura pas de représentants de proximité. L'accord stipule que, pour ne pas encombrer les CSE, les réclamations individuelles seront localement traitées avec les manageurs.
A la MAIF (5 500 salariés), un accord largement majoritaire, signé fin avril, réduit aussi fortement le nombre de mandatés de 518 à 218, mais les élus disposent de davantage d'heures de délégation et une commission " numérique ", non prévue par les ordonnances, a été créée.
La mise en place du CSE sert ainsi de révélateur du climat -social propre à chaque entreprise. Là où les relations sont fondées sur la méfiance, les accords CSE semblent défensifs. A l'inverse, là où le dialogue social est davantage -ancré, les accords créent de nouveaux droits, notamment en -matière d'expertise.
Jean-Christophe Chanut
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