Le symbole est fort et l'événement totalement inédit. Selon nos informations, le bureau confédéral de Force ouvrière – sa direction – tiendra une réunion commune, lundi 2 juillet, avec celui de la CGT, emmené par son secrétaire général, Philippe Martinez. L'initiative de la rencontre, qui se tiendra au siège de FO, revient à Pascal -Pavageau, arrivé en avril à la tête de la centrale de l'avenue du Maine, à Paris. Elle intervient quatre jours après une journée d'action des deux organisations syndicales, le 28 juin, qui s'est soldée par un flop. " Quand j'ai fait ma tournée des secrétaires généraux - de la CGT, CFDT, CFTC et CFE-CGC - après mon élection, je leur ai, à chaque fois, proposé qu'on se fasse une petite réunion d'échanges avec nos bureaux respectifs, explique M. Pavageau. Tous ont accepté. Martinez m'a relancé assez vite et on devrait voir la CFDT en septembre. "
Reste que la rencontre sous cette forme avec la CGT a une saveur particulière. Les deux sœurs longtemps ennemies du syndicalisme vont ainsi se retrouver à quelques semaines près, soixante-dix ans après la création de FO, les 12 et 13 avril 1948. Cette fondation faisait suite à une scission d'avec la CGT décidée par les " groupes Force ouvrière ", le 19 décembre 1947, qui dénonçaient la mainmise du Parti communiste sur la confédération. Jusqu'au bout, Léon Jouhaux, qui était encore -cosecrétaire général de la CGT avec le communiste Benoît Frachon, avait tenté, faisant état de son
" amertume ", d'éviter la rupture.
Pendant les décennies qui ont suivi, FO, très anticommuniste, et la CGT se sont livré une guerre sans merci. En 1995, Marc Blondel, secrétaire général de FO, avait amorcé un rapprochement lors du mouvement social contre le plan Juppé, scellé par une spectaculaire poignée de main avec Louis Viannet, son homologue cégétiste. Il espérait manger la laine sur le dos de la CGT en récupérant une partie de ses militants. Un calcul qui s'avéra vain. Au sein de FO, nombreux sont ceux qui, parmi les trotskistes lambertistes, rêvent toujours d'une réunification des deux branches de la vieille CGT.
En 2006 contre le contrat première embauche, comme en 2010 contre la réforme des retraites, FO a joint ses forces à celles de tous les syndicats. En 2016, contre la loi El Khomri, la CGT et FO ont lutté ensemble pour son retrait. Jean-Claude Mailly avait alors accordé un entretien commun avec Philippe Martinez à
L'Humanité dimanche.Mais il avait mis fin à ce compagnonnage au moment des ordonnances sur la réforme du code du travail, au début du quinquennat d'Emmanuel Macron.
" Ce serait une erreur de penser qu'il y a une dimension politique dans ces réunions,assure M. Pavageau.
Lundi, on ne va pas travailler à une plate-forme commune FO-CGT ou à une autre FO-CFDT en septembre. L'idée est de se rencontrer et se connaître. " Ces retrouvailles avec la centrale de Montreuil ont pourtant toutes les chances d'être mal accueillies par certaines fédérations, comme celle de la métallurgie, très hostile à tout rapprochement avec la CGT.
" Si c'est ça, ça éclate en deux, estime un haut gradé de FO.
Pour l'heure, Pavageau donne des gages à son aile gauche, qui l'a fait élire. "
Lors du congrès de la confédération en avril, réformistes et contestataires s'étaient très fortement opposés, donnant l'image d'une -confédération fracturée. Ces dernières semaines, le nouveau numéro un de FO s'est nettement démarqué de son prédécesseur, en tenant un discours très dur à l'encontre de la politique du gouvernement et en basculant dans l'opposition, comme l'a montré le choix de défiler jeudi au côté de la CGT.
Raphaëlle Besse Desmoulières, et Michel Noblecourt
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