Tous les détracteurs du président Nicolas Maduro sont convaincus que Fernando Alban a été torturé et qu'il a " été suicidé ". Conseiller municipal à Caracas, âgé de 56 ans, M. Alban est mort, lundi 8 octobre, alors qu'il était aux mains de la police. Il avait été arrêté trois jours plus tôt, dans le cadre de l'enquête sur l'attentat présumé aux drones qui, le 4 août, aurait visé M. Maduro.
Selon les autorités vénézuéliennes, Fernando Alban s'est jeté par la fenêtre alors qu'il se trouvait dans les locaux du Service bolivarien de renseignement (Sebin) de la capitale. Mais les versions officielles se contredisent. Le chef de l'Etat garde le silence. La communauté internationale s'inquiète. L'ambassadeur du Venezuela à Paris a été convoqué, jeudi, au ministère des affaires étrangères, qui a exprimé dans un communiqué sa volonté que
" la lumière soit faite sur ce décès au travers d'une enquête impartiale et indépendante ".
Au vu
" des informations contradictoires sur ce qui s'est passé ", les Nations unies ont réclamé, mardi, une enquête impartiale sur les circonstances de la mort tragique de l'opposant. L'Organisation des Etats américains, l'Union européenne, le département d'Etat américain, Amnesty International ont fait de même.
" Il est du devoir de l'Etat d'assurer la sécurité et l'intégrité physique de toutes les personnes en détention ", a rappelé Maja Kocijancic, porte-parole de la chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini. M. Alban a été enterré, mercredi, à Caracas. Des centaines d'opposants ont suivi le cortège funéraire en réclamant
" justice ".
" Régime tortionnaire "Interviewé au téléphone par une chaîne de télévision juste après l'annonce du décès de M. Alban, le procureur, Tarek William Saab, expliquait, lundi :
" Le citoyen a demandé à aller aux toilettes et une fois là-bas, il s'est jeté dans le vide depuis le dixième étage. " Quelques heures plus tard, le ministre de l'intérieur, de la justice et de la paix, Nestor Reverol, écrivait sur son compte Twitter :
" Au moment où le détenu, qui se trouvait dans la salle d'attente du Sebin, allait être déféré au tribunal, il s'est lancé par la fenêtre dans le vide. Sa chute a causé sa mort. "
Mercredi, M. Saab a corrigé sa version en précisant que Fernando Alban ne s'était pas jeté des toilettes du Sebin mais
" du couloir y conduisant ". Entre-temps, l'avocat de M. Alban, Jœl Garcia, avait rappelé à la presse que les toilettes du Sebin ne comportent pas de fenêtre.
" Mort asphyxié "Pour les opposants, c'est un assassinat.
" Nous tenons pour responsables Maduro et son régime tortionnaire. Nous exigeons la vérité ", dit le communiqué du parti d'opposition Primero Justicia (PJ, droite) dont M. Alban était membre.
" Tous ceux qui ont connu Fernando savent qu'il n'aurait jamais mis fin à sa vie ", a précisé l'ancien candidat à la présidentielle de PJ, Henrique Capriles.
M. Alban était catholique et très fervent pratiquant. L'archidiocèse de Caracas a également émis un communiqué :
" L'information donnée aujourd'hui par le procureur nous laisse perplexes. La thèse du supposé suicide, qui n'est pas étayée par une enquête profonde et objective, nous remplit de doute. "
" J'ai des informations pour affirmer que M. Alban est mort asphyxié ", a affirmé Luisa Ortega, l'ancienne procureure générale de la République, qui vit en exil. L'opposant Julio Borges, qui dit avoir été contacté par des employés du Sebin, a corroboré ses dires.
" Le corps de Fernando Alban était sans vie quand il a été jeté par la fenêtre ", a déclaré l'ancien président du Parlement exilé depuis peu à Bogota.
Une vingtaine de personnes – dont un général – ont été arrêtées dans le cadre de l'enquête sur l'attentat présumé du 4 août. Ce jour-là, l'explosion de deux drones interrompait une cérémonie militaire présidée par Nicolas Maduro, blessant sept personnes. Le gouvernement accuse Julio Borges d'en être le commanditaire. Depuis qu'il est au pouvoir, M. Maduro ne cesse de dénoncer les velléités assassines de l'opposition alliée de Washington.
Marie Delcas
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