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jeudi 1 mars 2018

Euthanasie : allons plus loin avec une nouvelle loi


1er mars 2018

Euthanasie : allons plus loin avec une nouvelle loi

Un collectif de 156 députés, surtout de la majorité, appelle à réviser la loi Claeys-Leonetti pour mieux encadrer les droits et la liberté de mourir des personnes en fin de vie

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On ne meurt pas bien en France. " Aujourd'hui, l'offre de soins palliatifs ne satisfait pas à la multiplicité des situations individuelles et des souffrances des personnes en fin de vie. Des souffrances accentuées par l'impossibilité pour chacun de " choisir sa fin de vie ". Si quelques progrès ont été enregistrés avec la loi Claeys-Leonetti, force est de constater que celle-ci n'a pas permis d'introduire d'innovations significatives. Il s'est surtout agi de transcrire dans la loi ce qui était déjà acquis par voie réglementaire. Le problème actuel est qu'il manque – et c'est crucial ! – une liberté, un droit au choix. Attendre une évaluation des textes législatifs antérieurs avant de créer un nouveau droit aux malades en fin de vie aurait-il dès lors un sens ? Non ! Quand une lacune est identifiée, elle doit être comblée sans délai.
D'ailleurs, les Français apportent trois preuves de leur désir impatient de l'introduction de ce progrès humaniste. Dans un très récent sondage, réalisé par l'IFOP pour La Croixet le Forum européen de bioéthique, 89  % des Français considèrent important de légaliser l'euthanasie et/ou le suicide assisté. Seulement 11  % des personnes interrogées se satisfont de la législation actuelle. En ce domaine, comme généralement dans les diverses questions de bioéthique, nos concitoyens sont plus avancés et plus en phase avec le progrès que certains responsables, qui apparaissent plus conservateurs ou frileux.
En toute illégalitéDe nombreux Français au stade avancé d'une maladie incurable vont aussi chercher – et obtenir – la délivrance dans l'un ou l'autre des pays ayant déjà légiféré sur cette possibilité (Belgique, Suisse, Pays-Bas, Luxembourg, Canada, plusieurs Etats américains, etc.). Un malade en fin de vie, dans une " impasse thérapeutique ", peut obtenir une aide active à mourir dans les hôpitaux français. Ces euthanasies sont pratiquées en toute illégalité. Il faut pour cela connaître un médecin compatissant et courageux, ce qui crée des inégalités entre nos concitoyens. D'après l'Institut national d'études démographiques, entre 2 000  et 4 000  personnes en phase terminale reçoivent cette aide chaque année dans notre pays.
Reconnaissons que ces fins de vie organisées en catimini, du fait de l'absence d'encadrement légal, exposent à toutes les dérives, telles que des décisions par une équipe soignante sans sollicitation de l'avis du malade. A l'opposé, des malades implorent ce soulagement, mais ne sont pas entendus. Il est des personnes qui, en raison de convictions personnelles, refusent pour elles-mêmes tout recours à l'aide à mourir.
Cela est très respectable. Comme aussi doit être respectée la " clause de conscience " de certains médecins désirant se soustraire à cette activité, laissant ainsi un de leurs confrères opérer à leur place. Pour d'autres personnes et d'autres professionnels soignants, le choix souverain du malade, son désir de maîtriser son destin s'imposent. Ce choix est tout autant respectable, et l'exercice de ce droit n'enlève rien à personne. C'est le type même de la liberté personnelle qui ne déborde pas sur la liberté d'autrui. Il n'est plus raisonnable d'attendre davantage, d'observer sans réagir les souffrances physiques et psychiques de nombre de ces Français, de compter les affaires judiciaires qui se multiplient mais n'aboutissent à rien, car on ne peut pas condamner la compassion et la solidarité. Anne Bert - qui, en octobre  2017, a reçu, à sa demande, une injection létale dans un service de soins palliatifs en Belgique - clamait : " Il me reste une ultime liberté : celle de choisir la façon dont je vais mourir. " Elle avait raison ! Elle avait également raison d'affirmer que sa " liberté ne s'arrête pas à la porte de l'hôpital ". Comme les autres malades qui lui ressemblent, elle réclamait la correction urgente de la loi française, perçue comme incomplète et non satisfaisante, voire liberticide et inégalitaire. Le choix de la personne doit pouvoir être respecté, quand il est libre, éclairé, soumis à nulle contrainte ou dépression, exprimé de façon réitérée, et que des médecins ont confirmé l'impasse thérapeutique.
Il en va aujourd'hui de cette question comme il en allait de l'IVG au début des années 1970 : des femmes y recouraient en sollicitant les services de la Suisse ou du Royaume-Uni, tandis que d'autres trouvaient des médecins complaisants en France. Malheureusement, celles qui n'avaient pas accès à ces solutions étaient contraintes de faire appel à des faiseuses d'anges et s'exposaient alors à des risques considérables. Les décès de jeunes femmes se comptaient par centaines. Il était temps, en  1975, de sortir de l'hypocrisie des avortements clandestins et d'offrir aux femmes la possibilité de disposer librement de leur corps. De même, il est temps maintenant de sortir de l'hypocrisie qui prive certains d'une aide souhaitée et qui impose à tous une agonie pénible. Il -convient de donner aux malades en fin de vie la libre disposition de leur corps et, c'est essentiel, de leur destin. C'est pourquoi, nous, députés issus d'horizons différents, proposons de légiférer en ce sens au cours de l'année 2018.
Collectif
© Le Monde

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