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dimanche 25 mars 2018

La direction du MJS rejoint Benoît Hamon

 
25 mars 2018

La direction du MJS rejoint Benoît Hamon

Olivier Faure, le futur premier secrétaire du PS, perd un pan important de  l'organisation de jeunesse historique du parti

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Le nombre d'adhérents revendiqués par la direction du MJS
Un chiffre contesté par ses opposants, qui l'estiment plutôt " en dessous de 3 000 ". Lors du dernier congrès, remis en cause pour de  supposées fraudes, notamment avec de fausses cartes -d'adhérents, le mouvement n'a recensé que 1 500 votants. " En réalité, ils sont en dessous de 1 000, avec aucune présence en  banlieue. Ils sont déconnectés de la jeunesse ", juge un membre de la direction collégiale du Parti socialiste.
Il y a vingt-cinq ans, en  1993, dans un sous-sol de la rue de Solférino, Benoît Hamon et Olivier Faure, alors jeunes étudiants, proclamaient l'autonomie des Jeunes socialistes vis-à-vis du parti. En s'affranchissant, ils gagnaient la liberté de désigner leurs dirigeants et de disposer de leur fichier d'adhérents.
Ironie de l'histoire, Roxane Lundy, l'actuelle présidente du MJS, a décidé cette semaine de rejoindre Génération.s, le mouvement de M. Hamon. Une décision prise à cause de désaccords sur la ligne du futur premier secrétaire, un certain Olivier Faure. Je fais le libre choix de rejoindre Génération.s pour être à même de transformer la société. Le MJS prend son indépendance du Parti socialiste ", annonce au Mondela présidente de l'association, encore liée au Parti socialiste par ses statuts.
M.  Faure, qui pressentait depuis plusieurs semaines ce départ, n'est pas surpris. Il s'étonne en revanche du calendrier choisi par la militante : " Quel sens des priorités ! Le jour d'un attentat qui coûte la vie à nos concitoyens, cela en dit long sur la déconnexion de cette organisation et de sa dirigeante avec ce que vit le pays ", tacle le président du groupe Nouvelle Gauche à l'Assemblée nationale, sans autre commentaire sur ce départ. " Je suis très heureux qu'elle fasse le choix, comme beaucoup d'autres, de Génération.s. Nous sommes un cadre politique bienveillant ", réagit de son côté M. Hamon, qui refuse d'y voir " une victoire "" Les choses suivent leur cours. Ce qu'il se passe dans la gauche française et européenne dépasse le destin des appareils : c'est la fin de la social-démocratie ", poursuit le chef de file du mouvement.
" Basses manœuvres "Mme Lundy emmène avec elle les trois autres permanents de la Rue de Solferino et 25  membres sur 30 de son bureau national. La jeune femme de 22 ans assure que des  milliers de militants " la suivront. " C'est absolument faux ", -conteste Eliott Pavia Ernest, militant, qui affirme que le dernier congrès du MJS, qui s'est tenu le 10  février à Bondy, a été entaché de fraudes. " Depuis des mois, elle essaie de détourner les moyens humains et financiers du PS vers Génération.s ", estime ce jeune militant de Nancy.
La direction du PS soupçonne en effet le MJS d'avoir en partie financé le mouvement de Benoît Hamon, Génération.s, alors que l'organisation de jeunesse percevait jusqu'à l'année dernière plus de 100 000  euros annuels de la part du Parti socialiste. " Ce serait fâcheux ", résume le trésorier du PS, Jean-François Debat, qui rappelle que " les statuts du MJS ne permettent pas de financer un autre mouvement politique ".
Le même jour, sans être encore au courant du départ de Mme  Lundy, Rachid Temal, le coordinateur du parti, lui a envoyé un  courrier intitulé " Demandes d'explications ". Dans cette lettre à  laquelle nous avons eu accès, il soupçonne le MJS de Moselle d'avoir financé un déplacement de Benoît Hamon à l'université de Lorraine en novembre  2017. La  présidente du MJS réfute ces accusations. En ce qui concerne la fédération de Moselle, celle-ci " s'est proposée de porter la facture, mais c'est une collecte qui a été organisée pour financer l'événement ", assure Mme Lundy. M.  Temal a prévu de lancer très prochainement un audit sur les comptes du MJS.
Comme une provocation de plus, la présidente du MJS va tenir un congrès en région parisienne le week-end des 7 et 8  avril, la même date que celle choisie par le Parti socialiste pour son propre congrès. " Un hasard de calendrier ", assure la dirigeante, même si la coïncidence s'apparente à un coup politique, alors que Benoît Hamon a suivi de très près ce ralliement.
" Je ne veux pas rentrer dans ces histoires, je ne m'occupe pas de cela ", réplique le chef de file de Génération.s. " On voit toujours des grands manitous partout, mais ce n'est pas le cas. Je savais qu'elle réfléchissait, elle est la bienvenue, elle et les gens qui l'accompagnent ", estime l'ancien candidat à la présidentielle. " C'est une opération de déstabilisation orchestrée par Benoît Hamon ", déplore un parlementaire proche de M. Faure. " UNEF un jour, UNEF toujours ! Je vois que M. Hamon est reparti dans des basses manœuvres. Cela manque de grandeur pour un ancien candidat à la présidentielle ", poursuit cet élu.
Relations tenduesRien d'étonnant à ce que le -mouvement fondé et dirigé en  1993 par M. Hamon rejoigne aujourd'hui son mentor historique. L'ancien ministre de François Hollande a toujours gardé un œil sur ce qu'il s'y passait, bien des années après son passage. Le mouvement de jeunesse est également historiquement situé à la gauche du parti. Mais les relations se sont tendues au fil du précédent quinquennat. Le prédécesseur de Mme Lundy, Benjamin Lucas, président du MJS de 2015 à  2018, a lancé une campagne contre la déchéance de nationalité et a manifesté contre la loi El Khomri. " On a vécu une guerre de tranchées pendant deux ans ", se souvient celui qui est désormais permanent de Génération.s.
Et l'ambiance ne s'est pas réchauffée avec l'arrivée de Roxane  Lundy. Lors de sa première participation au bureau national du Parti socialiste, elle a été accusée de triche par François Rebsamen, qui a refusé de s'asseoir à côté d'elle. Les deux instances cohabitaient dans les mêmes locaux Rue de Solférino, mais ne se parlaient plus.
Jeudi soir, devant les militants du Parti socialiste de Lille, M.  Faure, comme s'il anticipait ce départ, a déclaré : " J'ai été l'un des pères de l'autonomie du MJS, mais ce partenariat suppose des rapports de loyauté réciproques. Le moment de la clarification aura lieu lors du congrès. " Il ne croyait pas si bien dire.
Astrid de Villaines
© Le Monde

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