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mercredi 4 juillet 2018

Pacte Etat-collectivités : le contrat est rempli à 70 %


3 juillet 2018

Pacte Etat-collectivités : le contrat est rempli à 70 %

Deux tiers des collectivités ont signé l'accord financier pour modérer leurs dépenses de fonctionnement

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En proposant aux collectivités territoriales, fin 2017, de s'engager dans la voie de la contractualisation de leurs relations financières avec l'Etat plutôt que de continuer à subir des baisses de dotations qui les avaient lourdement pénalisées ces dernières années, Edouard Philippe disait vouloir " inventer une nouvelle grammaire ". Depuis six mois, cependant, le gouvernement et les associations d'élus locaux ont eu du mal à conjuguer le même temps, certaines d'entre elles reprochant à l'Etat de vouloir leur imposer l'impératif et choisissant en définitive de camper sur la forme négative.
Malgré ces relations erratiques, le gouvernement, au lendemain du 30  juin, date limite pour valider les contrats négociés avec les préfets, peut montrer une certaine satisfaction. Sur les 322  collectivités territoriales qui étaient concernées par la contractualisation – les régions, départements, communes, métropoles et intercommunalités dont les dépenses de fonctionnement excèdent 60  millions d'euros par an, représentant à elles seules plus des deux tiers de l'ensemble des dépenses de fonctionnement locales –, 228, soit 70  %, en ont accepté le principe.
Dans le détail, selon le communiqué publié dimanche 1er  juillet par Matignon, 121  maires (83  % des maires concernés), 35  présidents d'agglomération ou de communauté urbaine (83  %), 20  présidents de métropole (95  %), 43  présidents de conseil départemental (44  %) et 9  présidents de conseil régional (53  %) se sont engagés. S'y ajoutent 16  collectivités volontaires, qui n'étaient pas ciblées et ont néanmoins souhaité entrer dans le dispositif.
Concrètement, sur quoi repose cette contractualisation inscrite dans la loi de programmation des finances publiques 2018-2022 ? Tout d'abord, sur un objectif d'évolution des dépenses réelles de fonctionnement, fixé à 1,2  % par an en moyenne pour l'ensemble des collectivités territoriales sur la durée de la mandature. Un effort qui représente une économie globale de 2,6  milliards d'euros par an, soit 13  milliards d'euros sur la durée du quinquennat. Depuis 2014, les dépenses de fonctionnement des collectivités ont enregistré une progression annuelle moyenne de 1,5  %. Cette contractualisation prévoit également une amélioration de leurs capacités de désendettement.
Seules, toutefois, les 322  collectivités entrant dans le champ de la loi étaient appelées à s'engager sous la forme d'un contrat. Pour celles-ci, après négociation avec les représentants de l'Etat, un objectif annuel de dépenses est fixé, tenant compte des contraintes particulières, des évolutions démographiques et autres critères de chacune d'entre elles. Une fois cet objectif validé par les deux parties, il fait l'objet d'une évaluation annuelle. En cas de dépassement, la collectivité signataire est soumise à une pénalité équivalant à 75  % de l'écart constaté. Si elle a respecté l'objectif, elle pourra bénéficier d'une majoration de son taux de subvention pour les opérations d'investissement.
Les collectivités ayant refusé de passer contrat se verront, elles, notifier par le préfet l'objectif prévu d'évolution de leurs dépenses. En cas de dépassement, la pénalité sera de 100  % de l'écart constaté. Si l'objectif est respecté, cela ne leur donne pas pour autant accès aux bonus pour leurs dotations d'investissement. Pour les quelques collectivités s'étant portées volontaires à la contractualisation, ce n'est que du bonus, sans les pénalités.
Changements de piedDepuis le début du processus, l'Association des maires de France (AMF) a manifesté son opposition à cette forme de contractualisation, la considérant comme une atteinte à la libre administration des collectivités locales. A peine 3  % des communes, cependant, sont concernées par le dispositif et 83  % de celles-ci ont délibéré en faveur de la contractualisation. Les régions ont changé de pied à plusieurs reprises. Tantôt hostiles puis mieux disposées, à la faveur des engagements qu'elles avaient cru entrevoir de la part du gouvernement en matière d'apprentissage et de formation professionnelle, puis de nouveau braquées dans une opposition " unanime " quand leurs espoirs ont été déçus avant d'extirper une proposition de " convention-cadre " pour tenter de dissimuler le fait qu'une partie de leurs adhérents préférerait malgré tout passer contrat.
L'Assemblée des départements de France (ADF), qui s'était déclarée favorable au principe de la contractualisation, suspendait toutefois son accord à la résolution de deux dossiers qui pèsent lourdement sur les finances départementales : la prise en charge des mineurs étrangers isolés entrés sur le territoire et le financement des allocations individuelles de solidarité (AIS). Sur le premier point, les départements ont obtenu une révision des conditions de prise en charge qui les a globalement satisfaits.
Sur les AIS, le premier ministre a également formulé des propositions, qu'ils ont jugées insuffisantes. Lors de leur assemblée générale du 20  juin, ils ont ainsi refusé à 77  % de s'inscrire dans le processus de contractualisation. Un revirement qui a suscité chez une partie des membres de l'ADF une profonde incompréhension.
Le gouvernement n'aura pas ménagé sa peine pour faire revenir les récalcitrants sur leur décision. Certaines collectivités ont délibéré jusqu'au dernier moment et quelques départements jusque-là hostiles ont finalement opté pour la voie de la contractualisation, jugeant la position prise par leur bureau plus pénalisante pour eux." Ce sont les riches qui ont eu la peau des pauvres ", confiait le président d'un petit département rural.
" Ceux qui signent ont fait le bon choix, se félicitait Edouard Philippe, vendredi, à l'occasion d'une séance de signatures avec les collectivités d'outre-mer. C'est une logique partenariale destinée à évoluer. Tout n'est pas tout de suite parfait mais je suis convaincu que cela correspond à un besoin. "
Patrick Roger
© Le Monde

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