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dimanche 30 septembre 2018

L'inflation grignote les bénéfices des placements sécuritaires


29 septembre 2018

L'inflation grignote les bénéfices des placements sécuritaires

La hausse du coût de la vie a généré une perte de pouvoir d'achat du côté des investissements garantissant le capital

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En France, comme en Europe, l'inflation se réveille. Selon l'Insee, les prix à la consommation ont connu cet été un pic à 2,3  %, soit son plus haut niveau depuis 2012. " Ce petit ressaut relatif est, pour le moment, conjoncturel. Il est avant tout une conséquence de la hausse du prix de l'énergie et notamment du pétrole ", relativise, dans sa dernière lettre d'informations, Lorello Ecodata, un cabinet d'études et de stratégies économiques. " Le scénario actuel pencherait pour une remontée lente et progressive ",avance Emmanuel Gand, directeur du département des banquiers privés de la Banque Palatine. D'ici à la fin de cette année, les prévisions font état d'une inflation comprise entre 1,6 % et 1,8  %.
Même léger, ce rebond ne fait pas le bonheur des épargnants. Car, si ces derniers peuvent emprunter pas cher, la hausse des prix fait des dégâts du côté de certains placements en laminant, voire effaçant leurs performances. C'est flagrant pour les produits d'épargne réglementés à taux fixe, comme le Livret A, le Livret de développement durable et solidaire (LDDS) et le Livret d'épargne populaire (LEP). Avec des rémunérations à leur plus bas historique, de 0,75  % pour les deux premiers et de 1,25 % pour le troisième, les rendements réels – nets d'inflation – sont négatifs. Ainsi, un épargnant ayant 10 000 euros de liquidités sur son Livret A accuse aujourd'hui un rendement réel négatif de près de 1 point (0,75 – 1,8).
Concrètement, cela signifie qu'il perd 100 euros de pouvoir d'achat sur un an. Et, avec le gel du taux du Livret A décidé par le gouvernement jusqu'en  2020, il n'y a rien à espérer. C'est d'autant plus dommage que les modalités de révision de ce taux intégraient jusqu'alors les évolutions de l'inflation. " Le LEP est un peu moins impacté, car il bénéficie d'un taux un peu plus élevé ", indique Philippe Crevel, directeur du Cercle de l'épargne.
Obligations à éviterLa hausse générale des prix est encore plus pénalisante pour les livrets bancaires. En plus du bas niveau des taux d'intérêt et du regain d'inflation, les intérêts servis sont imposés par la " flat tax " à 30 %, soit 12,8 % au titre de l'impôt sur le revenu, plus 17,2 % de prélèvements sociaux. En se référant au rendement moyen de ces livrets, qui est égal à 0,26 % selon la Banque de France, le cabinet Lorello Ecodata a calculé que leur rendement passe à 0,18 % en appliquant la " flat tax ", et devient négatif à 1,6 % après prise en compte de l'inflation.
Même constat du côté du plan épargne logement (PEL). Les générations de plans ouverts avant 2015 s'en sortent bien grâce à des rémunérations de 2,50 % ou plus et une fiscalité qui s'applique à partir de la douzième année. En revanche, les PEL souscrits depuis août 2016, rémunérés actuellement à 1 % et fiscalisés dès la première année, ne protègent plus le capital.
Quant au fonds en euros d'un contrat d'assurance-vie, il est un peu mieux loti. Pour mémoire, il a rapporté en moyenne, en  2017, 1,8 % net de frais – toutefois, certains contrats servent 2  %, ce qui parvient tout juste à garantir le capital. En période de hausse des prix, les obligations sont à éviter. " Le coupon à taux fixe est annulé, tout ou partiellement, par la hausse des prix ", commente Jean-Jacques Friedman, directeur des investissements de Vega IM et de Natixis Wealth Management. " Pour ceux qui le peuvent, mieux vaut céder ces actifs et empocher les plus-values ", ajoute Emmanuel Gand.
Le placement dans la pierre semble épargné, car la loi prévoit une indexation régulière des loyers sur la base de l'indice de révision des loyers (IRL), qui tient compte de la hausse des prix. Reste que pour Jean Perrin, président de l'Union nationale des propriétaires immobiliers (UNPI), cette protection est en trompe-l'œil : " Il n'y a certes pas d'effet négatif de l'inflation sur les loyers pratiqués dans les grandes métropoles, où la demande locative excède l'offre et où cet indice est utilisé. En revanche, ce n'est pas vrai dans les villes petites et moyennes, au marché locatif peu dynamique. Pour conserver son locataire ou en trouver un autre, un bailleur est contraint de faire une croix sur cette indexation. Le plus souvent, il reloue au même prix ou moins cher. "
Si la sécurité ne paie plus, il subsiste des produits financiers peu ou pas sensibles à l'inflation. Certes plus risqués et non garantis, ces derniers permettent de capter des rendements potentiellement élevés. C'est le cas des actions ou des parts de fonds détenus en direct ou via des unités de compte d'un contrat d'assurance-vie. " Les titres réagissent mieux à l'inflation. L'épargnant profite des versements de dividendes liés aux bons résultats des entreprises ", commente Philippe Crevel. Certains secteurs ont même le vent en poupe. " Il faut privilégier les entreprises où la croissance est régulière, prévisible et résistante aux cycles économiques. C'est le cas de certaines valeurs de l'alimentaire, du luxe, de la santé et des biotechnologies ", affirme Marjorie Sonigo, directrice de la gestion financière chez Pictet Wealth Management. Si l'inflation grignote le pouvoir d'achat, ce dernier pourrait être en partie restauré par la baisse de la taxe d'habitation et quelques autres mesures présentées dans le projet de loi de finances pour 2019.
Laurence Boccara
© Le Monde

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