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samedi 24 mars 2018

A Damas, " tout le monde veut que l'offensive de la Ghouta finisse "


24 mars 2018

A Damas, " tout le monde veut que l'offensive de la Ghouta finisse "

Les habitants de la capitale syrienne ont subi des tirs rebelles meurtriers

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PREMIÈRE ÉVACUATION DE REBELLES
Un premier convoi de combattants rebelles a évacué, jeudi 22 mars, la Ghouta orientale, une première depuis le déclenchement, le 18 février, d'une offensive du régime syrien, déterminé à reconquérir les derniers territoires insurgés aux portes de Damas. Des autobus transportant des combattants d'Ahrar Al-Cham et des civils sont partis de Harasta en direction de la province d'Idlib (Nord-Ouest), conformément à un accord parrainé par la Russie. Raids aériens et tirs d'artillerie ont tué 39 civils, jeudi, dans la Ghouta, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme.
Dans l'est de Damas et ses alentours, non loin de la ligne de front, depuis un mois et le début de l'offensive des forces prorégime contre l'enclave rebelle de la Ghouta orientale, des milliers d'enfants ne vont plus à l'école, ou seulement en pointillé. " De nombreux parents préfèrent garder leurs enfants chez eux, par crainte des violences. Les tirs d'obus par les rebelles, plus ou moins intenses, sont quasi quotidiens à proximité de la Ghouta orientale ", explique Houssam, un habitant de Damas.
" La tension est très forte, la peur aussi. Même si on a connu des périodes plus dures au début de la guerre ",ajoute-t-il. Mardi 20  mars, c'est dans un quartier de Jaramana, une banlieue à l'est de Damas, que s'est produite l'une des attaques les plus meurtrières depuis cinq ans dans la capitale : au moins quarante-quatre personnes ont été tuées par une roquette, alors qu'elles se trouvaient dans une rue commerçante.
Les médias d'Etat ont attribué le tir meurtrier aux " groupes terroristes " de la Ghouta orientale, en référence aux rebelles. L'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) a rendu compte de l'attaque, sans en préciser l'origine ni les auteurs. Cette organisation affirme que les tirs rebelles ont fait des dizaines de morts et des centaines de blessés au cours des quatre derniers mois à Damas et dans ses environs.
Depuis le début de la guerre, Jaramana a déjà été ensanglantée par des attentats ou des tirs d'obus sporadiques. " Mais jamais une attaque à la roquette aussi grave ne s'était produite, insiste Houssam. C'est d'autant plus tragique qu'il s'agit d'une zone où beaucoup de déplacés de la Ghouta orientale ont trouvé refuge au cours des dernières années. Ils vivent l'offensive dans l'angoisse pour leurs proches et pour leur avenir : où pourront-ils bien aller après de telles destructions ? "
" Combat perdu d'avance "Si, dans l'est de Damas, la vie est " paralysée ", selon Houssam, elle poursuit son cours dans le reste de la ville, où les tirs de mortiers sont rares. Le centre de Damas n'a toutefois pas été épargné par les obus lancés sur la capitale, jeudi, qui ont fait septs morts d'après l'OSDH. Les coupures d'électricité ont cessé. Les employés se rendent au bureau, même si l'activité tourne au ralenti. On y vit au son continu des bombardements aériens et des tirs d'artillerie des forces prorégime sur la Ghouta orientale, qui ont fait plus de 1 500 morts parmi les civils depuis le 18 février, toujours selon l'OSDH.
" Tout le monde, dans la capitale, veut que l'offensive se termine au plus vite, affirme Anas, un habitant de Damas. Mais les approches sont différentes : certains déplorent l'intensité du déluge de feu qui s'abat sur la Ghouta orientale, tout en considérant que les insurgés prolongent les souffrances des habitants en refusant de rendre les armes. Car c'est un combat perdu d'avance pour eux. D'autres au contraire, les plus radicaux, veulent que la poche rebelle soit durement matée. "
La reprise de la Ghouta orientale, pour les loyalistes les plus convaincus, sera une nouvelle étape vers la reconquête totale du pays. Ils se félicitent déjà de la victoire à venir. La visite de Bachar Al-Assad sur le front, dimanche 18  mars, les a galvanisés.
" Du point de vue des autorités, il était inconcevable de maintenir une présence rebelle aux portes de Damas. La possibilité que des obus tombent sur la capitale réduisait à néant les efforts du gouvernement pour présenter la ville comme sûre et attirer des investisseurs ", commente un observateur qui se rend régulièrement en Syrie. Les habitants de Damas, eux, confient leur épuisement face à la guerre et leur aspiration à tourner la page. " Mais que va-t-il se passer ensuite, une fois que les combats cesseront ?, se demande, pessimiste, Houssam. La violence à l'œuvre ne fait que nourrir un peu plus la haine. Elle va attiser un cycle de vengeance. "
Laure Stephan
© Le Monde

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