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mardi 27 mars 2018

Hommage national au gendarme Beltrame......

27 mars 2018

Hommage national au gendarme Beltrame

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 Emotion et recueillement à Trèbes, dans l'Aude, après les quatre morts de l'attaque terroriste du 23 mars
 Un hommage national sera rendu au lieutenant-colonel Arnaud Beltrame, qui s'est livré pour sauver une otage
La droite prétend que l'acte terroriste aurait pu être évité
Pour André Comte-Sponville, le courage n'est rien sans générosité. Et, selon le chercheur Jean-Luc Marret, interdire le salafisme ne réglerait rien
P. 8-9 et Débats p. 20-21
© Le Monde


27 mars 2018

" Il faut aider les gens à vivre ensemble "

Après les attentats de Carcassonne et de Trèbes, les habitants ont rendu hommage aux victimes

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Ce n'est pas un spectacle ! " Les mots traduisent plus la fatigue et le besoin de pouvoir -commencer son deuil qu'une réelle animosité. En larmes, la jeune femme quitte l'église de Trèbes en apostrophant des journalistes un peu trop proches d'elle. Dimanche 25  mars, à la fin de la messe en hommage au lieutenant-colonel Arnaud Beltrame, Christian Medves, Hervé Sosna et Jean Mazières, assassinés par -Radouane Lakdim deux jours auparavant, l'émotion vient de la submerger et des caméras, omniprésentes sur les lieux de l'attaque terroriste depuis trois jours, sont venues capter la scène. En ce jour de recueillement, le demi-frère d'Hervé Sosna – le client abattu dans le Super U –, lui, ne répondra plus aux questions, après avoir accordé des entretiens les jours précédents. " Cela fait quarante-huit heures que l'on me bassine ", dit-il, sans lever le ton mais avec fermeté.
Après deux jours de tourbillon, les Audois expriment désormais l'envie de vivre l'émotion seuls, entre habitants, dans ce terroir de vignes que traversent l'Aude et le canal du Midi. Dimanche matin, les sentiments étaient souvent silencieux, contenus. A moins que l'ampleur du drame de vendredi ne reste encore trop difficile à réaliser. Beaucoup d'habitants n'imaginaient pas qu'une commune rurale puisse être l'objet d'un tel événement dramatique, mais presque tous, à Trèbes, se disent qu'ils auraient pu être au supermarché le jour fatidique.
" Vie ", " tristesse ", " héros "L'après-midi de l'attaque, Lilian et Sylvia Bonnet, main dans la main, sont venus de leur domicile tout proche en marchant jusqu'au lieu de la prise d'otages meurtrière, voir de leurs propres yeux ce que la télévision leur racontait. Comme pour mieux se rendre compte que le terrorisme islamiste venait bien de frapper dans leur petite ville. Face au barrage de gendarmes, ils s'arrêtent un moment. " Je suis espanté comme on dit ici, glisse Lilian. Je m'attendais à tout mais pas à ça. Trèbes, c'est un coin tranquille. "" A la mairie, nous avons un protocole d'urgence, mais il est prévu pour les crues de l'Aude… Jamais je n'aurais pensé que je l'activerais pour une attaque terroriste ", souffle le maire PS, Eric Menassi, dont l'épouse, Samia dirige le Super U.
Parmi les quatre victimes, deux personnalités cristallisent l'émotion. Christian Medves, le boucher du Super U, et Arnaud Beltrame, le lieutenant-colonel de gendarmerie qui a donné sa vie pour sauver la dernière otage, une employée du supermarché retenue par Radouane Lakdim.
Si le gendarme ne vivait dans l'Aude que depuis l'été 2017, le chef boucher était un gars du cru, connu pour ses activités syndi-cales et associatives. A la pizzeria Bellagio, à Carcassonne, on pleure Christian, " un habitué, bon vivant, toujours content ". Samedi, sur le perron de la mairie de -Trèbes où s'est réunie l'équipe du Super U, Jacques, l'autre boucher du supermarché, est sorti fumer une cigarette, larmes aux yeux, pour laisser retomber la pression. " Christian, c'était mon patron, mon ami… Ce matin, c'est encore plus dur qu'hier ", réalise-t-il. Des passants lui donnent l'accolade, le saluent d'un sourire.
Tout au long du week-end, les Audois sont venus déposer des fleurs au pied de la grille du groupement départemental de gendarmerie. Poussés par l'émotion après le décès du lieutenant-colonel Beltrame, mais aussi par le -besoin de venir remercier les militaires pour leur engagement dans ce vendredi noir.
Dans la petite côte qui sort de Carcassonne en direction de Montréal, les voitures se garent où elles peuvent. Des familles entières, enfants et parents réunis, arrivent lentement sous la pluie et s'arrêtent dans un moment de recueillement. Un cœur fluorescent, dessiné par une main d'enfant, entoure le prénom d'Arnaud Beltrame. Autour, d'autres cœurs et les mots " vie "" tristesse "-" héros "… Fabrice Jean est venu en famille pour honorer l'" acte héroïque " : " Qu'est-ce qu'on aurait fait à sa place ? ", s'interroge-t-il.
Antoine Khreiche, médecin, arrive en guidant devant lui ses deux fils Milo, 12  ans, et Gabin, 8  ans, qui portent chacun une fleur : " Je viens avec eux parce que je souhaite leur transmettre les -valeurs que défendait ce gendarme : donner sa vie pour la vie, pas pour la mort. "
Vendredi, dès la fin de matinée, à l'annonce des attaques et alors que l'hypothèse de la présence de plusieurs terroristes restait -plausible, les élèves de Carcassonne et de Trèbes ont été immédiatement confinés dans les écoles primaires comme dans les collèges et les lycées. L'attentat en est devenu encore plus concret pour les parents comme pour les enfants. " Au début, on a cru à un exercice, mais le proviseur nous a dit qu'il y avait un attentat et qu'il fallait qu'on reste dans nos classes. Ils nous ont donné à boire et à manger mais on ne pouvait pas bouger ", témoigne une élève du lycée Jules-Fil de Carcassonne.
L'académie de Montpellier a annoncé la mise en place de cellules d'écoute dans les écoles et le collège de Trèbes dès lundi 26  mars. Les cellules médico-psychologiques ouvertes par la préfecture de l'Aude dès vendredi dans la mairie de Trèbes puis à Carcassonne ont pris en charge 130 personnes en deux jours. Les gendarmes ont multiplié les moments de discussion et d'échange entre eux. " Quand des événements de ce type arrivent, l'institution gendarmerie est resserrée comme une famille, plus que traumatisée. Nous sommes tristes pour nos camarades, mais nous faisons bloc ", assure le colonel Sébastien Gay.
La situation a été tendue autour de la cité Ozanam, où Radouane Lakdim habitait, mais le long de la route reliant Carcassonne à Trèbes, la population est restée très digne durant le week-end. Dès le soir de l'attentat, Eric -Menassi a adressé un message de solidarité et d'union à ses concitoyens : " Si cette attaque nous -appelle à encore plus de vigilance, elle nous invite également à -encore plus de fraternité, en relevant la tête et en ignorant les prêcheurs de la désunion. "
" Il faut continuer à vivre normalement entre nous. Sinon, Daech aura gagné ", résume Amara Rabia, un inspecteur du permis de conduire à la retraite de 70  ans dont les fenêtres de la résidence donnent sur l'arrière du Super U. A la messe de dimanche, le curé de la paroisse, -Philippe Guitart, a tenu à faire passer un message sans ambiguïté : " Il faut éviter tout amalgame, et aider les gens à vivre ensemble, pas malgré les différences mais avec les différences. "
Conséquences économiquesSurmonter les potentielles divisions est une question centrale dans une " petite ville très mélangée " comme Trèbes, selon les mots d'une habitante, mais aussi au-delà des limites de la commune, dans l'agglomération audoise. Abid Bammou, le président de l'association islamique de Carcassonne, est venu assister à la messe à Trèbes, dimanche, avec plusieurs fidèles de la mosquée Salam. Il assure ne pas craindre d'éventuelles représailles contre la communauté musulmane. " Ce n'est pas la peine d'avoir peur, estime-t-il. En France, les gens sont intelligents. On ouvre nos portes à tout le monde. " Sa présence et celle de plusieurs musulmans de Carcassonne et de Trèbes ont été saluées par l'évêque du diocèse de Carcassonne et de Narbonne, Mgr  Alain Planet.
Même s'il est encore trop tôt pour les ressentir, les éventuelles conséquences économiques de l'attaque inquiètent localement. Dans le département, le tourisme est la première activité économique, loin devant la viticulture.
La cité médiévale de Carcassonne, la plus grande d'Europe, est l'un des monuments historiques les plus fréquentés de France, avec près de 2  millions de visiteurs par an. Alors, forcément, on guette déjà les conséquences directes de l'attaque du 23  mars. " On se prépare à un impact notamment sur la clientèle étrangère qui représente 40  % de la fréquentation dans -notre département ", reconnaît Sébastien Pla, qui, à la tête de l'agence de développement touristique départementale, prévoit déjà un plan de communication pour " redonner confiance aux -visiteurs ". Mais pour l'élu régional PS, maire lui aussi d'une -bourgade de l'Aude, la priorité reste ailleurs : " Ce qu'il s'est passé est un énorme choc pour une -petite communauté rurale comme celle-là. Et cela va laisser des traces pendant longtemps " conclut-il, la voix triste.
Yann Bouchez, et Gilles Rof
© Le Monde


27 mars 2018

L'opposition et Manuel Valls mettent la pression sur Macron

Laurent Wauquiez a réclamé le rétablissement de l'état d'urgence et l'expulsion des étrangers fichés S. M. Valls souhaite interdire le salafisme

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La trêve n'aura duré que quarante-huit heures. Alors que les responsables politiques avaient dans leur ensemble fait preuve de retenue après l'attaque de Carcassonne et de Trèbes (Aude), qui a entraîné la mort de quatre personnes dont un gendarme, vendredi 23  mars, l'heure est désormais à l'offensive, du côté de l'opposition mais aussi chez certains élus proches de la majorité. Dans leur collimateur : une supposée faiblesse d'Emmanuel Macron, auquel ils reprochent un manque de fermeté dans la lutte contre le terrorisme islamiste.
Laurent Wauquiez a sorti l'artillerie lourde lundi matin. " Nous avons toujours au plus haut sommet de l'Etat les mêmes paroles creuses et la même absence d'action ", a dénoncé le président du parti Les Républicains (LR), lors d'une déclaration à la presse. Emmanuel Macron, a-t-il ajouté, " ne combat pas le terrorisme qui ronge notre pays, il ne lutte pas contre le communautarisme avec la fermeté qui s'impose ". Face à l'" ennemi intérieur " que représente à ses yeux " la barbarie islamiste ", le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes réclame en conséquence le rétablissement de l'état d'urgence, l'internement des fichés S " les plus dangereux " – ce qu'il propose déjà depuis trois ans – mais aussi l'expulsion des fichés S étrangers. Une position qui le rapproche de Marine Le Pen, qui prône cette mesure de longue date.
La présidente du Front national avait lancé la charge la première, lundi, et demandé sur BFM-TV ces expulsions ainsi que la -déchéance de la nationalité -française pour les fichés S binationaux. Placer en rétention administrative ces personnes, comme le réclame notamment la droite ? " Pour faire quoi ? En -attendant quoi ? ", a interrogé la présidente du Front national. " Le gouvernement attend un commencement d'exécution d'un acte terroriste pour agir ", a-t-elle dénoncé, -réclamant la démission du ministre de l'intérieur, Gérard Collomb.
Plus gênant pour Emmanuel Macron, Manuel Valls a également critiqué en creux un supposé attentisme du chef de l'Etat vis-à-vis de la menace terroriste. " Je pense qu'il faut prendre un acte fort, politique, à caractère symbolique " pour répondre aux attaques de l'Aude, a estimé l'ancien premier ministre, dimanche, sur BFM-TV. Ce pourrait être, selon lui, " une interdiction du -salafisme " en France. " Nos adversaires, ce sont les salafistes, les Frères musulmans, l'islam politique ", a martelé le député de l'Essonne, qui défend une " laïcité de combat " à rebours de la position du président de la République, pour qui " la laïcité ne doit pas être une religion d'Etat qui se substitue aux religions ".
Apparenté au groupe de La République en marche (LRM) à l'Assemblée nationale, même s'il n'est pas adhérent du parti présidentiel, M.  Valls a lui aussi plaidé pour un contrôle accru des personnes fichées S en imaginant placer en " rétention " les plus dangereuses d'entre elles. " Il peut y avoir peut-être, regardons ça de près, les questions liées à la rétention administrative pour ceux dont on considère qu'ils représentent un danger ", a déclaré l'ancien socialiste. Cette mesure était jusqu'ici uniquement réclamée par la droite, notamment par Nicolas Sarkozy, qui l'avait inscrite à son programme lors de la primaire de la droite de 2016. En réalité, le fichier le plus pertinent pour la radicalisation islamiste, c'est le Fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT). Sur 20 000 inscrits, 11 000 sont pris en compte par les services dont environ 3 000 sont suivis par la DGSI car correspondant au " haut du spectre " qui regroupe les individus les plus dangereux.
" La droite joue l'extrême "Invité de l'émission " Les 4 Vérités " sur France 2 lundi matin, Manuel Valls a également estimé qu'" on ne combat pas - le terrorisme - islamiste grâce à l'économie, à la baisse du chômage ", là aussi une critique implicite d'Emmanuel Macron, qui avait estimé après l'attentat du Bataclan en  2015, alors qu'il était ministre de l'économie, que la société française avait " une part de responsabilité " dans le " terreau " du djihadisme, du fait notamment des " fermetures dans notre économie " qui créent de la " défiance ".
Face à ces attaques, l'exécutif -affirme rester serein. " L'Etat a réagi vite, les institutions jouent leur rôle, il faut laisser l'enquête se poursuivre ", assure-t-on à Matignon, où l'on dit regretter que " la droite joue l'extrême " et ne respecte pas " une période de réserve ". " La course consistant à dire qu'il faut toujours aller plus loin à chaque attentat, ce n'est pas un engrenage dans lequel on souhaite se lancer ", ajoute-t-on à l'Elysée. Pour l'exécutif, la loi de sécurité intérieure et de lutte -contre le terrorisme, qui a fait rentrer dans le droit commun des dispositions de l'état d'urgence, comme les assignations à résidence ou les perquisitions administratives, est suffisante.
A entendre l'entourage du chef de l'Etat, il n'est en tout cas pas question de placer des fichés S en rétention administrative, comme le réclament la droite et Manuel Valls. " La France est un Etat de droit où ce ne sont pas des -policiers qui décident d'enfermer qui ils veulent ", explique-t-on à -l'Elysée. " On va en prison quand on est condamné, pas quand éventuellement on est suspecté ", a abondé le secrétaire d'Etat chargé des relations avec le Parlement, Christophe Castaner, interrogé dimanche sur Europe 1.
Pour autant, le président de la République comme le premier ministre ont pris soin depuis vendredi de mettre en scène leur mobilisation, afin de désamorcer tout procès en amateurisme. Après avoir bousculé leurs agendas le jour de l'attaque et multiplié les déclarations, les deux têtes de l'exécutif se sont encore retrouvées à l'Elysée, samedi après-midi, pour un conseil de défense restreint. A l'issue de celui-ci, l'Elysée a annoncé qu'un " hommage national " serait rendu, sans doute cette semaine à Paris, au lieutenant-colonel de gendarmerie Arnaud Beltrame, tué lors de l'attaque du Super U de Trèbes.
Par ailleurs, Emmanuel Macron a " demandé la convocation cette semaine par les préfets de l'ensemble des groupes d'évaluation départementale suivant les individus ayant fait l'objet de signalements pour radicalisation ", a ajouté l'Elysée. Ces groupes rassemblent autour du préfet les services de renseignement, les services de police et de gendarmerie, les parquets ainsi que l'administration pénitentiaire. Ils sont chargés d'évaluer les signalements de radicalisation et de décider, le cas échéant, des mesures de suivi policier. Une première réponse aux attaques de l'opposition.
Olivier Faye, et Cédric Pietralunga
© Le Monde


27 mars 2018

Le gendarme Beltrame tué par arme blanche

L'auteur des attentats évoluait depuis longtemps au contact de milieux radicaux

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Trois jours après les attentats de Carcassonne et Trèbes (Aube), les enquêteurs de la Sous-direction antiterroriste (SDAT) et de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) tentent toujours de comprendre dans quelles circonstances le terroriste Radouane Lakdim, qui était fiché " S " et un temps suivi par les services de renseignement, a élaboré la chevauchée meurtrière qui a fait quatre morts, vendredi 23  mars.
On en sait déjà un peu plus sur les détails du geste du lieutenant-colonel Arnaud Beltrame, qui s'était substitué à une salariée du Super U de Trèbes, dernière otage dont l'héroïsme a été salué notamment par le chef de l'Etat. C'est vers 11 h 30 que le gendarme s'est spontanément constitué prisonnier. Il a alors le réflexe de laisser son portable allumé pendant les trois heures que va durer son tête-à-tête avec le terroriste.
A l'extérieur du magasin, ses collègues entendent Radouane Lakdim se dire prêt à mourir pour la Syrie et réclamer la libé-ration de " frères ", comme Salah Abdeslam. Peu avant 14 h 30, les hommes du GIGN entendent des coups de feu et déclenchent l'assaut.
Le lieutenant-colonel est retrouvé grièvement blessé. Transféré à l'hôpital de Carcassonne, il mourra dans la nuit de vendredi à samedi. Dimanche, les premiers résultats de son autopsie ont révélé qu'il avait succombé à une " blessure gravissime " à la trachée et au larynx, selon une source judiciaire. Le gendarme a également été blessé par balle " au pied et au bras ", précise une source proche de l'enquête. C'est donc un coup de couteau à la gorge qui lui a été fatal. L'ordre dans lequel lui ont été infligées ses blessures permettra sans doute de mieux cerner les circonstances exactes de son exécution.
Document intriguantDans l'enceinte du Super U, les enquêteurs ont par ailleurs -retrouvé les armes utilisées par le terroriste pour tuer ses victimes : une arme de poing de calibre 7.65, un couteau de chasse ainsi que trois engins explosifs artisanaux disposés dans le magasin qui n'ont pas explosé.
A son domicile, un carnet de notes évoquant l'idée d'un testament a également été découvert. " Il ne s'agit pas d'une lettre -formalisée, explique une source proche de l'enquête. Plutôt des bouts de phrases dans lesquels figurent les mots “mourir”, “allégeance” ou encore “Etat islamique” ". Un document intriguant, qui semble esquisser l'hypothèse d'un passage à l'acte peu préparé.
Du côté de la recherche d'éventuelles complicités, deux proches du tueur – sa petite amie, fichée " S ", et un de ses amis âgé de 17 ans, lui aussi signalé pour sa radicalisation – étaient toujours entendus par les enquêteurs lundi matin, leurs gardes à vue ayant été prolongées. L'exploitation du matériel informatique de Radounane Lakdim, toujours en cours d'analyse, permettra peut-être de déterminer s'il a été en contact avec des complices ou un donneur d'ordre.
L'environnement de Radouane Lakdim est en tout cas passé au peigne fin, et il apparaît que le jeune homme évolue depuis longtemps au contact d'un -certain nombre de personnes -connues des services de police et de renseignement. C'est d'ailleurs ce qui motive son suivi, à partir de 2013, par la DGSI.
Radouane Lakdim travaille alors avec un individu qui a été interpellé, en  2008, par l'actuelle SDAT dans le cadre d'un coup de filet entre Toulouse, Montpellier, Carcassonne et Trèbes, dans des milieux que l'on soupçonne proches du groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC), a pu recouper Le Monde.
Ces personnes, notamment d'origines serbes, intriguent alors par leurs entraînements en forêt et dans les environs de Carcassonne. Lors de leurs auditions, elles avoueront se préparer à une éventuelle guerre sainte en France ou en Irak. De nombreuses armes seront également retrouvées au domicile d'un des suspects. Cette vague d'interpellations fait elle-même suite à un coup de filet antiterroriste, quelques mois plus tôt, dans les milieux bosniaques du Doubs. Deux affaires déjà à la frontière entre milieux radicalisés et trafic d'armes alors que les investigations actuelles devront notamment s'attacher à déterminer la façon dont Radouane Lakdim a pu se procurer l'arme de poing avec laquelle il a opéré.
Le département de l'Aude est enfin, de manière plus large, très exposé au phénomène de la radicalisation : un peu moins d'une centaine de personnes étaient inscrites, début 2017, au fichier de traitement des signalements pour la prévention et la radi-calisation à caractère terroriste -(FSPRT). Les investigations se pencheront à ce titre nécessairement sur la proximité éventuelle de Radouane Lakdim avec les milieux radicaux toulousains.
Soren Seelow et Élise Vincent
© Le Monde

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