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Municipales : l’autre enracinement
Petit Front de gauche peut devenir grand
Publié le 25 mars 2014 à 12:11 dans Politique
L'AUTEUR
Jérôme Leroy est écrivain et rédacteur en chef culture de Causeur.
Il va enfin y avoir des touristes à Hénin-Beaumont. Ils auront
des caméras et une carte de presse, mais au moins, ça fera de l’animation. On
peut parier que ça va durer pour les deux ou trois ans à venir. Les
journalistes adorent ça, les belles histoires simples qui frappent
l’imagination. À quoi ça peut ressembler, des prolos dans un coin vilain comme
tout qui ont transformé une ville ouvrière historiquement à gauche en
laboratoire du FN ? Ça va filmer sec du côté des friteries et des
bistrots, et puis aussi du marché, l’endroit favori de rassemblement des
pauvres d’après le guide du Routard des idées reçues.
Après tout,
peu importe que l’enracinement du FN ait ici une bonne vingtaine d’années et
qu’il se soit approfondi dans un microclimat particulier, celui d’un PS
corrompu et d’une ville et d’un bassin d’emploi qui auront connu un vrai
désespoir, celui de la fermeture des mines et un faux espoir, presque plus
douloureux, celui d’une réindustrialisation ratée dans les années 90 qui
débouchera sur un autre échec symbolisé, entre autres, par la fermeture
violente de Metaleurop en 2003. On ne verra à Hénin-Beaumont que ce que l’on
veut bien voir depuis Paris. Avec les grilles de lectures prédigérées qui iront
de l’antifascisme de bac à sable aux sempiternels mantras de « la gauche sans le peuple », du PS qui a trahi la
classe ouvrière et du PCF qui est aux abonnés absents. Peu importe aussi que le
vote FN d’Hénin-Beaumont et du bassin minier n’ait rien de commun, ni par son
électorat, ni parce ce qu’il demande avec celui du Sud composés par des
pieds-noirs qui vont en arriver à la troisième génération de rancœur
identitaire ou par des retraités aisés qui veulent de la sécurité, encore de la
sécurité, toujours de la sécurité.
Non, nous serine-t-on à longueur de reportages
et de colonnes, le seul fait majeur de ces élections municipales, c’est la
poussée sans précédent du FN. On a déjà oublié sa difficulté à présenter des
listes (et leur petit nombre in fine), on a déjà oublié la présence de
centenaires, d’alzheimériens ou même de personnes décédées sur celles que le
parti de Marine Le Pen est parvenue péniblement à boucler, on a enfin oublié
que le FN a déjà eu une expérience municipale, expérience pas franchement
heureuse d’ailleurs, en 1995 où toutes les mairies ont été perdues dès le
mandat suivant sauf celle d’Orange.
On le voit, c’est tout de même
beaucoup plus facile quand l’ensemble du système médiatique se transforme, plus
ou moins volontairement, en attachée de presse faussement effrayée et vraiment
complaisante. On en arriverait presque à penser que l’on se trouve en présence
de chiens de garde cathodiques rendant service à leurs maîtres en faisant
croire qu’il n’y a plus d’alternative électorale, désormais, qu’entre des
partis libéraux et sociaux-libéraux d’un côté et le FN de l’autre…
La suite ici --->municipales-front-gauche-fn
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