POLITIQUE - Non, François Hollande ne veut pas essuyer les mêmes critiques qui avaient suivi son départ en vacances l'année dernière. En août 2012, le président s'était vu reprocher ses trois semaines de repos passées au Fort de Brégançon, alors que la France était frappée par la crise de l'euro, les plans sociaux, ou encore la hausse des prix du carburants. Donnant ainsi le sentiment, quelques mois après son investiture présidentielle, qu'il prenait du repos trop rapidement. Message reçu cinq sur cinq, cette fois François Hollande a occupé le terrain. Au sens propre.
Clichy-sous-Bois, la Dordogne, Auch, la Roche-sur-Yon, Marly-le-Roi... En l'espace d'une dizaine de jours, François Hollande s'est beaucoup agité. Avec un leitmotiv: l'emploi. Alors que le chômage atteignait 10,8% en juin dernier, que la Banque de France ne prévoit pas plus de 0,1% de croissance au 3e trimestre 2013 et que le FMI encourage la France de changer de méthode en matière de politique économique. Ce que ne manque pas de rappeler le député-maire UMP Claude Goasguen au chef de l'Etat, qu'il accuse de "faire le camelot"
Beaucoup de discours mais peu d'annonces
Mais peu d'annonces concrètes sont sorties de la bouche du Président de la République. En Dordogne, le chef de l'Etat a rappelé son opposition aux OGM du maïs transgénique MON810 conçu par le géant Mosanto, alors que le Conseil d'Etat venait d'annuler l'arrêté du mars 2012 qui autorisait sa mise en culture ; et annoncé un plan de revalorisation des retraites agricoles, qui selon lui seront assurées d' "une pension dans les trois prochaines années, qui atteindra au moins 75% du SMIC". Une de ses promesses de campagne, qui n'avait toujours pas vu le jour.
A Clichy sous-Bois, François Hollande a symboliquement présidé à la signature d’un contrat d'"emploi franc" avec un jeune habitant de la commune. Ce mécanisme de soutien à l’emploi des jeunes issus des quartiers défavorisés correspond à une aide de 5.000 euros, versée en deux fois à toute entreprise embauchant en CDI un jeune de moins de 30 ans au chômage depuis plus d’un an et résidant dans une zone urbaine sensible (ZUS). A Auch, "compte tenu du succès" de ce dispositif, il a annoncé le doublement de ces emplois francs (de 2500 à 5 000) pour l'année 2013.
A La Roche-sur-Yon, François Hollande a mis l'accent sur les emplois vacants qui demeurent en France, faute de main d'œuvre qualifiée. Comme un air de déjà-vu. En juillet dernier, lors d'un déplacement à Dunkerque, le chef de l'État avait annoncé qu'il y aurait 100.000 formations pour les emplois non pourvus, d'ici à 2014, dont 30 000 dès la fin de cette année 2013. D'après le gouvernement, le pays compte 200.000 à 300.000 emplois vacants.

Hollande fait du Sarkozy
A l'heure actuelle, il est encore trop tôt pour connaître l'incidence de ces déplacements répétés sur l'opinion. Selon Jérôme Fourquet, directeur du Département opinion publique à l'IFOP, contacté par Le HuffPost,"si les Français peuvent juger positivement cette séquence, on peut douter que cela améliore la popularité du Président de la République de manière spectaculaire dans les semaines et mois qui viennent. Quelque part pour François Hollande, l'idée c'est de ne pas prendre de buts et non de marquer des points."
Mais la méthode rappelle celle de Nicolas Sarkozy. Pourtant, François Hollande et d'autres membres du PS avaient été les premiers à critiquer l'activisme sarkozyste, de cette surexposition médiatique. D'après Jérôme Fourquet, l'épisode de Brégançon l'an passé a modifié sa stratégie du chef de l'Etat. "Alors que la crise devenait de plus en plus préoccupante aux yeux de nos concitoyens, le couple présidentiel était en vacances et en baignade à Brégançon. Le télescopage de ces deux réalités avait été très dévastateur dans l’opinion publique", analyse-t-il pour Le HuffPost.
D'après lui,"François Hollande et son équipe de communication avaient alors touché du doigt le fait que, si Nicolas avait imprimé ce rythme effréné, c'était certes par tempérament, mais aussi peut-être pour répondre à un changement du rythme politique qui s'était considérablement accéléré ces dernières années, avec la mise en place du quinquennat, l'émergence des chaînes d'info en continu, les réseaux sociaux... Fort de ces enseignements, progressivement, François Hollande a donc changé de braquet, faire preuve de réactivité et se montrer mobilisé."

La carte des déplacements de Hollande:

Afficher La tournée de François Hollande pour l'emploi sur une carte plus grande
La vieille recette qui a fait son succès
En revanche, autant que possible, François Hollande, au plus bas dans les sondages, (27% / sondage IFOP pour le JDD-juillet 2013), s'adonne à son plaisir des déambulations. Une de ses armes de campagne favorites lors de la dernière présidentielle. Alors le chef de l'Etat part à la rencontre physique des Français, leur sert la main, leur fait la bise,se prête au jeu des photographies... Au risque de tomber sur un os: lors de son déplacement le Président s'était fait interpeller par Nathalie, 52 ans, chômeuse de longue durée.

Nathalie qui pour l'heure, malgré le récent concours de l'Elysée, doit se contenter d'un contrat aidé, rémunéré à hauteur de 500 € par mois. D'ailleurs, celle-ci a un nouveau message à adresser au Président de la République :

Direction La Lanterne plutôt que le Fort de Brégançon
Le Président Hollande prend donc du repos. Il se rendra à La Lanterne, pavillon de chasse qui jouxte le château de Versailles. Fini, le Fort de Brégançon, dans lequel le chef de l'Etat se sentait "enfermé", comme il l'avait récemment confié lors d'un dîner avec les journalistes de l'association de la presse présidentielle. Passage de relais à Jean-Marc-Ayrault, qui signe son retour à Matignon dès le lundi 12 août.
En se rendant dans le pavillon de chasse, François Hollande brise la symbolique de ses vacances à Brégançon. "La Lanterne présente l'avantage d'être à proximité de Paris. En cas d'urgence, il peut donc regagner la capitale à tout instant, commente Jérôme Fourquet. De plus, ce n'est pas en bord de mer et, même s'il y a une piscine, tout cela est à l'abri des caméras et des regards. Donc normalement, on ne devrait pas avoir de photos d'un président en maillot de bain. C'est un avantage indéniable par rapport à la séquence de l'été dernier."
Même si, comme il le disait ce jeudi à Marly-le-Roi, "le chômage ne prend pas de vacances", François Hollande prendra tout de même 8 petits jours. Deux semaines de moins qu'en 2012, pour éviter la polémique. Pourtant, dans l'histoire présidentielle, du général De Gaulle à François Mitterrand, les chefs de l'Etat prenaient trois semaines de vacances en moyenne. Et parfois loin de France, comme Valéry Giscard d'Estaing, adepte des longs safaris au Gabon, ou en Centrafrique.
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