Paul Gauguin ou le Paradis perdu
« Il est extraordinaire
qu’on puisse mettre
tant de mystère
dans tant d’éclat »
(Stéphane Mallarmé)
qu’on puisse mettre
tant de mystère
dans tant d’éclat »
(Stéphane Mallarmé)
L’actuelle rétrospective des œuvres de Gauguin est concentrée sur ses deux dernières périodes : la bretonne et la polynésienne.
Qu’il s’agisse de la Bretagne ou des îles des mers du sud, Gauguin veut « fuir, là-bas fuir » (Mallarmé), fuir la calotte et la maréchaussée, fuir les cités industrielles : à la suite d’un krach boursier, il a commencé par fuir son métier de « trader » (agent de change) à la Bourse de Paris.
En Bretagne où il est le maître de l’Ecole de Pont-Aven, il donne La Belle Angèle, une bretonne que Théo Van Gogh compare aimablement à une jeune vache.Bonjour M. Gauguin a un titre d’une ironie amère : le peintre est devant une barrière que la paysanne bretonne refuse de lui ouvrir, à lui qui avait dit « J’aime la Bretagne, j’y trouve le sauvage, le primitif ». Il y peint Le Christ jaune, Le Christ vert, qui est de la couleur de la mort.
A Tahiti aussi les dieux sont morts, renversés par les missionnaires. Dans cette colonie, le paradis qu’il cherche, l’éden tropical primitif de Bougainville et de Diderot, a été détruit depuis longtemps. Gauguin est désenchanté, mais il découvre l’art océanien, et il veut ressusciter le paganisme polynésien. En voulant élaborer un paradis rêvé, il peint la mort des mythes, la mort d’un monde, et c’est pourquoi ses toiles sont d’une grande mélancolie. Mais dans un cadre tropical luxuriant : « Tahiti est un immense palais décoré par la nature elle-même ».
Il peint de grandes toiles aux formes élémentaires, aux couleurs éclatantes. Sa peinture est sensuelle et ses femmes, superbes : « Ce que j’ai voulu établir : le droit de tout oser ». Le voilà peintre maudit.
Parau Api (Femmes de Tahiti) (1891 : l’une est vêtue d’un paréo à fleurs, l’autre porte la stricte robe de mission, boutonnée du cou jusqu’aux chevilles.
Mata mua (Autrefois) (1892) : des femmes dansent, une autre joue de la flûte : nostalgie d’une époque idyllique.
Manao Tupapau (L’Esprit des morts veille) (1892) : c’est un nu féminin. Téhamana, la vahiné de Gauguin, est allongée sur un paréo jaune. Le «tupapau» (fantôme) sort du fond violet et entre dans sa chambre, pour l’emmener avec lui.
D’où venons-nous ? Que sommes-nous ? Où allons-nous ? allégorie symboliste sur les âges de la vie: l’enfant (le début dans la vie), de jeunes adultes (la jeunesse et la maturité), une vieille femme (la mort).
L e Cheval blanc est vert, car il a absorbé la chlorophylle de la prairie.
Puis Gauguin quitte Tahiti pour Hiva Hoa, l’une des îles Marquises, où tout appartient à la Mission catholique, et c’est là qu’il mourra. Les prêtres brûlent alors les tableaux qu’ils trouvent dans la « Maison du jouir » (c’est ainsi que Gauguin appelait sa paillote).
«La peinture est comme l’homme, vivante, toujours en lutte avec la matière » (Paul Gauguin).
♥ « Paul Gauguin », Fondation Beyeler, Bâle, jusqu’au 28 juin.
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