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samedi 3 novembre 2018

En Syrie, les djihadistes refusent de se retirer des alentours d'Idlib, mais font profil bas - le 17.10.2018


17 octobre 2018

En Syrie, les djihadistes refusent de se retirer des alentours d'Idlib, mais font profil bas

Le groupe Hayat Tahrir Al-Cham reste équivoque sur l'accord de Sotchi entre la Russie et la Turquie, qui prévoit une zone démilitarisée autour de l'enclave rebelle

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LA SYRIE ROUVRE DES PASSAGES FRONTALIERS
Fermés pendant des années en raison du conflit syrien, un point de passage entre la Syrie et la partie du Golan sous contrôle israélien ainsi qu'une route vitale vers la Jordanie ont rouvert lundi 15 octobre. Ces deux décisions témoignent d'un retour progressif de la souveraineté du régime syrien sur ces territoires frontaliers. Le poste-frontière jordano-syrien de Nassib est situé sur une route qui était autrefois une voie essentielle pour les échanges au Moyen-Orient et vers l'Europe. Et le poste de Kuneitra, entre Syrie et Israël sur le plateau du Golan, sert de base aux opérations de la force de l'ONU, chargée de veiller au respect du cessez-le-feu après la guerre de 1973, et au transit des populations druzes.
C'était l'une des inconnues contenues dans l'accord conclu le 17  septembre à Sotchi entre le président russe, Vladimir Poutine, et son homologue turc, Recep Tayyip Erdogan : comment allaient réagir les groupes djihadistes qui contrôlent une partie de la province rebelle d'Idlib, dans le nord de la Syrie ?
S'ils ont bien retiré leurs armes lourdes, ils refusent de quitter la zone démilitarisée russo-turque, censée séparer les forces de l'opposition de celles du régime aux abords de l'enclave. Mais Damas et Moscou devraient fermer les yeux et concéder un répit à Ankara, garante de l'application de l'accord.
Alors qu'ils étaient censés quitter une bande de 15 à 20  km de profondeur, à la date du 15  octobre, les djihadistes de Hayat Tahrir Al-Cham (HTS), l'ex-branche syrienne d'Al-Qaida – l'une des plus im-portantes factions armées de l'enclave –, ont fait savoir qu'ils comptaient poursuivre le combat contre le régime, et qu'il était hors de question qu'ils rendent les armes.
" Nous n'abandonnerons pas le choix du djihad et du combat pour réaliser les objectifs de notre révolution bénie : en premier lieu, faire tomber le régime criminelNous n'abandonnerons pas nos armes ", a déclaré HTS le 14  octobre, sans toutefois indiquerclairement s'il rejetait le traité du 17  septembre.
Mais dans ce qui apparaît comme une volonté de ménager Ankara, qui s'est engagée auprès de Moscou à faire respecter les termes de l'accord de Sotchi, le groupe djihadiste s'est bien gardé d'évoquer toute reprise des hostilités. Dans une référence implicite à la Turquie, HTS précise " apprécier les efforts de tous ceux qui luttent à l'intérieur et à l'extérieur de la Syrie pour protéger les zones libérées - du régime - et empêcher leur destruction ou des massacres ".
" Il s'agit de sauver la face "Ce communiqué ambigu vaudrait même acceptation tacite du résultat des négociations russo-turques, analyse Aron Lund, chercheur attaché à la Century Foundation : " Cette déclaration est essentiellement une invective adressée à la Russie et au gouvernement syrien. Tahrir Al-Cham affirme, certes, qu'il ne rendra pas ses armes et que lui-même ne se rendra pas, mais ce n'est pas ce qu'on lui a demandé de faire. Le ton belliqueux de cette déclaration masque le fait qu'il ne rejette jamais explicitement l'accord de Sotchi, pas plus qu'il ne rejette explicitement l'idée de se retirer de la zone tampon pour placer des forces ailleursIl s'agit de sauver la face, HTS ne dira jamais qu'ils se conforment à ce que les Russes et les Turcs leur disent de faire. "
Le mouvement djihadiste reste secoué par de fortes divisions internes. Dès la fin du mois de septembre, plusieurs factions de HTS ont déjà indiqué qu'elles étaient -prêtes à se retirer de la zone tampon, malgré les objections d'une aile rivale plus intransigeante, selon le journal pro-opposition Enab Baladi.
Principale alliance rebelle non djihadiste, le Front national de libération – parrainé par la Turquie pour empêcher les djihadistes de prendre le contrôle d'Idlib – a officiellement soutenu l'accord de Sotchi et a affirmé avoir totalement retiré ses armes lourdes. Un retrait confirmé par l'armée turque.
Du côté de Damas, le chef de la diplomatie syrienne, Walid Mouallem, affirmé lundi que son pays avait besoin de " temps " pour vérifier la mise en œuvre du compromis : " Nos amis russes doivent juger si l'accord a été appliqué ou pas. "
Flexibilité russeLa Russie a déjà laissé entendre de son côté qu'elle pourrait faire preuve de flexibilité et qu'un non-retrait des djihadistes n'entraînerait pas de représailles militaires immédiates : " Nous soutenons fermement les efforts de nos partenaires turcs. Et c'est la qualité de ces efforts qui est la plus importante ", avait ainsi déclaré le ministre des affaires étrangères russe, Sergueï Lavrov, le 10  octobre.
La Turquie, qui a déployé plus de 3 000  soldats dans la province rebelle, a pour l'instant remporté une partie de son pari : globalement, le calme règne le long des lignes de front. Et le principal groupe djihadiste fait profil bas.
Madjid Zerrouky
© Le Monde

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