EMPLOI - A défaut d'avoir remporté son pari, le gouvernement sauve l'honneur. Le taux de chômage en France a baissé de 0,1 point au dernier trimestre 2013, à 9,8% de la population active en métropole et 10,2% avec départements d'outre-mer, a annoncé ce jeudi 6 mars l'Institut national de la statistique (Insee). Des chiffres qui contredisent la hausse constatée sur la même période par Pôle Emploi, et qui ont été interprétés par certains ténors de la majorité comme la preuve de la fameuse "inversion de la courbe" du chômage promise par François Hollande.
"Le chômage en France a baissé au 4e trimestre 2013, conformément à l'ambition du président de la République de voir le chômage commencer à reculer en fin d'année. C'est la première fois depuis la mi-2011", a salué le ministre du Travail Michel Sapin dans un communiqué. "Au titre de Pole Emploi, il n'y a pas eu d'inversion. Au titre du BIT, selon l'Insee, oui", a-t-il ajouté ensuite lors d'une conférence de presse.
Alors l'engagement de François Hollande a-t-il été tenu? "La promesse a été respectée", confirme Michel Sapin.
Un peu plus tôt, son collègue Stéphane Le Foll avait tiré la même conclusion: "Ça ne ressemble pas, c'est une inversion de la courbe du chômage", s'est emballé le ministre de l'Agriculture.
"Le chiffre regardé par la Commission européenne et le FMI"
Alors pourquoi un tel satisfecit? Selon Michel Sapin, c'est l'influence des chiffres annoncés ce jeudi qui est remarquable. Mesuré grâce à une enquête effectuée chaque trimestre auprès de 110.000 personnes, le taux de chômage est le seul indicateur reconnu au niveau international. Le ministre du Travail a d'ailleurs souligné, que "ce chiffre est celui regardé par le FMI et la commission européenne".
Et le ministre du Travail d'ajouter: "Les statistiques de l'Insee sont beaucoup plus fiables par rapport aux aléas".
Il n'en reste pas moins que les divergences entre la courbe Insee et la courbe Pole Emploi sont importantes. Le deuxième "thermomètre" du chômage en France, le nombre d'inscrits à Pôle emploi, a lui continué à grimper fin 2013, contredisant l'engagement présidentiel. Selon les chiffres publiés par le ministère du Travail, le nombre d'inscrits en catégorie A (chômage total) avait grimpé de 0,34% entre le troisième et quatrième trimestre 2013.
"Il y a deux types de statistiques, chacune a sa valeur", a confirmé Michel Sapin, précisant que, "des décalages temporels peuvent exister mais ils ne sont pas fondamentaux".
Stabilité sur l'année, Ayrault veut "mettre le turbo"
Pas de raison de crier victoire pour autant. Car "sur l'année, le nombre de chômeurs au sens du BIT est stable", rappelle l'Insee. "Sur la même période, le nombre de demandeurs d'emploi en fin de mois inscrits à Pôle emploi classés en catégorie A (sans aucune activité) progresse de 190.000. Ces deux mesures ne sont pas contradictoires, car elles ne recouvrent pas les mêmes situations", souligne encore l'Institut dans un communiqué.
L'amélioration mise en évidence par l'Insee concerne surtout les 15-24 ans (-1,1 point sur un trimestre, -2,6 points sur un an). Leur taux de chômage atteint toutefois encore 22,8% au 4e trimestre 2013. Le pic historique a été atteint à deux reprises en 1994 et 1997 à 10,4% en métropole. Et le point bas à 6,8%.
Raison de plus pour accélérer. "Le chômage est en train de reculer. Il a baissé en un an de 85.000 pour les jeunes, le chômage des jeunes recule. Pour les autres, malheureusement, il est encore à un taux beaucoup trop élevé mais il a commencé à baisser au dernier trimestre comme dans le reste de l'Europe", a réagi sobrement Jean-Marc Ayrault qui était invité sur RMC et BFMTV.
Selon le premier ministre, "c'est le moment d'accélérer, c'est le moment de mettre le turbo, de faire vivre le pacte que le président de la République a proposé aux forces vives du pays pour que 2014 soit le tournant de la reconquête économique, de la croissance et du recul durable du chômage".
Changement statistique à l'Insee
Ces chiffres interviennent au moment où l'Insee a procédé à une importante rénovation de ses méthodes d'enquête. Cette innovation a notamment entraîné une révision à la baisse de 0,5 point de tous les taux de chômage, présents et passés.
L'Insee a notamment revu la formulation de certaines questions, afin d'améliorer leur compréhension. In fine, avec ce nouveau questionnaire jugé plus pertinent, les résultats font apparaître un taux légèrement inférieur à celui obtenu avec le précédent. L'Institut a donc décidé d'abaisser l'ensemble de ses chiffres, afin de permettre les comparaisons dans le temps, et avec les autres pays.
"Personne n'a mis son nez là-dedans au gouvernement, ni au ministère du Travail, ni à Bercy", affirme-t-on au ministère du Travail à propos de cette nouvelle méthode. Le pic historique, atteint à deux reprises en 1994 et 1997, est ramené à 10,4% en métropole. Et le point bas, atteint début 2008, à 6,8%.
"Le chiffre regardé par la Commission européenne et le FMI"