L’ONU dénonce les violations du droit international à Gaza
Abattue, l'ONU. Dans tous les sens du terme. Six jours seulement après le bombardement mortel de l'une de ses écoles à Beit Hanoun dans la bande de Gaza, l'organisation internationale découvrait à l'aube, mercredi 30 juillet, ce que l'un de ses responsables qualifie de « carnage ».
Pour la cinquième fois depuis le début de l'offensive israélienne « Bordure protectrice », une école administrée par les Nations unies abritant des personnes déplacées, a été la cible de tirs, à Jabalia. Bilan : seize morts, dont au moins six enfants.
« Parfois, les mots vous manquent. Nous avons reçu la nouvelle avec choc et désarroi », confiait quelques heures plus tard à la presse, à New York, le numéro 2 de l'ONU, Jan Eliasson.
Quand les tirs ont débuté, avant le lever du jour, plus de 3 300 Palestiniens dormaient dans l'école élémentaire de Jabalia, gérée par l'UNRWA, l'agence des Nations unies pour l'aide aux réfugiés palestiniens. Deux salles de classe ont été frappées de plein fouet par des obus israéliens.
« La nuit dernière, des enfants ont été tués alors qu'ils dormaient à côté de leurs parents sur le sol d'une salle de classe, dans un refuge désigné comme tel à Gaza. C'est un affront pour chacun d'entre nous, une source de honte internationale », s'est insurgé Pierre Krähenbühl, le chef de l'UNRWA, après avoir condamné « dans les termes les plus fermes possibles cette grave violation du droit international ».
« CARNAGE EN COURS »
Comme six jours plus tôt, l'armée israélienne avait été prévenue à plusieurs reprises – 17 fois –, que l'école abritait des civils ayant fui les combats. Des gens à qui Tsahal « avait ordonné de quitter leurs maisons », a précisé le responsable onusien, avant d'appeler « la communauté internationale à agir rapidement pour mettre un terme immédiat au carnage en cours ».
Washington et Paris ont condamné le bombardement. « C'est injustifiable. Les responsabilités doivent être déterminées et justice doit être rendue », a déclaré de son côté le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon. L'armée israélienne affirme que des combattants palestiniens ont tiré au mortier à partir des environs de l'école. Qu'elle n'a fait que riposter.
Selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies (OCHA), 133 écoles ont été endommagées par l'armée israélienne depuis le début du conflit, dont 84 écoles de l'UNRWA. Ces établissements accueillent 204 000 personnes déplacées, sur un total de 240 000, soit 10 % de la population de Gaza.
« Nos écoles ne sont pas des infrastructures adaptées pour l'hébergement de réfugiés » et elles ont atteint leur « capacité maximum », a fait savoir le directeur des opérations humanitaires John Ging. La priorité des acteurs humanitaires est la protection des civils, mais leur propre sécurité pour opérer n'est plus assurée, explique le diplomate, citant la perte de sept employés de l'ONU en 23 jours.
« Si ce conflit avait lieu dans une autre partie du monde, les Palestiniens auraient au moins la possibilité de traverser les frontières pour aller chercher refuge dans des pays voisins. Ils n'ont pas cette option », insiste-t-il, avant de rappeler la « vulnérabilité » des Gazaouis, dont plus de 70 %, en temps normal, dépendent de l'aide alimentaire.
« Etant donné la détérioration de la situation humanitaire, les besoins des gens vont continuer d'augmenter », met en garde la patronne d'OCHA, Valérie Amos, après avoir déploré le bombardement de la seule centrale électrique de Gaza, qui laisse la plupart de ses 1,8 million d'habitants avec seulement deux heures d'électricité par jour.
DES HÔPITAUX SANS ÉLECTRICITÉ NI EAU
« Il s'agit là d'une autre dimension humanitaire qui aura un effet immédiat sur la survie de la population locale », insiste Jan Eliasson, qui explique : sans électricité, impossible de faire fonctionner les pompes à eau dont dépend Gaza, du fait du blocus imposé par Israël. « Comment faites-vous fonctionner des hôpitaux sans électricité, sans eau ? », interroge le haut responsable. « Il arrive un moment où il faut vraiment dire “ça suffit” et trouver les mots pour convaincre ceux qui ont le pouvoir d'arrêter tout cela », ajoute-t-il, consterné.
A la demande de la Jordanie, seul pays arabe siégeant au Conseil de sécurité de l'ONU, une réunion d'urgence sur la situation humanitaire à Gaza devait avoir lieu jeudi 31 juillet.
En dépit de l'obligation faite à Israël – en tant que puissance occupante – de protéger les civils palestiniens et – en tant qu'Etat signataire – de respecter la 4e Convention de Genève de 1949, relative à la protection des civils en temps de guerre, aucun texte condamnant de près ou de loin l'Etat juif n'est à attendre d'aucune des consultations à venir.
A 42 reprises, dans le passé, les Etats-Unis ont posé leur veto à des projets de résolution jugés hostiles à leur allié israélien. Selon des diplomates, le Conseil de sécurité ne devrait pas prendre de décision « contraignante », tant qu'un accord de cessez-le-feu n'aura pas été conclu sur le terrain.
- Journaliste au Monde
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