C'est un moment particulièrement radieux pour l'économie américaine. " Forts de ce constat, le président de la Réserve fédérale américaine (Fed, banque centrale) Jerome Powell et son comité de politique monétaire ont remonté comme prévu leurs taux directeurs d'un quart de point, mercredi 26 septembre, à l'issue de deux jours de réunion.
Aux Etats-Unis, le loyer de l'argent à court terme se situe désormais dans la fourchette de 2 % à 2,25 %. Il s'agit de la troisième hausse de l'année et de la huitième depuis fin 2015. Les taux directeurs se situaient entre 0 % et 0,25 % depuis décembre 2008, l'institution monétaire ayant fait feu de tout bois pour relancer l'économie américaine après la grande crise financière.
De la conférence de M. Powell, plusieurs leçons peuvent être tirées : il ne croit pas à la guerre commerciale, ne décèle pas de bulle financière, mais s'inquiète du déficit budgétaire.
La Fed n'a pas mentionné les risques politiques, en particulier la guerre commerciale. En la matière, M. Powell ne voit toujours pas d'effet macroéconomique des mesures annoncées par Donald Trump. Si les droits de douane entraînent une hausse des prix, il faudra voir s'il s'agit d'un effet unique ou si le phénomène crée une spirale inflationniste. Surtout, le président de la Fed n'exclut pas que, à terme, les droits de douane soient plus bas, ce qui correspond au discours de la Maison Blanche.
De même, M. Powell ne décèle pas de bulle sur les marchés financiers, même si les valorisations sont au plus haut. La Fed pourrait ralentir sa hausse des taux en cas d'accident boursier.
Toutefois, le président de la banque centrale dit s'inquiéter de la baisse de la Bourse lorsqu'elle réduit la capacité de consommation ou d'investissement des Américains, parce que leur portefeuille est apporté en garantie. Ce n'est pas le cas pour l'instant, d'après lui.
Marges de manœuvreDix ans après la crise des subprimes et la faillite de Lehman Brothers, il estime par ailleurs que les prix de l'immobilier restent inférieurs à leurs niveaux d'avant 2008, tandis que
" les banques prennent beaucoup moins de risques qu'elles ne le faisaient ".
En revanche, M. Powell s'inquiète du déficit budgétaire -américain, qui atteint, au bout de huit années de croissance, le -niveau jugé unanimement déraison-nable de 5 % du produit intérieur brut (PIB). Les Etats-Unis se trouvent
" sur une trajectoire budgétaire non soutenable depuis longtemps ", a estimé M. Powell, et
" le moment est propice pour s'y attaquer ".
Les élus républicains, qui avaient torpillé les plans de relance sous Barack Obama, ont de fait abjuré depuis leur credo d'orthodoxie budgétaire et ont voté, fin 2017, les baisses d'impôts non financées et procycliques de -Donald Trump.
Le sujet n'est donc pas à l'ordre du jour, tant que la planète achète des dollars pour financer les déficits américains. C'est pour cela que la Fed relève ses taux inexorablement, soucieuse de disposer de marges de manœuvre monétaires en cas de récession, lorsque l'arme budgétaire deviendra inopérante.
Douze des seize membres ayant participé au comité de politique monétaire estiment que l'institution relèvera encore une fois ses taux d'ici à la fin de l'année. Ils ont laissé entrevoir trois hausses en 2019 – les taux atteindraient alors 3,25 %, pour finir autour de 3,5 % en 2020 et 2021. Pour la première fois depuis des années, la Fed ne précise plus qu'elle mène une politique
" accommodante ", mais M. Powell a estimé que
" les taux - restaient -
bas ".
Quatrième enseignement : la banque centrale croit que la croissance va demeurer forte, à la différence notamment des démocrates, qui annoncent une récession, l'un des seuls arguments dont ils disposent pour attaquer la politique économique de -Donald Trump.
Plein-emploiLa Fed a encore revu à la hausse ses prévisions de croissance, dopée par le moral d'acier des ménages et la remontée des prix du -pétrole, qui favorise l'investissement : elle devrait s'élever à 3,1 % cette année (contre 2,8 % prévus en juin), 2,5 % en 2019 (contre 2,4 % prévus jusqu'à présent), 2 % en 2020 et 1,8 % en 2021.
De même, le chômage devrait descendre jusqu'à 3,5 % pour les deux prochaines années. C'est le dernier " miracle ". Les Etats-Unis connaissent le plein-emploi, mais vont puiser dans leurs réserves de travailleurs – la stabilité de la population active avec une population vieillissante équivaut en fait à une hausse, selon M. Powell. Cet afflux de main-d'œuvre permet d'avoir une croissance sans inflation.
Arnaud Leparmentier
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire