Chaque matin, ouvrir les yeux et les oreilles et se réveiller, ouvrir sa conscience au monde, c’est un petit miracle dont il faut savourer chaque seconde comme une nouvelle chance d’exister. Mais sitôt, levé, il faut résister à la chape plombée que nous inflige ce monde ultra-connecté, affronter le récit des dernières nouvelles nationales ou internationales souvent plus attristantes les unes que les autres. Comment ne pas s’enferrer dans un sentiment d’impuissance, une résignation délétère, comment continuer croire en sa propre lumière et aux lendemains à venir ? Claire Marin, philosophe subtile et inspirante, interrogée avec brio par notre consœur Marie Lemonnier, nous offre une conversation douce et lumineuse qu’il faut lire et relire comme un antidote salvateur aux maux de l’époque. Leur dialogue voltige autour du dernier opus de cette exploratrice de l’intime, donc chaque livre est un succès immédiat. Après « Rupture(s) » et « Etre à sa place », celle-ci s’est intéressée aux premières fois avec « Les Débuts. Par où recommencer ». Leur dialogue dans nos pages de cette semaine est un petit bijou qui soigne l’âme, lui distille de revigorantes bouffées d’oxygène. Il se savoure phrase à phrase, en voici une petite mise en bouche. À Marie Lemonnier qui lui demande pourquoi nous sommes tellement attachés à nos premières fois, Claire Marin répond : « Parce que ce sont des instants d’une rare intensité qui fendent le temps et produisent en nous une accélération du sentiment d’existence. Qu’elle soit joie ou tragédie, l’apparition du neuf produit une émotion puissante, mêlée d’excitation et de fébrilité. C’est une déflagration, comme une électrisation de l’être. » Un peu plus loin, elle ajoute ceci : « Il n’y a pas un seul début à partir duquel le tout de l’existence se déroulerait, il y a beaucoup de débuts, plein de premières fois et de recommencements sur chacune des lignes de notre vie amoureuse, amicale, professionnelle, citoyenne… » Chaque matin, prendre conscience qu’on peut toujours réinventer sa vie et transformer le monde. Véronique Radier |
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