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dimanche 30 septembre 2018

Unédic : le premier ministre s'invite dans le débat sur la dégressivité


29 septembre 2018

Unédic : le premier ministre s'invite dans le débat sur la dégressivité

En estimant que ce dispositif peut être envisagé, M. Philippe a irrité les syndicats

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Edouard Philippe s'est invité dans les négociations sur la réforme de l'assurance-chômage avant même qu'elles ne débutent. Au cours de " L'Emission politique " sur France  2, le premier ministre a déclaré, jeudi 27  septembre, que la dégressivité des allocations, versées aux demandeurs d'emploi, peut être " dans certains cas (…) envisagée ". Une intervention qui fait froncer les sourcils de leaders syndicaux et patronaux, déjà bien peu disposés à se lancer dans des discussions destinées à revoir les conditions d'indemnisation des chômeurs.
Pour le chef du gouvernement, instaurer " une forme de dégressivité peut avoir du sens ", s'agissant des personnes en quête d'un poste, qui ont " une très forte employabilité (…), qui ont des salaires très élevés ". Cette option-là n'est pas inscrite dans le document de cadrage que l'exécutif a adressé aux partenaires sociaux afin de tracer les grandes orientations de la réforme. Mais elle y figure en filigrane : il y est question de refondre un dispositif qui ne tient pas compte des " différences de capacité à retrouver un emploi ". Autrement dit, les chômeurs très qualifiés, qui sont censés rebondir rapidement sur le marché du travail, se verraient appliquer des règles plus strictes. " Nous mettons sur la table un certain nombre de pistes qui nous semblent raisonnables (…), dont les partenaires sociaux vont discuter ", a complété M.  Philippe. Pas d'injonction, donc, mais son propos est un peu plus directif que celui de Muriel Pénicaud : la ministre du travail a indiqué que l'exécutif n'avait pas à dicter de solutions.
" Dualité du marché du travail "Le secrétaire général de FO, Pascal Pavageau, fulmine contre la sortie de M. Philippe : " Si c'est une tentative de nous mettre la pression au moment où l'on va peut-être ouvrir la négociation, ça va ! Nous ne sommes pas des sous-traitants du gouvernement. S'il veut de la dégressivité, il l'assumera. " Sous-entendu : FO ne signera pas un accord prévoyant une telle mesure. Celle-ci " n'a pas fait la preuve de son efficacité, en matière de retour à l'emploi ", enchaîne Marylise Léon, la numéro deux de la CFDT.
" Baisser les allocations pousse les personnes à accepter des emplois en dessous de leur niveau de qualification, ce qui bloque l'accès au marché du travail des moins qualifiés, renchérit Denis Gravouil, de la CGT. Cela ne peut que renforcer la dualité du marché du travail, que le gouvernement prétend combattre. " L'indignation est forte, également, dans les rangs de la CFE-CGC, la centrale des cadres. Son président, François Hommeril, lâche : " Les bras m'en tombent ! " A ses yeux, la dégressivité pour les cadres " n'a aucun sens sur le plan économique " car une telle mesure " ne rapporterait que quelques millions d'euros alors qu'on en cherche 1 à 1,3  milliard par an ". Sur le plan de " la morale politique, c'est très perturbant ", poursuit-il, car un tel scénario accrédite l'idée que " les cadres, lorsqu'ils sont au chômage, en profitent " " C'est exactement ce qu'on appelle du populisme. "
Dans le monde patronal, les avis sont contrastés. Le Medef voit dans la dégressivité " une option " possible. " Je ne suis pas choqué ", affirme Alain Griset, le numéro un de l'Union des entreprises de proximité (artisanat, commerce, professions libérales), l'U2P. " Ça ne règle pas vraiment le fond du -problème ", juge, pour sa part, François Asselin, le président de la Confédération des petites et moyennes entreprises : les cadres sont ceux qui contribuent le plus, en cotisations, au financement de l'assurance-chômage et ils ne sont que " quelques centaines " à toucher le niveau maximum d'indemnisation, souligne-t-il.
Les déclarations du premier ministre ne devraient pas remettre en cause l'ouverture des négociations. Quatre centrales syndicales sur cinq ont indiqué qu'elles y participeraient, tandis que la CGT prendra sa décision le 2  octobre. Les discussions se dérouleront " sur nos bases ", prévient M.  Pavageau : " Lettre de cadrage ou pas, on s'en fiche, on ne va pas se laisser contraindre ! " La CFDT est dans un état d'esprit similaire. Du côté des employeurs, l'U2P a dit qu'elle s'installera à la table des négociations. Le Medef devrait faire de même – il se prononcera le 1er  octobre. Quant à la CPME, sa réflexion est toujours en cours.
Raphaëlle Besse Desmoulières, et Bertrand Bissuel
© Le Monde

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