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samedi 20 juillet 2024

LSDJ (La Sélection du Jour) - SCIENCES Gaïa BH3 : « le trou noir qui ne devait pas exister » - le 20.07.2024

 

La Sélection Du Jour
20 JUILLET 2024 - N°2250

SCIENCES

Gaïa BH3 : « le trou noir qui ne devait pas exister »

Vue d'artiste du compagnon du trou noir (Wikipedia)
Une équipe de l'observatoire de Paris a découvert un trou noir stellaire de 33 fois la masse du Soleil, le plus massif jamais observé dans notre galaxie, détecté grâce aux perturbations du mouvement de son compagnon stellaire observées par le satellite Gaïa. Les trous noirs stellaires se forment suite à l'effondrement de grandes étoiles après leur explosion en supernovæ mais l'existence confirmée de tels trous noirs supermassifs n'a pas encore d'explication théorique.

Un trou noir dont la masse dépasse 30 fois la masse de notre soleil vient d'être découvert par une équipe de recherche de l'observatoire de Paris, en analysant les données du satellite Gaïa ! C'est le trou noir stellaire le plus massif jamais observé dans notre galaxie à ce jour.

Mais comment ont-ils pu « voir » un trou noir qui, par définition, est… noir ? Avant tout, il faut savoir qu'un trou noir stellaire est le résidu d'une étoile très massive dont le cœur, après qu'elle ait explosé sous forme de supernovæ, se condense tellement qu'il perce l'espace temps. Issu des équations d'Einstein, cet objet ne laisse rien sortir, pas même la lumière. C'est donc la forte densité du cœur effondré qui est responsable de cette déchirure cosmique. Pour vous donner une idée, un trou noir apparaît si vous compresser le Soleil dans le périphérique parisien, ou la Terre dans une coquille de noix.

Les trous noirs issus de l'effondrement du cœur d'une étoile ont normalement des masses assez proches de celles du soleil. Ils sont cependant issus d'effondrement d'étoiles encore plus massive. En effet, le cœur d'une étoile, graine à trou noir, ne représente qu'une fraction de la masse totale de l'étoile. Un trou noir de masse solaire par exemple, est issu de l'effondrement d'une étoile 30 fois plus massive que le Soleil. BH3, le trou noir récemment observé par l'équipe GEPI de l'observatoire de Paris (pour Black Hole 3, parce que le 3ème qu'ils trouvent dans notre galaxie) aurait une masse dépassant 30 fois celle de notre soleil, ce qui le placerait sans conteste, sur la première marche du podium. Il serait issu de l'effondrement d'une étoile de plus de 300 fois la masse du soleil ! Est-il possible que sur les trois trous noirs observés jusqu'ici, un soit issu d'une étoile supermassive ? Ce type d'étoiles gigantesque existe mais elles sont extrêmement rares. Cela pose question parce que statistiquement, il aurait a priori fallu en observer des milliers pour avoir la probabilité d'observer un jour un trou noir issu d'une étoile aussi massive…

Mais comment les chercheurs ont-ils pu connaître sa masse, sans même le voir ? L'idée est assez simple, si on sait que la moitié des étoiles, et la quasi totalité des étoiles très massives n'aiment pas être célibataire. Elles vivent souvent en couple, voire en trouple. On les appelles des étoiles binaires. Elles aiment à se tourner autour pendant plusieurs milliards d'années. Très souvent il arrive que la plus massive des deux arrache à son compagnon du gaz, et grossisse alors d'avantage encore, absorbant d'autant plus de gaz, jusqu'à plus soif, et.. explose. Reste donc son cœur sous forme de trou noir, et le reliquat de l'astre compagnon qui, esseulé, continue à tourner comme une âme en peine autour du trou noir.

C'est exactement ce petit mouvement d'un compagnon, situé à plus de 2000 année lumières de la Terre que les chercheurs de l'observatoire de Paris ont observé. Ils ont remarqué que son mouvement, légèrement perturbé, trahissait la présence d'un trou noir à ses côtés. Tout comme un extraterrestre dont le Soleil serait caché à sa vue, pourrait en déduire sa masse en mesurant la vitesse de la Terre, les astrophysiciens ont déduit la masse du trou noir BH3 en observant le mouvement de son ex-compagnon. Et ils ont obtenu une masse de 33 fois la masse du soleil, ce qui est colossal.

Certains trous noirs, plus légers, peuvent être étudiés à partir du gaz qui continue à être absorbé de son compagnon, et chauffe dans son chemin vers le trou noir. Ce sont des trous noirs dits actifs. BH3 est un trou noir dormant, parce que complètement invisible si son ex-compagnon, trop lointain pour lui fournir du gaz, ne nous avait indiqué sa présence par sa trajectoire. Maintenant, des dizaines de chercheurs essaient de comprendre l'origine d'un tel trou noir. Une théorie propose qu'il soit issu d'une étoile supermassive, de près de 300 fois la masse du soleil. Ces étoiles peupleraient notre galaxie dans sa prime jeunesse, quelques 500 millions d'années après le Big Bang. Les prochaines données du James Webb Télescope pourraient confirmer cette hypothèse, puisqu'il est capable de voir suffisamment loin pour observer ces étoiles primitives. D'autres suggèrent que BH3 serait issu d'une collision entre deux trous noirs moins massifs, phénomène déjà observés depuis 2015 dans les expériences LIGO-VIRGO.

Les trous noirs n'ont donc pas encore fini de nous fasciner. D'autant que certains d'entre eux, dits « supermassifs », dont les masses dépassent des millions voire des milliards de fois la masse du soleil, et qui logent au cœur des galaxies, n'ont pour l'instant aucune explication théorique. Mais, grâce à BH3, nous avons désormais la chance d'avoir localisé un trou noir massif à portée de main (2000 années lumières seulement), ce qui en fera un observatoire cosmique idéal pour analyser ces si étranges déchirures de l'espace-temps, dont Einstein lui-même a douté toute sa vie de leur véritable existence.

Janus Maat

Découverte d'un système stellaire exceptionnel grâce à Gaia

>>> Chaîne YouTube de l'Observatoire de Paris
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