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lundi 2 juillet 2018

Fret SNCF : des perspectives encore assombries après le mouvement social


1er juillet 2018

Fret SNCF : des perspectives encore assombries après le mouvement social

La direction a revu à la baisse ses prévisions de chiffre d'affaires à la suite de la grève

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C'est un réajustement douloureux. Déjà très mal en point, l'activité Fret de la SNCF, appelée à être filialisée d'ici deux ans, ne sortira pas ragaillardie du long mouvement de grève que vient de connaître la compagnie nationale ferroviaire. Jeudi 28 juin, la direction de la division a présenté aux organisations syndicales les perspectives de chiffre d'affaires ajustées des grèves du deuxième trimestre.
Au lieu des 860  millions d'euros attendus en  2018, le budget révisé prévoit désormais 747  millions d'euros de revenus, contre 903 millions l'année dernière. Avec ce repli du chiffre d'affaires, le déficit devrait se creuser à 160 millions d'euros, contre 120  millions en  2017.
Pis, après le mouvement social du printemps, Fret SNCF ne pense pas pouvoir récupérer les parts de marché perdues. En  2019, la direction s'attend à réaliser un chiffre d'affaires de 853  millions d'euros, contre 883  millions initialement espérés et de 877  millions d'euros à l'horizon 2020, contre 901  millions budgétés.
Cette nouvelle trajectoire repousse encore d'une année la perspective d'un exercice financier positif. Au mieux, cela interviendra en  2021. Un objectif théorique tant la SNCF a multiplié ces dernières années une telle promesse, sans jamais la tenir.
Coûts importantsPour revenir à l'équilibre, la direction de Fret SNCF a indiqué aux syndicats qu'elle allait poursuivre les réorganisations, et notamment sa politique de suppression de postes : 754 seront éliminés d'ici à 2021. L'effectif de Fret SNCF devrait en trois ans passer de 5 478 salariés à 4 724, selon le document présenté aux organisations syndicales, révélé vendredi 29 juin par France Info et obtenu par Le Monde. Pour ce faire, la société compte ne pas remplacer les départs à la retraite et réaliser des reclassements au sein de l'entreprise ferroviaire. Interdite de licenciement, la SNCF recourt de manière chronique à ces mesures pour accompagner l'attrition de son activité de transport ferré de marchandises.
Ces réductions d'effectifs ne sont pas une véritable surprise pour les syndicats. Elles rythment, en effet, le quotidien de la branche depuis 2000. En  2002, alors en monopole, Fret SNCF réalisait un chiffre d'affaires de 1,96  milliard d'euros avec quelque 20 000 salariés. Seize ans plus tard, le groupe ferroviaire public a vu ses effectifs fondre des trois quarts.
Outre l'ouverture de la concurrence en  2006, qui a démontré que ses coûts étaient plus importants que ceux de ses rivaux, Fret SNCF subit depuis vingt ans la montée en puissance du fret par route et la désindustrialisation du pays. Mais la direction de la SNCF et son PDG, Guillaume Pepy, en tête assurent croire désormais à un retournement de tendance. Selon un sondage présenté par Fret SNCF, 83  % de ses clients entendent poursuivre le recours au fret ferroviaire dans un environnement économique solide si la qualité de services, les offres commerciales et la compétitivité sont au rendez-vous.
De fait, plusieurs facteurs plaident en faveur du fret ferroviaire par rapport au transport routier. Ce secteur a du mal à recruter des chauffeurs longue distance, tandis que ses charges progressent, en raison notamment de l'augmentation des prix du gazole (+ 29  % en deux ans), ce qui rend mécaniquement le ferroviaire plus compétitif.
Dans le même temps, la réforme ferroviaire prévoit des mesures de soutien avec le maintien de l'aide au transport combiné pour cinq ans, de nouvelles contributions de l'Etat pour financer les travaux des lignes dites capillaires, utilisées par le fret, ainsi que la remise en état des voies de services prioritaires et une baisse des péages pour le secteur.
Les salariés de Fret SNCF ne sont cependant pas au bout de leur peine. La SNCF a annoncé au printemps son intention de filialiser sa division fret d'ici à 2021, qui depuis sa dernière recapitalisation en  2006, a cumulé 4,3  milliards d'euros de pertes. Afin de s'en séparer, la SNCF va devoir en assurer la pérennité en la recapitalisant et en cédant sans doute certains actifs, comme devrait l'y contraindre la Commission européenne.
Philippe Jacqué
© Le Monde

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