Translate

jeudi 1 novembre 2018

La coalition de Merkel ébranlée par les élections en Bavière - le 16.10.2018


16 octobre 2018

La coalition de Merkel ébranlée par les élections en Bavière

agrandir la taille du texte
diminuer la taille du texte
imprimer cet article
 Les conservateurs de la CSU ont subi un échec électoral retentissant, dimanche 14 octobre, en Bavière, en perdant leur majorité absolue dans la région
 Ce recul fragilise encore la grande coalition d'Angela Merkel, déjà minée par les divergences incessantes avec la CSU
 Le mauvais score des sociaux-démocrates du SPD affaiblit le flanc gauche de la coalition, tandis que l'extrême droite fait son entrée au Parlement régional avec plus de 10 % des voix
Page 2 et éditorial page 24

16 octobre 2018

La coalition allemande en mode survie

Le gouvernement Merkel sort ébranlé des élections en Bavière, où la CSU perd sa majorité absolue

agrandir la taille du texte
diminuer la taille du texte
imprimer cet article
Bien sûr, ce n'était qu'un scrutin régional. Bien sûr, seuls 9,5  millions d'électeurs – sur les 62  millions que compte l'Allemagne – étaient appelés aux urnes. Mais le séisme politique qui a secoué la Bavière, dimanche 14  octobre, est d'une telle intensité que la grande coalition d'Angela -Merkel, à Berlin, en subira nécessairement l'onde de choc.
D'abord, à cause du revers historique infligé à l'Union chrétienne-sociale (CSU), le parti conservateur bavarois allié à l'Union chrétienne-démocrate (CDU), la formation qu'elle préside depuis 2000. Dimanche, la CSU n'a recueilli que 37,2  % des voix, soit 10,5 points de moins qu'en  2013. Si la plupart des partis européens rêveraient aujourd'hui d'atteindre un tel score, celui-ci est en réalité un cruel camouflet pour les conservateurs bavarois qui, depuis 1958, n'étaient jamais passés sous la barre des 43  % lors d'élections régionales. La formation d'extrême droite, Alternative pour l'Allemagne, a récolté 10,2 %.
Certes, Mme Merkel n'est sans doute pas mécontente du camouflet infligé au président du parti, Horst Seehofer, avec qui elle entretient des relations exécrables, surtout depuis qu'il a rejoint son gouvernement, en mars, comme ministre de l'intérieur. En se trouvant ainsi fragilisé, M.  Seehofer deviendra-t-il pour autant un partenaire plus docile ? Rien n'est moins sûr. Dimanche soir, s'il a admis une " part de responsa-bilité " dans le " mauvais résultat " de son parti, le président de la CSU s'est en effet empressé d'ajouter que " les causes " de ce revers se trouvaient aussi " à Berlin ", sous-entendu à la chancellerie.
Les relations entre la CSU et la CDU risquent donc de se dégrader d'autant plus que s'ajoute désormais un autre facteur, lié à l'avenir de M.  Seehofer lui-même. Dimanche, celui-ci est resté très évasif sur son sort, excluant dans un -premier temps toute perspective d'une retraite anticipée, avant de déclarer qu'il " discuterait volontiers "" le moment venu ", des " questions de personnes ". Le mandat de M.  Seehofer à la tête de la CSU doit s'achever à l'automne 2019, date du prochain congrès. Mais plusieurs responsables du parti estiment qu'il n'a plus la -légitimité pour se maintenir -jusqu'à cette date. Une chose est en tout cas certaine : la guerre de succession a commencé.
" Piètre performance "Même si personne ne s'est pour l'instant risqué à ouvrir les hostilités, le jeu des pronostics est lancé, avec déjà deux noms qui reviennent avec insistance parmi les bons connaisseurs de la CSU : Manfred Weber, chef de file des députés conservateurs au Parlement de Strasbourg, et possible candidat à la présidence de la Commission européenne après les élections de mai  2019, et Alexander Dobrindt, le chef de file des députés bavarois au sein du groupe CDU-CSU du Bundestag, de profil plus droitier que le premier.
Fragilisée sur son flanc droit par une CSU électoralement sonnée, la coalition de Mme Merkel l'est aussi sur son flanc gauche, les élections de dimanche ayant encore aggravé la situation du Parti social-démocrate (SPD). Certes, la Bavière n'a jamais été un bastion du SPD. Certes, les derniers sondages laissaient entrevoir une -défaite cuisante. Mais rares étaient ceux qui avaient imaginé que les sociaux-démocrates passeraient sous le seuil symbolique des 10  %. C'est pourtant le cas : avec 9,7  % des voix, ils reculent de 10,9 points par rapport à 2013.
Le teint blême et la voix blanche d'Andrea Nahles parlaient d'eux-mêmes. Dimanche soir, depuis Berlin, la présidente du parti a ainsi reconnu qu'il s'agissait d'un " très mauvais résultat " pour le SPD, avant d'expliquer que, pour elle, " l'une des principales causes " de cette déroute était " la piètre performance de la grande coalition à Berlin " et l'incapacité de son parti " à se libérer des querelles incessantes entre la CDU et la CSU ".
Le résultat des élections bavaroises pourrait donc rendre également plus rugueuses les relations entre le SPD et ses partenaires de coalition. Ces dernières semaines, plusieurs responsables du parti ont en effet estimé que le temps était venu d'ouvrir un débat sur le maintien ou non du SPD au gouvernement. D'après le " contrat de coalition " qui a été signé en février, une " évaluation " du travail gouvernemental doit être faite au mitan de la législature, c'est-à-dire début 2020. Mais certains souhaiteraient qu'elle ait lieu dès les prochains mois.
A défaut de remettre en cause sa participation au gouvernement – hypothèse peu probable dans la mesure où le SPD, crédité de 16  % à 17  % des voix dans les sondages nationaux, n'a aucun intérêt à provoquer des élections anticipées –, les sociaux-démocrates pourraient se montrer moins accommodants avec la chancelière, eux qui étaient jusqu'alors des alliés beaucoup moins turbulents que les conservateurs bavarois.
Pour Mme  Merkel, les prochaines semaines seront donc compliquées. Le 25  septembre, déjà, elle avait subi un affront personnel avec la défaite inattendue de Volker Kauder, un fidèle parmi les fidèles, qui lui avait succédé à la présidence du groupe CDU-CSU en  2005, quand elle avait été élue chancelière, et avait toujours été reconduit depuis. Le 28  octobre, c'est un autre de ses proches, Volker Bouffier, qui pourrait à son tour essuyer un revers. Candidat à sa réélection à la présidence du Land de Hesse, il est crédité de seulement 29  % des voix. En  2013, la CDU avait recueilli 38,3  % des voix.
Or, c'est dans ce contexte difficile qu'aura lieu le prochain -congrès de la CDU, à Hambourg, les 7 et 8  décembre. Pour l'instant, rien ne semble pouvoir empêcher Mme  Merkel d'être réélue à la tête du parti qu'elle préside depuis dix-huit ans. Mais – et c'est une première – trois " petits " candidats se sont déjà déclarés, un entrepreneur de la Hesse, un professeur de droit public de Bonn, et un étudiant en droit de Berlin. D'autres, avec plus de poids politique, se lanceront-ils à leur tour ? Aucun, parmi les bons connaisseurs de la CDU, ne se risque à une prédiction.
Professeur de science politique à l'université de Trèves, Uwe Jun considère, comme beaucoup, que " rien ne se passera à l'intérieur de la CDU avant les élections dans la Hesse ". Il n'en estime pas moins que le résultat du scrutin bavarois est " un terrible signe de fragilisation pour les -partis de la grande coalition ", la CSU et le SPD ayant perdu 21,4  points à eux deux en l'espace de cinq ans dans ce Land.
Au déclin des deux partis de gouvernement, M.  Jun oppose le succès spectaculaire des Verts qui, avec 17,5  %, ont gagné 8,9 points par rapport à 2013 et deviennent la deuxième force politique de la région. " Les Verts ont renouvelé leur direction cette année, ils ont présenté des candidats jeunes, ils donnent l'impression de vouloir faire de la politique autrement. Leur succès est le signe que les électeurs veulent essayer autre chose, qu'ils souhaitent tourner une page. " Celle, à l'évidence, des années Merkel.
Thomas Wieder
© Le Monde



16 octobre 2018

En Bavière, la CSU recule, les Verts et l'AfD progressent

agrandir la taille du texte
diminuer la taille du texte
imprimer cet article
Franz Josef Strauss était mort une première fois, le 3  octobre 1988. Il est mort une seconde fois, dimanche 14  octobre 2018, à l'occasion d'un scrutin historique qui a liquidé l'héritage et la doctrine de celui que l'on surnommait " le taureau de Bavière ". L'héritage, d'abord. En  1961, quand Strauss a pris la présidence de la très conservatrice Union chrétienne-sociale (CSU), celle-ci était à 45  %. Vingt-sept ans plus tard, à sa disparition, elle dépassait les 55  %. Dimanche, c'est cet âge d'or de la CSU, quand le parti était habitué aux majorités absolues lui assurant une domination sans partage au Parlement régional, que les électeurs ont rejeté. 37,2  % des voix pour la CSU : jamais, depuis 1950, elle n'était tombée si bas.
Avec ce score, Markus Söder, qui dirige depuis six mois l'exécutif régional et souhaite rempiler pour les cinq ans à venir, va donc devoir former une coalition. Arithmétiquement, une alliance avec les Verts, arrivés deuxièmes avec 17,5  %, serait possible. Politiquement, elle serait risquée pour les deux partis, trop opposés l'un à l'autre pour ne pas donner le sentiment de se compromettre en cherchant à s'entendre.
Campagne très droitièreA ce stade, l'hypothèse la plus probable serait un accord avec les Freie Wähler, les " électeurs libres ", un parti conservateur attaché à la défense des intérêts locaux, qui a créé la surprise en recueillant 11,6  % des voix, soit 2,6  points de plus qu'en  2013. Dimanche soir, M.  Söder a laissé entendre qu'il penchait pour cette option, idéologiquement plus cohérente qu'une alliance avec les écologistes. Reste à savoir si elle sera arithmétiquement possible : il n'était pas encore certain dimanche que les deux partis aient à eux seuls la majorité absolue en sièges. Si tel n'est pas le cas, l'appoint du Parti libéral-démocrate, qui devrait dépasser de peu les 5  % nécessaires pour entrer au Parlement, pourrait être utile.
Mais, dimanche, c'est aussi la stratégie de Franz Josef Strauss qui a été dilapidée. " Il n'y a pas de place pour un parti démocratique à la droite de la CSU ", avait affirmé, au milieu des années 1980, celui qui cumulait alors la présidence du parti et celle de l'exécutif régional. La phrase était dirigée à l'époque contre les Republikaner, un petit parti d'extrême droite que la CSU parvint à tenir à l'écart du Parlement bavarois.
Dimanche, malgré une campagne très droitière destinée à siphonner le vote d'extrême droite, la CSU n'a pas réussi à faire avec Alternative pour l'Allemagne (AfD) ce qu'elle avait fait avec les Republikaner. Avec 10,2  % des voix, l'AfD ne fait certes pas la percée qu'elle espérait, sans doute à cause de la concurrence des Freie Wähler, qui ont su capter les déçus de la CSU. Il n'empêche : grâce à ce score, l'AfD siège désormais dans quinze assemblées régionales sur seize. En Bavière, le parti devrait compter 22 élus sur 205. En  2013, sept mois après sa création, l'AfD n'avait pas présenté le moindre candidat.
Th. W.
© Le Monde



16 octobre 2018

Les écologistes profitent du recul des sociaux-démocrates

Dans trois scrutins en Europe, les Verts ont obtenu des scores historiques

agrandir la taille du texte
diminuer la taille du texte
imprimer cet article
AU LUXEMBOURG, LA COALITION DE XAVIER BETTEL CONSERVE LA MAJORITÉ DE JUSTESSE
La coalition sortante, dirigée par le libéral Xavier Bettel, et -associant les socialistes et les écologistes, conserve de justesse la majorité au Parlement luxembourgeois à la suite des législatives organisées dimanche 14 octobre. La formation de M. Bettel a perdu un siège et en compte désormais 12, les socialistes n'en totalisent plus que 10 (– 3), mais, compte tenu de la progression des Verts, l'équipe sortante conserve une courte majorité de 31 députés sur 60. La formation de Jean-Claude Juncker, le Parti populaire chrétien social (droite conservatrice), reste toutefois le premier mouvement du pays, avec 21 sièges, et son leader, Claude Wiseler, a jugé " normal "de revenir au pouvoir.
Avec 17,5  % des voix en Bavière, trois députés supplémentaires au Parlement luxembourgeois et près de 17  % des voix aux municipales à Bruxelles, les Verts européens ont connu une journée électorale euphorique, dimanche 14  octobre. Tout au long de la soirée, les principaux responsables écologistes du continent ont jubilé sur les réseaux sociaux, avec dans leur viseur les élections européennes de mai  2019, traditionnellement favorables à leur formation.
" L'écologie politique a gagné, on ne pourra plus faire de la politique comme avant ", a commenté Zakia Khattabi, coprésidente du parti des Verts belges, en citant Nicolas Hulot pour défendre l'idée d'un " vrai projet écologique global ". Dans la région de Bruxelles-capitale, le parti Ecolo a créé la surprise en conquérant plusieurs mairies – il n'en détenait qu'une jusqu'à présent – et en devenant un probable arbitre à Bruxelles.
" Ce résultat historique a montré qu'on peut faire un très bon score quand on ne tombe pas dans une spirale de haine et de rejet mais quand on défend une vision pro-européenne qui offre une vision rassurante de l'avenir au lieu de nourrir les peurs ", a défendu -Katharina Schulze, co-tête de liste des Verts bavarois, où la formation devient le second parti de la région, derrière la CSU, qui perd sa majorité absolue.
" Les écologistes apparaissent comme un vrai refuge par rapport au discours très dur de l'extrême droite ", abonde Yannick Jadot, tête de liste française des Verts pour les élections européennes. A l'en croire, ces victoires sont une traduction de la tendance " Heimat " des écologistes européens, un concept allemand qui vise à promouvoir la préservation des identités et des territoires. " C'est ce côté territoire que nous développons au niveau européen et que je veux développer en France qui permet de trouver une conscience économique, sociale et identitaire, tout en permettant aussi l'ouverture ", affirme l'eurodéputé. Les sondages sont toutefois actuellement nettement moins favorables pour lui, avec un score estimé inférieur à 10  % en France.
Ligne clairement centristeSurfant sur l'effondrement des sociaux-démocrates, les Verts bavarois, belges et luxembourgeois ont gagné sur une ligne clairement centriste. Au Luxembourg, les Verts locaux, qui avaient décidé en  2013, pour la première fois de leur histoire, de s'allier aux libéraux pour gouverner, sont les grands gagnants des législatives, en passant de six à neuf sièges – sur soixante.
Egalement très centristes, les Verts bavarois bénéficient de la déception générée par la " grande coalition " au pouvoir à Berlin. D'après l'institut Forsa, 40 % des électeurs qui disaient vouloir voter pour les Verts avant le scrutin ont voté pour le SPD aux législatives de 2017, tandis que 25  % ont voté pour les conservateurs (CDU-CSU). Face à un gouvernement qui paraît déjà à bout de souffle après six mois d'existence, les écologistes sont parvenus à se réorganiser, en se dotant d'une direction rajeunie et surtout unie, ce qui n'a pas toujours été le cas.
Même tendance pour les Verts belges, qui ont connu, au fil de leur histoire, des résultats en dents de scie : des succès dès 1989 puis en  1999 – l'année de leur première participation au pouvoir fédéral –, suivis de défaites parfois sévères, indiquant qu'ils restent un parti refuge pour bon nombre d'électeurs déçus. Le PS wallon a ainsi perdu globalement 7  points, passant de 32 à 25  %, et le Mouvement réformateur libéral du premier ministre Charles Michel connaît un résultat décevant en de nombreux endroits. Les Verts en profitent d'abord dans les grandes villes, comme à Bruxelles, mais aussi à Anvers, où le parti Grœn atteint le score notable de 18,4  %. En revanche, dans les villes de l'ancien sillon industriel wallon et les communes populaires de Bruxelles, c'est plutôt le Parti du travail (PTB, gauche radicale) qui a fait irruption. Il engrange notamment 15, 8  % à Charleroi et 16,5  % à Liège.
Dérèglement climatiqueLes Verts belges ont aussi largement profité des problèmes récurrents du nucléaire dans le pays, contre lequel ils font campagne. Au Luxembourg, l'action de leurs deux ministres, François Bausch, chargé du développement durable et des infrastructures, et Carole Dieschbourg, qui avait le portefeuille de l'environnement, a été jugée positivement en raison, notamment, des investissements auxquels ils ont procédé pour améliorer la mobilité, avec la création d'un réseau de tramway à Luxembourg ville, 1,6 milliard débloqué pour le réseau ferré et près de 20 millions d'euros pour des pistes cyclables. Le pays s'est aussi doté d'un vaste ensemble de bornes électriques.
En Bavière, les Verts l'emportent également surtout dans les villes. Ils arrivent ainsi en tête avec 30,3  % des voix à Munich, devant les conservateurs de la CSU. Alors que le dérèglement climatique est de plus en plus perceptible, la préoccupation croissante quant aux questions environnementales semble ainsi plus sensible chez les urbains. Dans cette région en situation de plein-emploi, la protection de la nature est citée comme le deuxième sujet le plus important après l'éducation, selon une enquête publiée le 2  octobre par l'institut Infratest Dimap.
Un intérêt confirmé par le succès inattendu de la manifestation organisée à Munich, samedi 6  octobre, à l'appel de 80  associations de défense de l'environnement. Plus de 15 000  personnes y ont participé. Du jamais-vu, dans la région, pour un rassemblement consacré à ces sujets.
Jean-Baptiste Chastand (à Paris), Jean-Pierre Stroobants et Thomas WiedeR
© Le Monde




16 octobre 2018

L'Allemagne, à son tour dans la bataille

agrandir la taille du texte
diminuer la taille du texte
imprimer cet article
Si le résultat des élections bavaroises du 14  octobre est un séisme politique pour Berlin, à l'échelle de l'Europe, déjà tant secouée depuis trois ans, on pourrait l'interpréter comme une réplique. On aurait tort, cependant, d'en minimiser l'ampleur : parce que l'Allemagne est l'Allemagne, parce qu'elle a, depuis l'après-guerre, constitué un pôle de stabilité, parce qu'elle joue un rôle déterminant au sein de l'Union européenne, cette réplique est d'une intensité considérable.
Mais on aurait tout aussi tort de ne voir que les aspects négatifs d'une telle secousse. Trois enseignements principaux peuvent être tirés de l'élection régionale du Land de Bavière. Le premier concerne l'effondrement des partis traditionnels : les chrétiens-démocrates de la CSU, partenaire bavarois de la CDU d'Angela Merkel, accusent une chute historique de 10,5  points par rapport à 2013, même s'ils restent en tête avec 37,5  % des voix ; les sociaux-démocrates du SPD poursuivent, eux, leur descente aux enfers, comme en France, en Italie ou aux Pays-Bas, et passent même sous la barre des 10  % (9,7  %). C'est un phénomène désormais familier en Europe.
Deuxième tendance lourde : l'ascension annoncée du jeune parti d'extrême droite AfD (Alternative pour l'Allemagne), qui a bouleversé le paysage politique outre-Rhin. Avec 10,2  % des suffrages, il ne fait pas un score triomphal, mais il siège désormais dans 15 des 16 Parlements régionaux.
Troisième enseignement : le triomphe des Verts, qui arrivent en deuxième position avec 17,5  % des voix. C'est là, sans doute, la leçon la plus intéressante – et la plus positive – de ce scrutin. Jeunes, résolument pro-européens, pragmatiques et ouverts, les Verts bavarois ont mené une campagne intelligente et volontariste, sous la houlette d'une jeune femme de 33  ans, Katharina Schulze. Leur succès dépasse la préoccupation croissante de la société allemande à l'égard de l'écologie ; il reflète le désir d'une autre façon de faire de la politique et la recherche de nouvelles voies pour résister à la montée du populisme et des extrémismes.
La politique n'est pas morte. Le taux de participation particulièrement élevé (72  %), ce 14  octobre en Bavière, montre que l'exercice du droit de vote reste un -instrument civique privilégié. L'affaiblissement des partis de gouvernement, qui ont fini par perdre leur identité dans d'épuisants compromis de coalitions, au profit de mouvements comme l'AfD ou les Verts qui, eux, affichent leurs convictions ou leurs projets comme marqueurs forts de leur identité, peut aussi être interprété comme un désir de repolitisation de l'électorat.
Cette repolitisation passe par l'offre d'une réelle alternative au populisme et aux extrêmes. Les succès électoraux des Verts le même jour en Belgique et au Luxembourg, confirmant une tendance déjà enregistrée en mars  2017 aux Pays-Bas, ou, sous une autre forme, la victoire d'Emmanuel Macron et d'En marche !, en France, l'an dernier, participent d'une même dynamique, déclinée différemment suivant les spécificités nationales.
Au centre de cette dynamique se trouve le combat pour ou contre la démocratie, les sociétés ouvertes et le projet européen. C'est pour les défendre qu'une manifestation géante et pluraliste a rassemblé plus de 200 000 personnes, samedi, à Berlin, à la veille du scrutin bavarois. L'Allemagne est à son tour lancée dans cette bataille historique. A huit mois d'élections européennes cruciales, c'est une bonne nouvelle.
© Le Monde

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire