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samedi 24 mars 2018

Trump lance son offensive contre la Chine.....Pékin riposte avec une première salve de taxes......


24 mars 2018

Trump lance son offensive contre la Chine

Le représentant américain au commerce, Robert Lighthizer, devra présenter d'ici quinze jours une liste de produits à taxer à hauteur de 25 %

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L'Afghanistan économique de Donald Trump. " L'expression appartient à Adam Posen, président du très réputé -Peterson Institute, qui prédit un désastre pour le président américain enlisé dans ses guerres commerciales. " Coûteuses, incertaines et sans résultat ", diagnostique M.  Posen.
A commencer par celle menée contre la Chine, alors que M.  Trump a comme prévu annoncé, jeudi 22  mars, 60  milliards de dollars (48,5  milliards d'euros) de sanctions commerciales contre Pékin, faisant perdre dans la foulée à l'indice Dow Jones près de 3  %. Un recul, mais pas un effondrement, qui montre que les marchés ne croient pas (encore) à une guerre commerciale totale digne de celles des années 1930.
Une explication ? Ce jeudi, une autre guerre s'embourbait : celle de l'acier et de l'aluminium, lancée en fanfare le 1er  mars, dont les importations allaient être taxées " pour longtemps ", selon M.  Trump. Censée rapporter 9  milliards de dollars, elle était de ces " guerres commerciales faciles à gagner ", avait dit le président.
Mais en pleine renégociation de l'Accord de libre-échange nord américain (Alena), M.  Trump a  d'abord signé un armistice avec le Canada et le Mexique, puis a fini par exempter jusqu'au 1er  mai des pays amis comme ceux de l'Union européenne (UE), le Brésil, la Corée du Sud. Bref, ne restent que deux ennemis, la Russie et la Chine, cette dernière ne fournissant toutefois plus que 2,2  % des importations américaines d'acier, tant les Américains ont bloqué leur marché aux surplus chinois.
Angoisse existentielleSi elle est passée des mots aux actes en  2018, l'administration Trump continue d'être désordonnée, sans alliés précis ni buts de guerre, si ce n'est la réduction des déficits commerciaux. Ce constat conduit, sinon à tempérer, du moins à contextualiser les annonces martiales de la Maison Blanche contre " l'agression économique de Pékin ".
Selon M. Trump, le déficit commercial avec la Chine – qui a atteint 375  milliards de dollars en  2017 – est " hors de contrôle ". Les démarches entreprises depuis quinze ans par les présidents Bush, Obama et lui-même pour faire infléchir Pékin ont échoué. M.  Trump passe à l'action, même s'il le fait en " ami " et a pris soin de rappeler son " respect " pour le président Xi Jinping. Il veut que la Chine réduise de 100  milliards de dollars son déficit commercial.
Les Etats-Unis reprochent à la Chine de forcer les entreprises américaines à transférer leurs technologies vers les sociétés chinoises pour pouvoir s'implanter dans ce pays, ce qui n'est guère contesté. Pékin est aussi accusé de racheter les firmes américaines pour les piller et s'assurer d'une domination dans les technologies du futur, et même de les voler via le cyberhacking. Selon l'agence spécialisée FireEye, le cyberespionnage d'Etat contre les entreprises a  toutefois beaucoup régressé depuis un accord scellé entre Barack Obama et Xi Jinping en septembre  2015.
Cette crise révèle une angoisse existentielle, celle de la montée en puissance de l'économie chinoise, en passe de dépasser celle des Etats-Unis. " Si la Chine domine l'industrie du futur, il sera très dur pour les Etats-Unis d'avoir un futur ", a commenté un responsable de la Maison Blanche, tandis que le vice-président Mike Pence a ainsi résumé l'affaire : " Le temps de la capitulation économique est passé. "
Les transferts de technologie en questionLes principes de la riposte ont été énoncés, mais les mesures n'entreront pas en vigueur avant deux mois. Le représentant américain au commerce, Robert Lighthizer, est invité à  présenter d'ici à  quinze jours une liste de produits à taxer à hauteur de 25  %. Leur nombre devrait être de l'ordre de 1 300, dans les domaines où la quête chinoise de savoir est intense : aéronautique, technologies de l'information, machines-outils. Puis s'ouvrira une période de trente jours, avec des auditions publiques et des commentaires.
La guerre de l'acier a mis en branle tous les lobbys américains, opposés à la mesure dans leur immense majorité. L'offensive contre la Chine devrait mobiliser tout Washington. La mise en œuvre de la taxation aura lieu au plus tôt en mai, mois où Donald Trump est censé rencontrer le leader nord-coréen Kim Jong-un. Comme pour l'acier, rien n'est définitivement scellé.
Deuxième axe, les acquisitions d'entreprises américaines par les Chinois. Celles-ci sont contrôlées par le comité sur l'investissement étranger aux Etats-Unis (CFIUS). Cet organisme qui examine les enjeux de sécurité nationale est débordé, et le Congrès envisage d'élargir ses prérogatives aux intérêts purement économiques. En attendant, le département du Trésor a  deux mois pour présenter des propositions pour agir plus efficacement. Toutefois, les acquisitions chinoises ont baissé d'un tiers en  2017 et elles sont en perte de vitesse, avec la multiplication des veto, officiels ou non, de l'administration Trump.
Troisième axe, l'Organisation mondiale du commerce (OMC), que les Etats-Unis vont saisir concernant les transferts de technologie. Sujet décisif mais de long terme, qui peut entraîner une condamnation de la Chine – les Américains auraient satisfaction, ce qui est jugé improbable par les spécialistes — ou pas : cette issue impliquerait que Washington demande une renégociation des règles de l'OMC et des conditions dans lesquelles la Chine y a adhéré en  2001.
" Le PC chinois ne va pas capituler "Soucieux de trouver des alliés pour contrer les Chinois, les fonctionnaires américains invoquent soudain une déclaration commune faite avec le Japon et les Européens en décembre  2017. Comme l'estime M. Posen, du Peterson Institue, " le Parti communiste chinois de Xi Jinping ne va pas capituler face aux menaces unilatérales de Trump ".
Cette invocation de l'OMC rend les Européens dubitatifs, qui partagent une partie des griefs contre Pékin mais craignent un sabordage de l'OMC par les Américains. Ils sont de plus échaudés par la guerre de l'acier. L'exemption accordée est-elle définitive, provisoire, destinée à  renégocier des accords plus favorables aux Etats-Unis ? C'est ce que répète Trump, qui a de nouveau vilipendé l'UE (qui a " de très fortes barrières tarifaires "), l'Alena (" un très mauvais accord "), le traité avec la Corée du Sud (" très déséquilibré "), ainsi que l'OMC, dont les panels d'arbitrages sont " inéquitables ". Un activisme qui risque d'entraîner tous ses partenaires dans son " Afghanistan économique ".
Arnaud Leparmentier
© Le Monde

24 mars 2018

Pékin riposte avec une première salve de taxes

La Chine n'a " pas peur d'une guerre commerciale ", a prévenu le ministère du commerce. Les investisseurs s'inquiètent eux d'une escalade

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Pékin n'a pas attendu longtemps pour réagir à l'offensive commerciale déclenchée par Donald Trump, qui a annoncé des taxes sur 60  milliards de dollars de produits importés par les Etats-Unis. Avant 9 heures, vendredi matin, le ministère du commerce a publié une liste de droits de douane qu'elle pourrait imposer sur des importations de produits américains représentant 3  milliards de dollars.
Des taxes suspendues à la réaction américaine : pour l'instant, Pékin menace, mais ne ferme pas la porte à une solution négociée. " La Chine ne veut pas d'une guerre commerciale, a indiqué le ministère du commerce, dans un communiqué. Mais la Chine n'a en aucun cas peur d'une guerre commerciale. " En d'autres termes : " La Chine est prête pour une guerre commerciale. Est-ce que celle-ci va éclater ? Cela dépend des Etats-Unis ", expliciteMei Xinyu, chercheur à l'Académie chinoise du commerce international et de la coopération économique, un think tank du ministère du commerce chinois.
La liste chinoise des importations frappées de droits de douanes contient surtout des produits alimentaires : vin, éthanol, fruits, noix, ginseng. En tout, 120 produits seraient taxés à 15  %, si Pékin ne parvient pas à une solution négociée avec les Etats-Unis. Ces marchandises ont représenté un milliard de dollars (soit 810  millions d'euros) en Chine en  2017. Dans un second temps, " après avoir évalué l'impact des mesures américaines sur la Chine ", Pékin appliquerait une taxe de 25  % sur un deuxième groupe de huit produits, principalement le porc et l'aluminium recyclé, dont la Chine a importé l'équivalent de 2  milliards de dollars de marchandises.
Les Bourses chinoises ont accusé le coup, les investisseurs s'inquiétant de cette escalade : Shanghaï a chuté vendredi de plus de 3  % en clôture, tandis que Shenzhen, deuxième place de Chine continentale, plongeait de presque 4,5  %.
" Un moyen de pression "En Chine, tout le monde semble espérer que les annonces de Trump se limitent à des rodomontades. " Une guerre commerciale infligerait de graves blessures aux deux pays et personne n'en sortirait gagnant. Mais les menaces de Trump semblent surtout être un moyen de pression sur la Chine ", estimeMei Xinyu. Si les Etats-Unis mettaient leurs menaces à exécution, la Chine réagirait avec des droits de douanes bien plus larges, les mesures annoncées vendredi constituant en fait la réaction à la précédente salve de taxes américaines, sur l'acier et l'aluminium. " Le but de cette mesure, c'est de décourager les Etats-Unis de continuer. Mais ce n'est que la première étape ", précise Mei Xinyu.
Dans une tribune publiée vendredi, et largement partagée sur les réseaux sociaux, ce chercheur a détaillé les réactions possibles en cas d'application des taxes américaines. Il préconise des attaques ciblées, contre Trump et ses alliés : en visant les industries et productions importantes dans les régions pro-Trump des Etats-Unis, par exemple. On pense au soja, l'un des principaux produits américains importé par la Chine, pour 14  milliards de dollars, en  2017.
La Chine avait tenté jusqu'au dernier moment de désamorcer la crise. A la fin de la session de l'Assemblée nationale populaire, mardi 20  mars, le premier ministre chinois Li Keqiang avait promis la fin des transferts de technologies dans l'industrie. Ces transferts, souvent imposés à des entreprises étrangères souhaitant accéder au marché chinois, ont permis à certains secteurs industriels locaux, comme dans le secteur ferroviaire, de se développer rapidement.
Simon Leplâtre
© Le Monde


24 mars 2018

L'économie chinoise devrait pouvoir encaisser le choc des sanctions américaines

Pékin a plus à perdre que les Etats-Unis d'un conflit commercial, mais son économie est moins dépendante du commerce extérieur que par le passé

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LES MARCHÉS ASIATIQUES S'INQUIÈTENT
Comme à Wall Street la veille, où le Dow Jones a perdu 2,93  %, la peur d'une guerre commerciale entre la Chine et les Etats-Unis a fait plonger les Bourses asiatiques vendredi 23  mars. A Tokyo, l'indice Nikkei a plongé de 4,5  %. L'indice composite shanghaïen a abandonné 3,39  %, et celui de Shenzhen, 4,49  %. " Lorsqu'une guerre commerciale est sur le point d'éclater entre les deux plus grandes économies mondiales, qui ne s'inquiète pas de l'impact que cela aura sur l'économie réelle ? ", commentait Norihiro -Fujito, responsable de la stratégie investissement chez Mitsubishi UFJ Morgan Stanley Securities. Le recul était plus modéré en -Europe en début de séance. A Paris, l'indice CAC 40 se dépréciait de près de 1  % à l'ouverture, tout comme le DAX à Francfort et l'indice FT 100 à Londres.
Des menaces, quelques avertissements chiffrés et toujours beaucoup de zones floues… Tancée par le président américain Donald Trump, jeudi 22  mars, la Chine va devoir tenter d'évaluer ce qu'il lui en coûtera si les Etats-Unis passent à l'acte et engagent contre elle des mesures commerciales punitives.
Washington dit se tenir prêt à imposer des droits de douanes à hauteur de 25  % sur un maximum de 50 à 60  milliards de dollars (41 à 49  milliards d'euros) d'importations chinoises. Un dommage que la deuxième puissance économique mondiale devrait pouvoir digérer. Ce montant – dans le haut de la fourchette – correspond à un huitième des exportations chinoises vers les Etats-Unis et 2,6  % de l'ensemble des exportations du géant asiatique, toutes destinations confondues.
" Les taxes annoncées ne représentent pas plus qu'une tape sur les doigts de la Chine ", juge ainsi dans une note Mark Williams, du cabinet d'analyse Capital Economics. " Leur impact sur l'économie au sens large sera à peine perceptible ", affirme l'économiste, qui calcule que les dégâts infligés ne dépasseront guère 0,1  % du produit intérieur brut (PIB). A condition que l'escalade soit évitée. Bref, que l'affrontement ne dégénère pas en véritable guerre commerciale. La plupart des spécialistes estiment que l'application de ces taxes entraînera une riposte chinoise relativement contenue.
Beaucoup de choses peuvent encore évoluer au cours des deux mois prévus avant l'entrée en vigueur de ces barrières tarifaires. Cette période de consultation laisse augurer des marchandages en tout genre de la part du plus important lobby chinois : celui des milieux d'affaires américains. Ceux-là devraient œuvrer pour exclure une série de produits de la liste des importations ciblées, dont le détail doit désormais être précisé.
Vers une solution négociée ?De fait, bon nombre de biens made in China  contiennent de la valeur ajoutée américaine, et bien des secteurs aux Etats-Unis se fournissent en composants chinois importés. Sans compter les industriels qui dépendent du marché asiatique et redoutent de faire les frais des représailles -chinoises.
Les annonces de Washington contre Pékin risquent-elles alors de connaître la même fin que les promesses de droits de douane sur les importations américaines d'acier et d'aluminium ? Les plus gros fournisseurs des Etats-Unis, menacés de taxes unilatérales, ont obtenu des exemptions, pour l'instant temporaires.
En attendant d'en savoir plus, la Chine montre ses muscles tout en dosant finement sa réplique. Son économie est moins dépendante du commerce extérieur que par le passé. Mais, " dans l'hypothèse d'une situation qui dégénère, elle a beaucoup plus à perdre que les Etats-Unis ", affirme Julien Marcilly, chef économiste de l'assureur-crédit Coface. Les exportations américaines vers la Chine ne représentent que 0,5  % du PIB américain. A contrario, les exportations chinoises vers les Etats-Unis équivalent à 5  % du PIB de l'ex-empire du Milieu.
Soucieux de désamorcer les tensions, Pékin pourrait pousser à une solution négociée. Mais laquelle ? Donald Trump ne cesse de dénoncer le déficit commercial abyssal que les Etats-Unis enregistrent vis-à-vis de la Chine. Celui-ci s'est élevé, en  2017, à plus de 375  milliards de dollars pour les seuls échanges de marchandises. Jeudi, le président américain a répété sa requête " de réduire ce déficit de 100  milliards de dollars immédiatement ".
L'exigence semble impossible à satisfaire, quand bien même Pékin tenterait quelques gestes en augmentant ses achats traditionnels. A titre d'exemple, le soja figure parmi les plus gros postes d'importations chinoises en provenance des Etats-Unis. Il n'a pourtant représenté que 14  milliards de dollars en  2017. Une autre piste serait d'ouvrir davantage le marché chinois aux services, notamment financiers. La borne des 100  milliards n'en paraît pas moins toujours hors de portée.
Du point de vue chinois, l'Amérique est d'ailleurs la principale responsable de son déficit. De son côté, Pékin a réduit son gigantesque excédent commercial, passé sous les 3  % du PIB, contre 10  % en  2007. Un rééquilibrage dont n'ont pas profité les Etats-Unis, qui paient une politique économique résolument tournée vers le soutien à la consommation. Pékin reproche aussi à Washington de restreindre l'exportation vers la Chine de technologies de pointe. Le pays ne peut se contenter d'importer toujours plus de viande de porc, de soja, de pétrole et d'avions Bœing…
Marie de Vergès

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