Le dopage est un poison toujours aussi présent dans le sport. Alors que les Jeux Olympiques auront lieu en France cet été, les commentateurs se demandent si notre pays va savoir rivaliser avec les hôtes passés. La cérémonie d'ouverture des Jeux de 2012 à Londres est citée en référence avec la mise en scène d'Élisabeth II et de James Bond : les Français réussiront-ils à résumer avec autant de brio leur culture et leur ambition ? Verra-t-on Jean Dujardin, alias OSS 117, sauver la reine de Paris, Anne Hidalgo, d'une attaque grouillante de surmulots autour de sa planche de surf ? Le coût d'éclat britannique a fait oublier la face obscure de l'édition 2012 : c'était la plus sale de l'histoire des Jeux. C'est ce qu'affirme Grigory Rodchenko, le lanceur d'alerte russe qui a révélé le scandale du dopage chez les athlètes russes et qui a dû fuir son pays en 2015 pour se réfugier aux États-Unis. Rodchenko était à la pointe du développement de nouvelles drogues – quasi indétectables – pour augmenter les performances des athlètes internationaux. Un documentaire ( « Icarus » datant de 2017 (Netflix)) retrace son parcours. Selon lui, le laboratoire britannique en charge des tests anti-dopage en 2012 a manqué 126 cas positifs… Les politiques et les instances sportives continuent d'affirmer que la lutte contre le dopage est une priorité. À l'instar du trafic de drogues, c'est un fléau global. Il n'est pas l'apanage des Russes mais on sait qu'il était massif sous les régimes communistes du Pacte de Varsovie. L'exemple de la lanceuse de poids est-allemande Heidi Krieger, qui gagna le championnat d'Europe féminin en 1986, est emblématique. À peine adolescente, des médecins l'ont soumise à un régime intensif de « vitamines » — en fait des pilules d'Oral-Turinabol, un stéroïde anabolisant. Elle a témoigné plus tard comment elle a vu son corps changer. Désespérée, elle a fini par demander un changement de sexe en 1997 pour devenir « Andreas ». Les libéraux de 2024, qui font la promotion de la « transition de genre » comme l'étape ultime de la libération des individus, ne font pas référence à l'histoire sordide de cette « pionnière ». Pour les communistes aussi, il s'agissait de libérer les athlètes des limites de leurs corps de femmes… Or, on observe aujourd'hui une tendance (au nom des « droits humains ») à faire disparaître les femmes des compétitions sportives en acceptant de les faire concourir contre des athlètes « transgenres » (voir LSDJ 1958). Le transhumanisme des communistes est rejoint par celui des libéraux selon Mary Harrington (voir son essai en lien). Doit-on s'étonner alors qu'un entrepreneur américain vienne d'annoncer son intention de lancer des « Jeux améliorés » (« Enhanced Games ») ? Au diable l'hypocrisie ! Puisque le dopage est un fait courant dans le sport de haut niveau et qu'aujourd'hui les spectateurs attendent des records, laissons les athlètes prendre appui sur les merveilles de la science pour faire avancer l'humanité… Bien sûr, il y a eu des cris d'orfraie… Travis Tygart, patron de l'agence anti-dopage américaine a parlé sur l'antenne de CNN d'une « bouffonnerie dangereuse ». Mais il faut prendre Aron D'Souza – le fondateur des « Enhanced Games » - au sérieux. Il a déjà réuni des financements et il affirme avoir reçu de nombreuses marques d'intérêt de sportifs de haut niveau. Car l'essentiel n'est plus de participer : D'Souza propose des prix juteux pour récompenser les performances des « super-héros ». Le nageur australien à la retraite James Magnusson a par exemple déclaré qu'il n'hésiterait pas à participer à ces jeux dopés dans l'espoir de rafler le million de dollars promis… Pour D'Souza, les Jeux Olympiques de Pierre de Coubertin appartiennent au passé. Le sport est devenu une industrie qui doit épouser les avancées scientifiques et mieux répondre aux attentes des « consommateurs ». Les « Enhanced Games » assureront selon lui une meilleure protection des sportifs en encadrant la prise de produits tout en permettant à la médecine de transformer l'être humain grâce à l'élite participant aux Jeux. Le discours épouse le langage « woke » à la perfection : D'Souza prétend que l'accusation de dopage est une injure datant des colonialistes décrivant les rituels d'Africains se préparant au combat. Il marche main dans la main avec la communauté LGBTQ+ : des jeux libérés des contrôles anti-dopage ouvriront leurs portes à tous les genres mis sur un pied d'égalité grâce aux produits des « bons docteurs » des laboratoires. Lever l'interdiction du dopage serait une aubaine pour les multinationales pharmaceutiques… Des libéraux de 2024 envisagent donc de réaliser le rêve des maîtres totalitaires du XXe siècle. Le « sexe faible » disparaît de ce rêve transhumaniste : les femmes ont des performances trop décevantes et ne sont pas assez productives à cause des grossesses – aidons-les à se débarrasser de ces chaînes ! Les athlètes « transgenres » seraient l'avenir radieux du sport féminin… De quoi ébranler les valeurs fondatrices prônées par Pierre de Coubertin. Ludovic Lavaucelle |
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