L'actualité du lundi 23/12/2013
La UNE
Thriller
C’est la
deuxième fois cette année - après son intervention dans la crise syrienne
- que Vladimir Poutine prend par surprise la communauté internationale. Et
ces gages qu’il donne prouvent que l’homme, tout autocrate qu’il soit, ne peut
se passer du reste du monde. La libération de Mikhaïl Khodorkovski
a un retentissement particulier. D’abord, l’histoire tient autant
du conte de Noël que du thriller politique. Tous les ingrédients y
sont, jusqu’au choix du lieu de la conférence de presse donnée hier,
ce musée consacré au mur de Berlin près de Checkpoint Charlie, mythique point
de passage entre l’Est et l’Ouest au temps du rideau de fer, un détail que
John Le Carré ne renierait pas. Ensuite, cette grâce intervient moins de
deux mois avant l’ouverture des JO de Sotchi, censés montrer au monde la
toute puissance du «tsar» russe. Poutine ne peut se permettre un boycott
des chancelleries étrangères. Et surtout, il a besoin d’attirer
des investisseurs dans un pays où la croissance flanche. Quant à l’ancien
oligarque, il s’est sans doute souvenu de ce vieil adage de l’ère
stalinienne : «Il faut remplir les goulags ? On va vous trouver des
coupables.» Il savait qu’il ne se remettrait pas d’un troisième procès qui
aurait sans doute «exhumé» d’autres dossiers et l’aurait envoyé à vie dans un
camp. Il y a là quelque chose du poète Joseph Brodsky, forcé d’émigrer en
1972 après des mois d’enfermement sous peine de vivre un enfer. Et même si
Khodorkovski n’est ni un ange ni un poète, on préférerait qu’il
ait le destin du Prix Nobel de littérature 1987, plutôt que celui
de Boris Berezovsky, autre oligarque en exil, retrouvé mort en mars
à son domicile anglais, officiellement d’un suicide.
Par Alexandra Schwartzbrod
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