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mardi 2 juillet 2024

Après la confusion, le « tout sauf RN » s’impose peu à peu chez les macronistes....le 1.07.2024

 

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POLITIQUE

Après la confusion, le « tout sauf RN » s’impose peu à peu chez les macronistes

À rebours du « ni-ni » d’abord défendu par Édouard Philippe et Bruno Le Maire, le camp présidentiel affiche peu à peu un front républicain plus clair face à l’extrême droite. Les désistements se multiplient, réduisant d’heure en heure le nombre de triangulaires.

Pauline Graulle et Ilyes Ramdani



Longtemps tenus à la cohésion par l’exercice du pouvoir, les soutiens du président de la République ont donné à voir, depuis dimanche soir, toutes leurs divergences. Au sein du gouvernement, mais aussi entre les trois composantes de l’ex-majorité (Renaissance, MoDem et Horizons), les différences se sont concentrées sur une question : faut-il faire barrage, coûte que coûte, à l’extrême droite au second tour des élections législatives ?

Malgré des heures de palabres à l’Élysée dimanche encore, les cadres de la coalition présidentielle ne sont pas parvenus à s’accorder sur une réponse commune. « Les partis ne sont pas d’accord entre eux, et au sein même des partis, les cadres ne sont pas d’accord entre eux», ironisait dimanche soir un dirigeant de parti au fait des derniers échanges. 

Au cours de la soirée, c’est la ligne du « ni-ni » qui a d’abord semblé l’emporter. « Aucune voix ne doit se porter sur les candidats du RN ni sur ceux de La France insoumise (LFI), avec lesquels nous divergeons non pas seulement sur des programmes mais sur des valeurs fondamentales », a par exemple déclaré Édouard Philippe, le président d’Horizons. Son homologue du MoDem, François Bayrou, a quant à lui appelé à regarder « circonscription par circonscription », assumant avoir « un problème avec LFI ».

Lundi matin encore, Bruno Le Maire a exprimé sur France Inter son refus de choisir entre LFI et le RN. « Je combats le RN, mais je ne vote pas La France insoumise, a résumé le ministre de l’économie et des finances. Elle a pris des positions contre la nation française. La France insoumise, c’est le communautarisme, l’antisémitisme, la violence. » Des propos qui ont suscité la réponse ferme et émue de Marine Tondelier, la secrétaire nationale des Écologistes, présente en studio.

Pourtant virulent à l’égard de la gauche pendant la campagne, Gabriel Attal s’est finalement distingué de ses partenaires par la gravité de son discours, dès dimanche soir. « Dans de pareilles circonstances, la France mérite que l’on n’hésite pas, jamais, a tranché le premier ministre, qui a conduit la campagne de son camp. Notre objectif est clair : empêcher le Rassemblement national d’avoir une majorité absolue au second tour. »

Un changement de ton

Dans son sillage, plusieurs figures de Renaissance ont suivi la ligne fixée à Matignon. Arrivée troisième dans sa circonscription marseillaise, la secrétaire d’État Sabrina Agresti-Roubache s’est désistée et a dit « de façon très claire » sa volonté de faire barrage au RN. « Les échecs, ça arrive, le déshonneur on ne s’en remet jamais », a dit l’élue des Bouches-du-Rhône. D’autres, comme la ministre des outre-mer, Marie Guévenoux, candidate dans l’Essonne, ou sa collègue chargée du handicap, Fadila Khattabi, en Côte-d’Or, ont fait de même.

Dimanche soir puis lundi 1er juillet au fil de la journée, les désistements de ce type se sont multipliés et les triangulaires sont progressivement devenues des duels. Une impulsion dictée dès dimanche soir à l’Élysée et diffusée sur le terrain, parfois au prix de certains efforts. « Quand j’ai appelé la candidate de ma circonscription pour la débrancher, ça n’a pas été une simple affaire, raconte un cadre du camp présidentiel. Elle a fondu en larmes mais elle a accepté. » 

Loin de la ligne défendue par Édouard Philippe ou Bruno Le Maire, Gabriel Attal et Emmanuel Macron se sont retrouvés sur la marche à suivre pour priver le RN de majorité absolue. Lundi midi, face aux membres du gouvernement, le président de la République a appelé à « ne pas se tromper »« C’est l’extrême droite qui est en passe d’accéder aux plus hautes fonctions, personne d’autre, a-t-il affirmé, selon RTL. Pas une voix ne doit aller à l’extrême droite. Il faut se souvenir qu’en 2017 et en 2022, en face, à gauche, tout le monde a porté ce message. Sans cela, votre serviteur et vous ne serions pas là. »

Lundi, face aux candidats de la majorité réunis en visioconférence, Gabriel Attal a enfoncé le clou. « Seul le RN peut avoir une majorité absolue à l’Assemblée nationale, a-t-il lancé, hiérarchisant les périls. L’enjeu est donc clair : veut-on confier les pleins pouvoirs et le destin du pays au RN ? » 

Barrer la route au lepénisme

Du côté des anciens socialistes de la macronie, les choses sont encore plus claires. « PARTOUT, Front républicain contre le Front national (sic) », a tweeté, lundi, l’ancien président de la commission des lois et ancien des jeunes socialistes, Sacha Houlié, en campagne pour sa réélection à Poitiers (Vienne). 

« Le pays est au bord d’une majorité d’extrême droite », a lui aussi martelé sur France Info l’ancien ministre des Transports, Clément Beaune, battu dimanche à Paris. « Il ne faut pas mettre de signe égal entre le Rassemblement national et le Nouveau Front populaire. Faisons tout ce qui est possible, par le désistement, par l’appel au vote républicain, pour battre le RN. J’ai des réticences contre certains candidats, mais la menace concrète pour le pays, ce n’est pas LFI, mais le RN », a-t-il souligné.

En difficulté face à l’extrême droite à Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône), l’ancien président de la commission développement durable à l’Assemblée nationale n’y va, lui non plus, pas par quatre chemins. « Il n’y a aucune nuance à avoir : je ne veux pas de majorité d’extrême droite, donc partout où le RN est présent, il faut le battre, y compris en votant pour des candidats insoumis », souligne auprès de Mediapart Jean-Marc Zulesi, qui ne porte pourtant pas les mélenchonistes « dans [son] cœur »

Si Jean-Luc Mélenchon était candidat en personne dans ma circonscription [...] face à l’extrême droite, je voterais sans problème pour lui.

L’eurodéputé Bernard Guetta

Cécile Rilhac, macroniste de la dite « aile gauche » arrivée troisième derrière le candidat du Nouveau Front populaire, Emmanuel Maurel, proche du PCF, et la candidate du RN, s’est elle aussi désistée. Moins par peur de la victoire de l’extrême droite dans sa circonscription du Val-d’Oise que « par principe républicain »« Au moins, je pars la tête haute, sinon, je ne m’en serais pas remise », confie celle qui estime néanmoins qu’un candidat insoumis ne rassemblerait pas assez d’électeurs pour être élu sur ses terres dimanche prochain.

Du côté du palais du Luxembourg, le sénateur Renaissance Xavier Iacovelli a aussi marqué les esprits, affirmant sur BFM, lundi matin, son désaccord avec une partie des troupes macronistes : « Je ne comprends pas la position de Bruno Le Maire », a-t-il insisté, en référence au ministre de l’économie qui a appelé à ne pas voter pour LFI.

Après son passage TV, le sénateur affirme avoir reçu des dizaines de messages se réjouissant de sa position. « Pour moi, il y a un ennemi de la République, c’est le Rassemblement national, contrairement à la gauche qui est un adversaire politique », insiste-t-il auprès de Mediapart, rappelant qu’il s’est engagé en politique en 2002, après que Jean-Marie Le Pen s’était hissé au second tour de la présidentielle. « L’extrême droite, c’est inconcevable, ça m’attaque dans ma chair, dans mes tripes », ajoute Xavier Iacovelli, proche du micro-parti d’Olivier Dussopt.

« À nous de faire le job »

Lundi, l’ancienne première ministre Élisabeth Borne s’est jointe au concert des « barragistes ». « Je ne pense pas qu’on puisse mettre le Front populaire et le RN sur un pied d’égalité », a-t-elle lancé depuis sa circonscription du Calvados, selon Le Parisien« Le Front populaire est une coalition, dans laquelle il y a beaucoup de partis républicains qui ont exercé le pouvoir avec responsabilité. » Une position d’autant plus facile à tenir que l’ancienne cheffe du gouvernement s’est vue ouvrir la voie du second tour par le désistement du candidat insoumis Noé Gauchard, arrivé troisième.

Dès le lendemain de la dissolution, il avait été le premier macroniste à appeler aussi clairement à barrer la route au « lepénisme ». Aujourd’hui, l’eurodéputé Bernard Guetta n’en démord pas : « Je n’ai aucune difficulté à le dire : si Jean-Luc Mélenchon était candidat en personne dans ma circonscription et qu’il se retrouvait dans un duel face à l’extrême droite, je voterais sans problème pour lui, et pourtant cela fait vingt-cinq ans qu’il m’insulte et je l’abomine totalement ! Mais le problème n’est pas là, il s’agit de voter contre le RN, d’autant qu’en tout état de cause, Mélenchon n’arrivera jamais au pouvoir. »

L’ancien chroniqueur de France Inter se révèle même relativement optimiste sur le « sursaut républicain » qu’il dit constater au sein des troupes de Renaissance. « Je suis même surpris de la rapidité avec laquelle les candidats se sont désistés », observe Bernard Guetta. « Ceux qui restent sur la ligne du “ni-ni” sont de plus en plus rares », ajoute celui qui a « détesté » la campagne visant à mettre en équivalence les deux « extrêmes ».

Pascal Canfin, son collègue au Parlement européen, manifeste une forme de bienveillance. « J’entends ceux qui disent au sein de la majorité que LFI, c’est trop loin de leur base, assure-t-il. Sur le fond, si on fait un exercice théorique à plat, je comprends leurs réticences. Mais si on parle de démocratie réelle, il n’y a pas à barguigner. Les électeurs de gauche ont fait le job quand il a fallu élire Macron contre le RN, deux fois. Maintenant, aux électeurs du centre de faire le job, quoiqu’ils pensent du candidat X ou Y. L’avenir de la France dépend intégralement de cette capacité collective à


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