BFMTV et Nicolas Sarkozy, les vertus d‘un scandale démocratique
« On nous dit tout le temps qu’on doit coller à la France. Et comme la France se droitise, on se droitise avec. On est prisonnier d’un système économique. » Ces mots ont été prononcés par un reporter chevronné de la principale chaîne d’information en continue BFMTV. En cause : les consignes passées par le directeur général Marc-Olivier Fogiel pour droitiser davantage son antenne, avec l’arrivée dès la rentrée prochaine d’Yves Thréard, éditorialiste au Figaro, et d’Éric Brunet, ancien de la maison et arraché à LCI.
Le premier, 64 ans, s’est notamment signalé récemment pour avoir qualifié Rachida Dati de « petite beurette qui a réussi » ou pour avoir déclaré en 2019 « je déteste la religion musulmane ». Le second fut un farouche défenseur de Nicolas Sarkozy : en 2012, avant que son champion ne perde la présidentielle, il pointait du doigt les « maîtres censeurs » que sont, selon lui, les journalistes : « des cohortes de valeureux baveux menant la guérilla des mots ».
Éric Brunet sera en terrain connu avec la direction de BFMTV. Comme Mediapart l’a révélé, une partie de l’état-major de la chaine s’est mise au service de Nicolas Sarkozy en 2020 dans l’affaire de la fausse rétraction de Ziad Takieddine. Parmi les éléments accablants trouvés par les juges d’instruction, des textos échangés entre Véronique Waché, conseillère de Nicolas Sarkozy, et plusieurs éminentes personnalités du canal télévisé. Ils exposent la mobilisation acharnée de Marc-Olivier Fogiel, Ruth Elkrief ou encore Bruno Jeudy au service d’une manipulation destinée à blanchir, au moins médiatiquement, l’ancien président, empêtré dans l’affaire des financements libyens de sa campagne.
Les syndicats et la Société des journalistes sont consternés. Et BFMTV devra sans doute s’en expliquer lors de son audition devant l’autorité de régulation de l’audiovisuel, l’Arcom, la semaine prochaine, dans le cadre du renouvellement de 15 fréquences publiques. Lundi, c’est CNews qui sera convoquée : la chaîne de Vincent Bolloré déverse chaque jour un discours de haine, ultraconservateur et désormais ultrapartisan – la campagne des législatives l’a bien montré. Un scandale démocratique auquel l’Arcom a l’occasion unique de mettre fin.
Elle pourrait choisir, pour la remplacer, une chaîne indépendante, respectueuse de la déontologie journalistique et garante d’un pluralisme de plus en plus restreint. Plusieurs offres sont sur la table, dont celle de la web-tv Le Média, qui a reçu le soutien amical de plusieurs médias indépendants, dont celui de Mediapart. |
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