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dimanche 30 septembre 2018

Le déplacement professionnel s'ubérise


29 septembre 2018

Le déplacement professionnel s'ubérise

Les prestataires traditionnels du secteur doivent composer avec les nouveaux acteurs issus du numérique

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Après des années de vaches maigres, les entreprises qui renouent avec la croissance investissent à nouveau dans les déplacements professionnels. Estimé à plus de 29 milliards d'euros en  2018 en France, selon le cabinet Epsa, le marché du voyage d'affaires devrait progresser de 3,6 % par rapport à 2017. " Depuis deux années, on assiste à une reprise très nette de l'activité avec des déplacements plus courts, mais plus fréquents ",confirme Michel Dieleman, pré-sident de l'Association française du travel management(AFTM) et ex-travel manager (gestionnaire de voyages) du groupe Orange.
Si le marché reprend des couleurs, il connaît aussi une impressionnante mutation. Finie l'époque où les agences de voyages, les hôteliers et les compagnies de transport pouvaient se reposer sur un portefeuille de clients fidèles. Les prestataires traditionnels doivent affronter la concurrence de nouveaux acteurs venus du -numérique. Leur point fort ? Ils sont plus souples, plus simples à utiliser et souvent moins chers.
Voguant sur la tendance du -mélange entre affaires et loisir, le -bleisure (business + leisure), les plates-formes grand public se positionnent de plus en plus sur le créneau du voyage d'affaires. " Booking.com, ultrasimple d'utilisation, est devenu une référence aujourd'hui ", reconnaît Carl-Manuel Brachet, vice-président Europe, Moyen-Orient et Afrique d'Egencia, la branche voyage d'affaires du groupe Expedia.
Airbnb, Uber et LyftA l'heure où le salarié peut faire une réservation en trois clics sur Internet, plus de 40  % des tran-sactions pour déplacements professionnels se font sans passer par l'intermédiaire d'une agence spécialisée, estime le cabinet Epsa. En 2011, c'était seulement le quart. Un changement de paradigme dont profitent les nouveaux entrants sur le marché.
Parmi ces derniers, les acteurs de l'économie collaborative figurent en bonne place. Après s'être imposés sur le terrain des voyages de loisirs, les " majors " de ce modèle continuent à grignoter le gâteau des déplacements pro. Aujour-d'hui, 15 % des séjours effectués avec Airbnb se font à titre professionnel. Du côté des VTC, Uber et Lyft ont représenté plus de 70 % des trajets des clients américains du gestionnaire de dépenses professionnelles Certify, au premier trimestre 2018.
Petits Poucets prometteurs, de nouveaux entrants copient le modèle qui a fait le succès de ces plates-formes. Sur ce créneau, plusieurs réussites " made in France " ont vu le jour. Bird Office, un site de location de salles de réunion, a déjà séduit BNP Paribas ou Engie. MagicStay, qui s'est positionné sur le créneau " Airbnb pour les pros ", a levé 1,5 million d'euros en ce début d'année et prévoit de se déployer en Europe. Dans le domaine de la gestion des frais professionnels, c'est la start-up Expensya qui trace son sillon : née en  2014, la petite société, qui mise sur une gestion simplifiée des dépenses professionnelles, compte une cinquantaine de salariés et revendique 3 000  clients.
Face à la croissance fulgurante de ces nouveaux acteurs, les -prestataires traditionnels font leur mea culpa " Les voyageurs ne comprennent pas pourquoi les outils qu'ils utilisent pour réserver un déplacement professionnel sont moins sympathiques que ceux qu'ils utilisent dans leur vie personnelle ", reconnaît Grégory Baumann, directeur des ventes chez Havas Voyages. Les agences spécialisées, les travel management companies (TMC), sont en première ligne. Pour se maintenir sur un marché de plus en plus segmenté, elles se positionnent sur le conseil et l'optimisation de la " politique voyage ". " Elles ont pour objectif d'accompagner les voyageurs dans leurs déplacements, mais aussi les entreprises pour les aider à maîtriser une activité complexe ", note M. Dieleman.
Misant sur le sur-mesure et la simplicité d'utilisation, les TMC développent de nouveaux outils de réservation et de gestion de -notes de frais. " Il y a un rapprochement des solutions pro et grand -public, davantage orientées vers le confort et la simplicité pour le voyageur ", ajoute le président de l'AFTM. Les agences misent aussi sur les nouvelles technologies afin d'automatiser certains pans de leur activité et se restructurer. Pour survivre, elles ont taillé dans leurs effectifs. En  2013, -American Express avait annoncé un plan massif de suppression de postes, qui concernait 5 400  emplois, principalement au sein d'Amex GBT, sa branche voyages d'affaires. Quant à CWT, la direction a annoncé des suppressions de postes cette année en France, après un plan de sauvegarde de l'emploi, en  2017.
Des alliances stratégiquesPour ne pas se laisser dépasser, les prestataires traditionnels s'allient avec de jeunes start-up : Accor-Hotels et Hop !, filiale d'Air France, n'ont pas hésité à s'associer à Nannybag, une plate-forme qui propose un service de consignes à -bagages. CWT a collaboré avec la start-up Yalta pour son outil de tracking des prix. La SNCF mise sur LeCab pour développer son offre porte-à-porte. Et plutôt que de se laisser marcher sur les pieds par les acteurs du collaboratif, les sociétés historiques du voyage d'affaires choisissent, là aussi, l'alliance : CWT, BCD Travel et Amex GBT se sont entendus avec Airbnb.
Reste à anticiper l'arrivée du " monstre GAFA ". Google et -consorts se positionnent de plus en plus sur le marché du tourisme, tant sur le plan des réservations que des moyens de paiement et des outils technologiques qu'ils développent. Leur arrivée sur le marché du voyage d'affaires ne -devrait être qu'une question de temps. Selon une étude d'AirPlus dévoilée en  2017, 19  % des travel managers envisagent déjà d'utiliser les solutions de paiement -proposées par Apple, Google ou PayPal. Reste à voir si tous ces acteurs arriveront à trouver leur place dans un marché en profonde mutation. Ou bien qui finira par manger l'autre.
Catherine quignon
© Le Monde

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