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vendredi 12 décembre 2025

L'ECLAIREUR : Soudan, une terreur infinie - le 12.12.2025

 

Pascal Clérottedéc. 12 · L'ÉCLAIREUR

Qui connait le Soudan ne sera pas étonné. On ne sera pas non plus étonné du mutisme total des donneurs de leçons occidentaux. les Emirats Arabes Unis et en sousmain Israël (qui n'a cessé de semer le schisme dans la région depuis 30 ans) arment et financent les Janjawids, que ce même Occident a érigé en instrument de la lutte contre l'immigration clandestine par le processus de Khartoum de 2014. https://www.eclaireur.eu/p/et-soudain-le-soudan?utm_source=publication-search

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Mardi, la Cour Pénale Internationale (CPI) condamnait Ali Muhammad Abd Al Rahman, alias Ali Kushayb, un des leaders des janjawid de la première campagne génocidaire du Darfour (2003- 2019). Une peine de 20 ans de prison pour les crimes de lèse humanité portant sur des faits d’une rare sauvagerie. Le verdict est passé relativement inaperçu, tant il est vrai qu’une justice qui arrive trop tard, trop peu, n’est pas tout à fait une justice.

Il n’en est pas moins vrai que les décisions de la CPI ont pris une dimension folklorique et qu’il en coûte de les prendre au sérieux. Les seuls crimes retenus et jugés avec la sévérité qui sied à une instance de ce type porte sur des chefs d’Etats ou chefs tribaux africains, ce qui revient un peu au même. La pusillanimité des magistrats de cette cour, instituée par le Traité de Rome, face aux crimes paradigmatiques commis par Israël à Gaza, en Palestine occupée au Moyen-Orient et dans une toute une série d’autres pays où le régime travaille à fomenter des guerres civiles et des groupes terroristes, ou celle de son vassal les Etats-Unis ont beaucoup dévalué sa crédibilité.

La justice est si lente que lorsqu’arrive la condamnation d’Ali Kushayb, le pays est aux prises avec les crimes de lèse humanité encore plus cruels, perpétrés par les milices dites d’Abu d’Abi, tant il est démontré qu’elles sont financées par une chaîne de pays, dont la face visible sont les Emirats Arabes Unis (EAU). Entre ces milices se trouvent bien sûr et d’abord les Rapid Support Forces (RSF) de Mohamed Hamdan Dagalo dit Hemedti [voir du même auteur, Qui a intérêt à disloquer et déstabiliser le Soudan ?] et sa fratrie mafieuse, mais aussi toute une série de groupes qui se sont confédérés dans un gouvernement parallèle dit de “Tasis“, pour Soudan Nouveau ou Alliance fondatrice du Soudan, dont l’objectif est de créer une nouvelle partition de Soudan, au travers de la terreur, de la cleptocratie des ressources naturelles, du terrorisme économique (confiscation du champ pétrolier de Heglig par le RSF la semaine dernière, après avoir réussi à terroriser les chinois de la China National Petroleum Corporation, CNPC, lesquels normalement n’ont peur de rien en Afrique, par exemple). Le siège de cette alliance se trouve à Nairobi. La Kenya s’étant fait une spécialité dans ce jeu sale, lequel s’étend aux forces de disgrégation active à l’Est de la République Démocratique du Congo (RDC).

Parler de paix en commettant des crimes de guerre et en les documentant soi-même, c’est définitivement le nouveau normal de la géopolitique.

Parler de paix en commettant des crimes de guerre et en les documentant soi-même, c’est définitivement le nouveau normal de la géopolitique. A ce petit jeu, les milices d’Abu Dhabi se mesurent au benchmark israélien de crimes commis contre des civils. Les RSF avaient à peine commis leur massacre à l’hôpital Saoudien pour enfants de la ville d’Al Fasher dans le Nord Darfour, le 25 octobre dernier, faisant plus de 2000 victimes, surtout des enfants, que le 4 décembre, un autre groupe que tout opposait jusqu’il y a peu au RSF, le SPLM-N ciblait froidement une crèche à Kadougli, capitale du Kordofan du Sud. Quatre rafles de drones suicides étaient tirées depuis Kauda, sise à 40 kilomètres, causant des dizaines de morts. Le bilan final demeure incertain. Parmi les victimes, la plupart sont des enfants entre 5 et 7 ans, leur maître et les personnes venues à leur rescousse. Après les razzias et les viols massifs, la tendance semble désormais à l’infanticide systémique.

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Les Janjawid, les RSF on les connaît, mais que vient faire le SPLM-N dans ce jeu de massacre ? Quelle est cette association contre-nature ? En principe, tout les oppose. Le Mouvement Soudanais de Libération du Peuple (Nord) est une scission du mouvement du même nom devenu un Etat indépendant en 2011, le Soudan du Sud. Il est constitué de plusieurs ethnies et religions : musulmans, animistes, religions locales et même de quelques coptes. Il est dirigé par Abdelaziz Al-Hilu depuis 2017, après une guerre intestine entre lui et le leader antérieur du mouvement, Malik Agar. Ce dernier a rejoint cette année les rangs du président Abdel Fatah al Burham, en qualité de vice-président du gouvernement de transition.

Crimes du SPLM-N dans une crèche du Kordofan du Sud.

Le centre de gravité du SPLM-N se trouve dans les Monts Nouba au Kordofan du Sud, région longtemps victime des attaques de milices arabes affiliés au RSF. La raison d’être du SPLM-N, serait précisément de protéger sa population, en majorité d’ethnie bantoue, des razzias des RSF.

Aujourd’hui, RSF et SPLM-N sont frères d’armes dans la terreur contre le gouvernement de transition de Khartoum.

Comme chacun sait, le Soudan, ex-Royaume de Koush est un fascinant patchwork d’ethnies, dont beaucoup gardent l’empreinte nilotique et la mémoire transgénérationnelle de la grandeur d’Egypte, outre le patrimoine linguistique. Après son islamisation, certains soudanais ont laissé en lettres de sang, le souvenir de leurs razzias dans le territoire de ce qui est aujourd’hui la RDC : les fameux batambatamba, esclavagistes du XIX siècle. Beaucoup de soudanais d’ethnie bantoue sont des descendants de ces razzias provenant de l’est congolais. Les RSF, composées essentiellement de janjawid, sont porteurs de la mémoire du commerce d’esclaves pratiqués par leurs ancêtres. Hemedti avait lui-même été chargé par Omar al Bashir de combattre le SPLM-N, lorsque le RSF faisait partie de la même coalition. Aujourd’hui, RSF et SPLM-N sont frères d’armes dans la terreur contre le gouvernement de transition de Khartoum.

Officiellement, un autre axe important pour Al Hilul, consistait dans le fait de se protéger de l’absolutisme islamique des gouvernements arabisant de Khartoum. Chose qui semblait acquise, à la suite d’un accord signé en 2020 entre Al Hilu et le gouvernement d’Al Burhnam pour la création d’un “État, civil, démocratique et fédéral” et la séparation de la religion d’avec l’Etat. Pourtant à partir du 21 juin dernier, Al Hilu rompt l’accord et attaque des unités de l’armée soudanaise dans les localités de Kadougli et al-Dalanj, choisissant de s’associer aux janjawid. Depuis ses attaques ont gravi en intensité, atteignant le cœur des populations dont il serait le gardien.

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Constituer un État séculaire, “fédéral et démocratique“ au Soudan relève de la quadrature du cercle, du fait de la parcellisation mafieuse des ressources par les factions séditieuses et de l’instigation à la déstabilisation par les EAU, avec en arrière-plan Israël. L’idée étant de faire peser sur l’Egypte une épée de Damoclès. En 2008, Avi Dichter, ex-ministre israélien de l’intérieur pour la sûreté (actuel ministre de l’agriculture), déclarait qu’il ne fallait pas permettre au Soudan de devenir l’arrière-cours stratégique de l’Egypte, ce qu’il avait été pendant la guerre de 1967, donc Israël devait “pénétrer dans l’arène et exacerber les crises existantes et en fomenter d’autres “. A ce tableau vénéneux, s’ajoute la concupiscence. Les plus grandes ressources d’or du monde se trouvent au Soudan. Sans parler de l’uranium, du vanadium, du phosphate, du pétrole, des terres rares, etc. Le Soudan ce n’est pas seulement le pays des milles pyramides, mais un sous-sol d’une abondance rare.

Si Hemedti contrôle la plupart des mines d’or de l’ouest, Darfour et Kordofan inclus, Al-Hilu n’est pas en reste. Il a un long historique de corruption et de pratiques mafieuses à la meilleure manière des Seigneurs de Guerre. Il serait le propriétaire d’une entité financière, la Nuba Mountains Bank for Developement sur laquelle circulerait des transactions très intéressantes dont on reparlera dans nos colonnes ainsi que d’autres avoirs. Pour savoir, qui a intérêt à rendre la terreur structurelle, suivons la piste de l’argent.

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